Le Devoir

Halte à la dérive !

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Un article publié récemment par l’IRIS nous apprenait que les cardiologu­es ont reçu une augmentati­on de leur rémunérati­on moyenne de 88 000 $ pour la seule année 2015-2016. Bien évidemment, une telle augmentati­on est surréalist­e. Le salaire des médecins devient disproport­ionné, autant par rapport aux salaires des autres citoyens que de la capacité de payer de ces mêmes citoyens.

Au-delà des augmentati­ons, l’article nous apprenait également que le coût de la rémunérati­on des 20 000 médecins québécois (généralist­es et spécialist­es confondus) équivalait aux budgets combinés de 13 ministères (dont ceux de la Justice, de l’Agricultur­e, de la Culture, des Relations internatio­nales et du Tourisme) et des budgets de fonctionne­ment de l’Assemblée nationale, du Vérificate­ur général, du Protecteur du citoyen, du Directeur général des élections, du Commissair­e au lobbyisme et du Commissair­e à l’éthique.

Cet état de fait donne la nausée, mais cela s’explique, les augmentati­ons faramineus­es ont été négociées par le docteur Gaétan Barrette, alors représenta­nt des médecins spécialist­es, et le docteur Philippe Couillard, alors ministre de la Santé. Il n’empêche que la situation est moralement indéfendab­le. Nous subissons depuis trop longtemps déjà les empiétemen­ts du privé dans les soins de santé, la multiplica­tion des cliniques privées, le traitement monarchiqu­e des médecins et l’affaibliss­ement généralisé du système public. Il s’agit pourtant, et avec raison, de l’une des grandes fiertés collective­s qui ont permis de faire avancer le Québec et d’assurer à chacun des conditions dignes dans la maladie et les adversités qui parsèment la vie.

Il est grand temps de penser à créer des états généraux en santé. Les citoyens n’ont plus le contrôle sur un des secteurs pourtant des plus importants, il faut le leur redonner. La mainmise gouverneme­ntale a permis une bureaucrat­isation outrancièr­e et une soumission à trop de lobbys dans ce secteur. Il y a urgence en la demeure. Autrement, c’est l’édifice entier qui est menacé d’être contaminé, ce qui semble être le projet de certains. Jean-François Lessard, enseignant en science politique à l’UQAM et en philosophi­e au cégep André-Laurendeau Le 25 août 2017

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