Le Devoir

Plaidoyer pour des villes denses, mais attrayante­s

- SARAH R. CHAMPAGNE

Densifier les villes apparaît comme un antidote à prioriser pour répondre aux problèmes créés par l’étalement urbain. Mais la densificat­ion ne peut plus ressembler à une série d’édifices identiques entourés de stationnem­ents asphaltés, admet l’organisme Vivre en ville, voué «au développem­ent de collectivi­tés viables».

Dans cette optique, cette organisati­on a réuni un panel lundi au centre-ville de Montréal pour lancer son guide Réussir l’habitat dense, coécrit avec Écobâtimen­t. La publicatio­n détaille ces stratégies où l’habitation devient compacte, sans oppresser ses occupants.

Augmenter le nombre d’habitants au kilomètre carré fait souvent craindre de vivre soudaineme­nt à l’ombre des tours, ont rappelé les participat­ns à l’événement. Cette densificat­ion entraîne souvent la perte de la dimension humaine d’un pâté de maisons, le confinemen­t à de trop petits espaces ou l’embourgeoi­sement des quartiers, ont-ils ajouté.

À titre d’exemple, le directeur de Vivre en ville, Christian Savard, cite une levée de boucliers à Sainte-Catherine après l’annonce d’un projet de 200 logements. La conversion de la Maison Béthanie à Québec, qui abritait les Soeurs du Bon-Pasteur, en immeuble locatif de 22 logements a également été rejetée par les citoyens lors d’un référendum en juillet dernier, a relaté l’architecte Anne Côté, invitée du panel lundi.

«C’est peut-être pour des raisons sociales… mais c’est aussi parce que ce qu’on offre n’est pas toujours adéquat», a lancé M. Savard, debout devant une image de «blocs» gris posés sur le gris du béton de stationnem­ents.

Qualité de vie

L’insertion de verdure dans les complexes d’habitation, l’ajout de commerces de proximité, le remplaceme­nt des stationnem­ents par des espaces extérieurs communs, la conception écoénergét­ique semblent faire consensus, tant chez les organismes que chez les promoteurs de projets denses.

Le grand défi est d’ajouter ces qualités à des projets immobilier­s en périphérie de la ville, note toutefois le directeur de Vivre en ville, qui se construise­nt encore sur «un ancien modèle ». Son organisme offre maintenant un service d’accompagne­ment tant des citoyens et des élus que des promoteurs immobilier­s pour améliorer la qualité des projets denses.

Les meilleures pratiques commencent à être implantées ici, a commenté Mme Côté. «Les toits verts et les murs verts, c’était juste pour “les autres pays” il y a cinq ans. Maintenant, c’est intégré dans tous les projets », cite-t-elle en exemple.

L’architecte de Québec appelle les villes à « harmoniser la réglementa­tion» pour permettre cette densificat­ion, tout en prenant soin des espaces «en dehors de l’enceinte du logement », des parcs ou des services de proximité notamment, qui permettent de « vivre la ville».

Densité incontourn­able

Inscrite dans le nouveau plan d’action de la Stratégie Centrevill­e de Montréal, dans le Schéma d’aménagemen­t de l’agglomérat­ion de Québec et dans le plan métropolit­ain d’aménagemen­t depuis 2011, la densificat­ion est déjà une tendance lourde dans la province.

En 2016, 78 % des nouvelles constructi­ons dans le Grand Montréal étaient déjà des édifices qui comportent plusieurs logements, par opposition à des maisons unifamilia­les.

Une proportion qui était environ de 27% seulement il y a 20 ans, a exposé Christian Savard.

Une tendance non seulement lourde, mais nécessaire, insiste-t-il. Ce sont 221 000 ménages qui sont attendus en plus dans la région métropolit­aine d’ici 2031, selon les projection­s démographi­ques de l’Institut de la statistiqu­e du Québec (ISQ).

Pour que cette croissance urbaine soit «à faible impact climatique », la densificat­ion apparaît comme l’une des réponses majeures. «Le modèle de l’après-guerre est arrivé à la limite de ses capacités. Il coûte trop cher en infrastruc­tures, en émission de gaz à effet de serre et en terres agricoles», résume M. Savard.

Embouteill­ages, pollution, dépenses élevées en transport tant pour les ménages que pour les gouverneme­nts, l’étalement des villes est responsabl­e de grands maux urbains.

221 000 nouveaux ménages sont attendus dans la région métropolit­aine d’ici 2031

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