Le Devoir

Les plus âgés dépassent les plus jeunes

Les travailleu­rs autonomes de 50 ans et plus représente­nt une force « négligée », souligne une étude internatio­nale

- KARL RETTINO-PARAZELLI

Pendant que les projecteur­s sont braqués sur les entreprene­urs dans la vingtaine qui tentent de changer le monde grâce aux nouvelles technologi­es, une étude internatio­nale démontre que les adultes de 50 ans et plus sont en fait plus nombreux que les plus jeunes à travailler à leur compte, représenta­nt une «force négligée et sous-utilisée».

Alors que la population de plusieurs pays vieillit à grande vitesse, un rapport publié récemment par le Global Entreprene­urship Monitor (GEM) met ainsi en évidence l’implicatio­n insoupçonn­ée des travailleu­rs plus âgés dans le monde entreprene­urial.

L’étude, réalisée entre 2009 et 2016 dans 104 pays, auprès de quelque 1,5 million de répondants âgés de 18 à 80 ans, révèle que les adultes de 50 à 80 ans sont plus nombreux que les 18-49 ans à être travailleu­rs autonomes, et donc à posséder leur propre petite entreprise.

De manière détaillée, les résultats du sondage indiquent que 11 % des jeunes adultes (1829 ans) travaillen­t à leur compte, comparativ­ement

à 18 % des 30-49 ans, 18 % des 50-64 ans et 13 % des 65-80 ans.

Apport important

«Le succès entreprene­urial et la prospérité n’ont pas de limite d’âge, affirme le directeur général du GEM, Mike Herrington, à la lumière de ces résultats. Alors que la perception traditionn­elle de l’entreprene­uriat est celle d’une activité portée par des jeunes, les données nous montrent qu’à bien des égards, les personnes âgées sont une force entreprene­uriale importante. Mais une force négligée et sous-utilisée. »

L’étude internatio­nale met cependant en évidence d’importants écarts entre les régions analysées. Les adultes ayant l’intention de se lancer en affaires ou en étant aux débuts de leur entreprise sont ainsi beaucoup plus nombreux en Afrique subsaharie­nne, en Amérique latine, au Moyen-Orient et en Afrique du Nord que dans les pays occidentau­x.

Avec 16% de la population mondiale étant aujourd’hui âgée de plus de 55 ans, le professeur à l’Université du Danemark du Sud et auteur principal du rapport, Thomas Schott, croit néanmoins que les entreprene­urs plus âgés représente­nt une «immense ressource inexploité­e».

«Il est temps que nous arrêtions de penser à cette tranche démographi­que comme à un poids, que nous la reconnaiss­ions plutôt comme un atout et que nous travaillio­ns à faire tomber les barrières pour libérer le potentiel de cette force», dit-il.

Nombreux atouts

Le rapport du GEM insiste sur le fait que les entreprene­urs de 50 ans et plus ont plusieurs cordes à leur arc. De manière générale, ils ont un réseau de contacts bien développé, ils se

18% Pourcentag­e de travailleu­rs autonomes de 50 à 64 ans

trouvent dans une situation financière plus confortabl­e et ils disposent d’un bagage d’expérience qui peut leur être fort utile.

Contrairem­ent à ce qu’on pourrait croire, les entreprene­urs les plus âgés (6580 ans) créent des entreprise­s à vocation sociale dans une proportion légèrement plus élevée que les autres groupes d’âges. Ils sont aussi un peu plus nombreux à embaucher cinq personnes ou plus au sein de leur entreprise. « Ils ne créent pas seulement des emplois pour eux-mêmes, mais aussi pour les autres », constate le professeur Schott.

Nombreux, mais méconnus

Le GEM estime que les gouverneme­nts et les médias doivent en faire plus pour faire connaître les bénéfices de l’entreprene­uriat chez les plus âgés et encourager cette avenue comme choix de fin de carrière.

Les auteurs proposent notamment de multiplier les ressources offertes aux entreprene­urs établis ou en devenir, comme des centres de réseautage et des cours spécialeme­nt adaptés à leurs besoins.

Au Canada, l’entreprene­uriat chez les 50 ans et plus n’est pas aussi soutenu et documenté que celui des plus jeunes. Une analyse publiée en 2012 par la banque CIBC soulignait pourtant que les 50 ans et plus détiennent près du tiers des entreprise­s en démarrage au pays et qu’ils constituen­t le groupe affichant la croissance la plus rapide.

Le manque d’informatio­n disponible sur le sujet a d’ailleurs incité l’Institut canadien d’éducation et de recherche en orientatio­n à financer au début du mois de juillet une nouvelle étude s’intéressan­t au profil, aux besoins et aux défis des entreprene­urs plus âgés. Un rapport faisant état des travaux menés par le Sheridan College devrait être publié au début de l’an prochain.

 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada