Une nouvelle plateforme aide les utilisateurs professionnels
Market Minder encourage les pratiques que dénonce le Comité logement du Plateau Mont-Royal
Une nouvelle plateforme américaine permettant de «renforcer la professionnalisation» des hôtes Airbnb fait rager ceux qui dénoncent déjà la multiplication de l’offre d’hébergement à court terme dans les quartiers centraux de Montréal.
L’entreprise américaine AirDNA a lancé lundi un nouveau service nommé Market Minder, qui permet aux utilisateurs d’Airbnb d’avoir accès à différents indicateurs pour optimiser leur offre de location selon l’endroit où ils habitent.
«Cette solution permet aux gestionnaires de location d’hébergement touristique de prendre des décisions éclairées pour la détermination de prix, pour repérer des périodes de pointe dans la demande de location touristique et pour mieux comprendre le classement de leur propriété par rapport à la concurrence de taille et de prix similaires, souligne un communiqué publié mercredi par AirDNA, à l’intention du marché québécois. Les hôtes peuvent par conséquent rivaliser sur un même pied d’égalité que les dirigeants d’hôtels.»
La compagnie précise que la plateforme permet d’explorer les différents quartiers pour découvrir où les offres d’hébergement à court terme les plus rentables peuvent être ajoutées. Ce produit met fin au «vide informationnel» dans lequel les hôtes Airbnb exerçaient jusqu’à maintenant leurs activités, fait valoir son président-directeur général, Scott Shatford.
Outil de «marchandisation»
Selon Gabrielle Renaud, qui est organisatrice communautaire au sein du Comité logement du Plateau Mont-Royal, la plateforme lancée par AirDNA encourage les pratiques que son organisation dénonce depuis des années.
«C’est un outil qui est axé sur la marchandisation et la commercialisation des logements, ditelle. Ce n’est visiblement pas pour les familles qui veulent arrondir leurs fins de mois. C’est pour accroître les profits des personnes qui utilisent Airbnb pour en faire une business .»
Le Plateau Mont-Royal est l’un des quartiers de Montréal où la popularité d’Airbnb se fait le plus sentir. La croissance du nombre de logements offerts en location pour une courte durée effrite le parc locatif, en plus de déranger le voisinage, souligne Mme Renaud.
Depuis quelques mois, le Comité logement du Plateau Mont-Royal réclame donc carrément l’interdiction de l’hébergement touristique sur Airbnb et toutes les autres plateformes semblables. «Pour nous, le logement n’est pas une marchandise. C’est un besoin de base pour de nombreux locataires du Plateau et de l’ensemble de l’île de Montréal», insiste sa représentante.
Forte croissance à Montréal
La plateforme Market Minder contient des données détaillées, quartier par quartier, sur plus de 1000 destinations touristiques à travers le monde, y compris Montréal.
Mercredi, sur l’ensemble du territoire de la métropole, un peu plus de 14 370 offres de location étaient affichées par près de 7920 hôtes différents. Uniquement sur le Plateau Mont-Royal, on comptait 4372 offres, mises en ligne par près de 2500 hôtes.
Le site indique par ailleurs que la proportion d’hôtes «professionnels», c’est-à-dire ceux qui affichent plus d’une offre de location à la fois,
est de 56 % à travers la ville et de 53 % sur le Plateau Mont-Royal.
Ces chiffres semblent appuyer les conclusions d’une récente étude de l’Université McGill, qui révélaient que 10% des hôtes affichant des logements sur Airbnb accaparent une large majorité des revenus.
La compagnie californienne a cependant rejeté ce constat, accusant le chercheur David Wachsmuth et son équipe d’avoir manipulé les données pour assombrir le portrait. Selon Airbnb, la grande majorité des utilisateurs sont des familles de la classe moyenne qui tentent d’arrondir leurs fins de mois.
L’étude de M. Wachsmuth propose de limiter à une par hôte le nombre d’offres d’hébergement sur Airbnb et d’interdire la location à temps plein d’une habitation en entier.
Au Québec, les hôtes qui mettent un logement en location à court terme sur une « base régulière » doivent obtenir un permis, comme n’importe quel hôtel ou n’importe quelle auberge, mais le milieu hôtelier dénonce le manque d’inspecteurs pour faire respecter la réglementation entrée en vigueur en avril 2016.