Cinéma Tenir tête: le film d’animation La jeune fille sans mains
L’héroïne du film d’animation s’épanouit envers et contre tout
LA JEUNE FILLE SANS MAINS
Film d’animation de Sébastien Laudenbach. France, 2016, 73 minutes.
Cédée au diable par son avare de père, une jeune fille se révéla trop pure pour Lucifer. Ce dernier courroucé, les mains lui fit couper. Laissant son père à ses tourments et le Malin à ses vils plans, la jeune fille, privée de ses mains, s’en alla son chemin. Dans les jardins royaux elle s’établit, et y fit tout fleurir comme par magie. Dans le film de Sébastien Laudenbach La jeune fille sans mains, la lumière jaillit d’un grand chagrin.
À la fois fidèle à l’esprit du conte des frères Grimm, mais libre dans ses écarts et sa manière, ce long métrage d’animation, d’une infinie délicatesse, est à la fois récit initiatique et parcours émancipatoire. Laudenbach a considérablement enrichi la trame originelle, insufflant à l’ensemble un symbolisme envoûtant et rendant fondamentale une dénonciation du patriarcat qui n’était qu’accessoire à la source.
Simple dans sa facture, sublime dans son impact, le film de Sébastien Laudenbach déroule sur papier un trait quasi continu en une suite d’esquisses perpétuellement inachevées, à l’instar de ladite jeune fille; un trait qui charrie dans son sillage coloré autant de frémissements que de poésie.
Les silhouettes se forment, vivent puis se défont, donnant naissance à d’autres personnages, à d’autres paysages… La technique minimaliste rend compte d’une assurance admirable, tout en mettant en exergue la gravité des thèmes, de misogynie galopante en résilience triomphante.
Il y a quelque chose de viscéral qui se dégage du dessin, du mouvement. Le film prend au corps autant qu’au coeur. Comme l’héroïne, on n’en sort pas indemne, mais transformé. Grandi. V.O.F. : Cinémathèque québécoise.