Le Devoir

Malin Gunnarsson Thunell, entre la Suède et le Québec

- YVES BERNARD

Malin Gunnarsson Thunell compose et chante les traditions de sa Suède natale. Elle y ajoute du répertoire de la Norvège, de l’Irlande et de l’Écosse, mais elle est également tombée amoureuse du Québec. En faisant des recherches sur le peintre français André Marchand, elle est tombée sur notre Charbonnie­r de l’enfer Michel Faubert. Depuis, elle se passionne pour la musique traditionn­elle québécoise.

Elle est venue une première fois au Québec il y a trois ans avec le groupe Kongero et la voici maintenant en résidence à Joliette. Elle se produit ce mercredi à l’Âtre, puis samedi sur la grande scène du festival Mémoire et Racines. En présentant son mélange avec ce qu’elle apprend ici.

«Durant tout le mois de juillet, je veux rencontrer le plus de gens possible, apprendre le plus possible, être une éponge, surtout avec les gens de Lanaudière. J’ai un cours avec Véronique Plasse, elle est mon lien, raconte Malin Gunnarsson Thunell. Ce que j’ai appris ici depuis mon arrivée? Beaucoup d’histoires, j’apprends les chansons, les turluttes, les complainte­s. Mon intérêt est de trouver des similarité­s entre les musiques traditionn­elles québécoise­s et suédoises.»

Qu’a-t-elle découvert? «Chez nous, on ne joue pas de reels, mais beaucoup de polka, et il y a des parentés entre les deux. C’est très possible pour moi de faire des danses suédoises sur de la musique du Québec. Il y a aussi le caractère sombre des histoires qui est commun aux deux. J’ai rencontré Michel Faubert et je sais qu’il a vu le film La source d’Ingmar Bergman, dont l’histoire est à peu près la même que celle de la chanson La fille du boulanger. Tu peux voir que les racines sont les mêmes.» Cette chanson médiévale raconte l’histoire d’une fille violée, assassinée et enterrée dans les bois.

Quoi d’autre? «Les mots et les phrases qui n’ont pas de sens et qui se répètent. Nous avons la même chose chez nous», répond l’artiste. Si, dans la musique traditionn­elle, elle s’intéresse à tous les aspects, le rythme retient davantage son attention et elle a créé tout un univers de percussion­s corporelle­s qui ne sont pas l’apanage des traditions de son pays. Elle se frappe les jambes avec les mains pendant qu’elle chante, se tape sur tout le corps et peut même faire la podorythmi­e avec une planche. Elle parvient aussi à turluter avec un charmant accent et à ajouter de son cru en laissant parfois traîner les notes.

«Ce que je pense de la podorythmi­e? C’est brillant, c’est un très bon complément aux chansons et ça ajoute au groove. En Suède, les gens tapent avec un rythme régulier. J’utilise donc la podorythmi­e pour créer des patrons syncopés.» Et la turlutte ? «La tradition suédoise de la turlutte n’est pas superforte, mais je pense que nous avons le même type de background qu’au Québec. Il fut un temps où l’Église n’aimait pas la musique traditionn­elle. Ils ont confisqué les violons et tous les instrument­s, mais les gens ont continué de s’exprimer. »

Dans les pièces de Malin Gunnarsson Thunell, on entend parfois de petits cris stridents qui relèvent du kulning, une technique vocale qui n’était pas à l’origine un type de chant, mais davantage

une forme de communicat­ion entre les gens avec des messages codés ou entre les gens et les animaux. « On appelait le bétail, c’était un travail de femmes. On en est venu à utiliser des cornes de vache avec des trous. C’est devenu une échelle naturelle qui a inspiré le kulning», explique la Suédoise. Quant au Québec, elle compte revenir et travailler avec des gens d’ici.

Newspapers in French

Newspapers from Canada