C’était le chaos, disent les pilotes
Les pilotes des avions d’Air Transat immobilisés à Ottawa affirment qu’ils auraient agi autrement s’ils avaient été informés du délai d’attente
Les commandants de bord des deux vols d’Air Transat coincés durant des heures à l’aéroport d’Ottawa en juillet auraient fait les choses autrement s’ils avaient su que le délai d’attente allait être aussi long, ont-ils affirmé lors de leur témoignage jeudi devant l’Office des transports du Canada (OTC).
«Avoir eu l’information que le délai aurait été de plus de trois heures, les décisions auraient été totalement différentes», a souligné le pilote du vol TS507, Yves Saint-Laurent.
Des centaines de passagers sont restés coincés dans deux avions d’Air Transat durant respectivement cinq et six heures, le 31 juillet. Des orages avaient forcé les vols en provenance du continent européen à se poser à Ottawa alors qu’ils devaient atterrir à Montréal.
«C’est une situation absolument exceptionnelle, sans précédent, qui d’ailleurs n’avait jamais été connue en 30 ans chez Air Transat», a insisté le président-directeur général du transporteur aérien, JeanFrançois Lemay, qui a témoigné à son tour en fin d’après-midi. Il a offert ses excuses aux passagers et a indiqué à plusieurs reprises qu’il ne tentait pas de rejeter le blâme sur qui que ce soit.
M. Lemay a fait état d’un « engrenage très complexe» qui s’est déroulé ce jour-là, tout en acceptant la responsabilité d’une part de l’incident.
Les pilotes et directeurs de ces vols d’Air Transat ont décrit une situation chaotique à l’aéroport d’Ottawa, qui a accueilli 20 vols ce jour-là en raison du mauvais temps.
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C’est une situation absolument exceptionnelle Jean-François Lemay, présidentdirecteur général d’Air Transat
L’un des appareils a manqué de carburant, si bien que la climatisation à l’intérieur de la cabine a cessé de fonctionner. Les appels de ravitaillement du pilote à First Air, une entreprise qui fournit des services au sol aux transporteurs aériens, sont demeurés vains durant des heures.
Selon le témoignage des trois employés de First Air, personne n’avait été avisé qu’il était urgent que les avions obtiennent ce carburant.
Le délai de ravitaillement des deux avions ne cessait de s’allonger. L’un des pilotes a vu un avion d’Air Canada obtenir du carburant même s’il était arrivé après le sien. Le ravitaillement dans les aéroports se fait généralement selon la règle du premier arrivé, premier servi.
Faire débarquer les quelque 300 passagers de l’avion aurait pris entre cinq et six heures, selon Yves Saint-Laurent, puisqu’il aurait fallu leur faire passer la douane, leur trouver des chambres d’hôtel et noliser des autobus pour les y conduire.
«Une forme de torture»
L’avion était également coincé sur une voie de circulation entre d’autres appareils, ce qui l’empêchait d’avancer. Il était impossible de commander de la nourriture puisqu’il n’y avait aucun escalier pour accéder à la cabine, a précisé la directrice du vol, Julie Clermont.
Sept passagers ont décrit lors de la première journée d’audience, mercredi, la situation tendue à l’intérieur des avions ce jour-là, l’un d’entre eux allant même jusqu’à comparer le fait de ne pouvoir sortir de l’appareil à une forme de torture.
Le président-directeur général d’Air Transat a indiqué aux commissaires de l’OTC que les divers acteurs de l’industrie de l’aviation — Nav Canada, les aéroports, les entreprises de manutention, de carburant et les transporteurs — devraient se réunir pour mieux prévoir la durée d’un délai en cas de déroutement.
Son témoignage a conclu les deux jours d’audiences de l’OTC. Le tribunal administratif doit déterminer si le transporteur aérien a respecté ses obligations envers ses passagers. Air Transat et l’aéroport d’Ottawa avaient tous les deux rejeté le blâme sur l’autre au lendemain de l’incident.
Air Transat est favorable à la charte des droits des voyageurs que le gouvernement Trudeau veut adopter, mais souhaite qu’on tienne compte de «la dépendance des compagnies aériennes envers les autres acteurs de l’industrie ».
Ce projet de loi précisera les droits des passagers en cas de délais sur le tarmac, a rappelé le président de l’OTC, Scott Streiner, avant de mettre fin aux audiences.