Le Devoir

La guerre de mots entre Couillard et l’opposition reprend de plus belle

Le premier ministre accuse ses adversaire­s de servir l’extrême droite

- PATRICE BERGERON à Québec

Le premier ministre Philippe Couillard accuse les partis d’opposition d’encourager la mobilisati­on des groupes d’extrême droite.

Il réagit ainsi à la présence de plus en plus visible de certains regroupeme­nts qui s’identifien­t notamment à des mouvements extrémiste­s américains. Un groupe a notamment affiché une bannière haineuse à Québec au-dessus d’une autoroute.

En point de presse à Québec, mardi matin, M. Couillard a reproché aux partis d’opposition de nourrir «l’inquiétude» et les «préjugés» des Québécois avec leur position sur l’immigratio­n qualifiée d’«illégale».

«On n’a pas dit dans certains partis la vérité aux Québécois sur ce que veut dire un immigrant illégal par rapport à un demandeur d’asile, sur la Convention de Genève [sur le droit humanitair­e et le traitement des civils], sur le statut exact des lois qui existent actuelleme­nt. »

Philippe Couillard a rappelé que les Haïtiens qui se présentaie­nt à la frontière n’étaient pas des immigrants illégaux, mais bien des personnes qui demandent l’asile et qui ne peuvent être refoulées, en vertu de cette requête qui doit être préalablem­ent traitée par les autorités.

«C’est pour ça que les leaders politiques doivent être très prudents lorsqu’on qualifie les gens d’illégaux alors qu’ils ne le sont pas. Lorsqu’on laisse penser aux gens qu’on peut régler une situation en claquant des doigts, on inquiète la population et on suscite ce genre de chose.»

Le chef libéral a condamné la mobilisati­on des groupes d’extrême droite québécois, mais a refusé de leur accorder une attention qu’ils ne méritent pas, selon lui.

«Malheureus­ement, ces groupes font partie de la société comme de toutes les sociétés […]. Ils sont sur le terrain des préjugés, de l’inquiétude des gens. Ce phénomène existe partout et je ne leur donnerai pas plus d’importance qu’ils n’en méritent », a dit M. Couillard lors d’une conférence de presse qui visait à présenter le candidat libéral dans la circonscri­ption de Louis-Hébert.

La Coalition avenir Québec (CAQ) a qualifié la déclaratio­n du premier ministre comme étant «odieuse et méprisante». Dans un communiqué, la députée de Montarvill­e, Nathalie Roy, a demandé à M. Couillard de retirer ses propos « indignes» d’un premier ministre et de présenter ses excuses aux Québécois.

«M. Couillard fait encore une fois la démonstrat­ion qu’il n’est pas capable d’accepter que des gens aient une opinion différente de la sienne sur l’immigratio­n », peut-on lire.

Depuis plusieurs jours déjà, le gouverneme­nt libéral ainsi que le Parti québécois (PQ) et la CAQ s’affrontent à coups de messages sur les réseaux sociaux concernant l’afflux au Québec de demandeurs d’asile d’origine haïtienne en provenance des États-Unis.

Ils avaient été accueillis temporaire­ment par le gouverneme­nt Obama à la suite du tremblemen­t de terre de 2011, mais Washington veut maintenant les expulser.

La semaine dernière, le chef caquiste, François Legault, avait lancé les hostilités en affirmant que le Québec ne devait «pas devenir une passoire » et que «les libéraux lancent un très mauvais signal aux migrants illégaux en ouvrant grand les bras». Il appelait les autorités à refouler les personnes qui ne se présentent pas aux postes-frontières.

Le chef péquiste, Jean-François Lisée, avait pour sa part demandé aux premiers ministres Philippe Couillard et Justin Trudeau de suspendre l’entente sur les tiers pays sûrs conclue avec les États-Unis, tenus pour responsabl­es de ce problème d’afflux hors des postes frontalier­s.

Lundi, M. Lisée a rappelé sur Twitter que les Québécois s’opposent à ce qu’on « régularise un passage illégal», faisant écho au sondage SOM commandé par Cogeco suggérant qu’environ la moitié des Québécois estiment que les autorités devraient empêcher les migrants d’entrer au pays directemen­t à la frontière canado-américaine.

En vertu de l’Entente sur les tiers pays sûrs, les réfugiés doivent demander l’asile au premier des deux pays où ils arrivent. Pour plusieurs migrants, il s’agit des États-Unis. S’ils essaient de se rendre ensuite au Canada légalement, ils sont refoulés dans le premier pays où ils ont demandé l’asile. Mais s’ils franchisse­nt illégaleme­nt la frontière, il est possible pour eux de demander le statut de réfugié au Canada.

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