Le Devoir

L’ouragan Harvey fait bondir le prix de l’essence, sous les craintes de pénuries ponctuelle­s

- GÉRARD BÉRUBÉ

Les prix de l’essence s’envolaient jeudi sur les marchés à terme de New York. Avec le quart de la capacité de raffinage à l’arrêt depuis le passage de Harvey, des oléoducs doivent fermer, faute d’approvisio­nnement. La spéculatio­n carbure aux craintes de pénuries ponctuelle­s.

Le prix du gallon d’essence a accéléré sa progressio­n jeudi sur le marché new-yorkais des denrées. La hausse a été de 13,5%, à près de 2,14$US le gallon. Le bond des cours des contrats à terme est chiffré à 30% depuis vendredi. Par ricochet, le scénario de pénurie et l’autorisati­on des autorités américaine­s donnée à des raffinerie­s de puiser dans les réserves stratégiqu­es ont permis au cours du pétrole d’inverser son mouvement baissier. La qualité de référence du West Texas Intermedia­te (WTI) gagnait 1,27$US le baril, à 47,23$US.

L’annonce de la suspension de l’activité d’oléoducs transporta­nt des produits raffinés depuis le Texas vers le nord et l’est du pays, faute de suffisamme­nt d’essence pour remplir les tuyaux, a «déclenché une réaction très forte sur l’ensemble des marchés de produits pétroliers», a observé John Kilduff d’Again Capital. Ainsi, deux importants oléoducs partant du Texas ont dû ralentir leur activité: l’oléoduc Explorer, qui monte jusqu’au centre-nord du pays, et surtout l’oléoduc Colonial, qui achemine du carburant sur la côte nord-est. À l’approche de la longue fin de semaine, «on va sûrement voir des pénuries à certains endroits dans l’est des ÉtatsUnis, dans de grandes villes alimentées habituelle­ment par l’oléoduc Colonial, comme Atlanta, Knoxville ou Nashville», pouvait-on lire dans un texte de l’Agence France-Presse.

Les investisse­urs continuent par ailleurs de tenter d’évaluer à quel moment les raffinerie­s affectées par le passage d’Harvey sur les côtes du golfe du Mexique pourront reprendre une activité normale. L’opération d’évaluation des dégâts et des réparation­s pourrait prendre jusqu’à deux semaines, selon certaines informatio­ns. Les raffinerie­s fermées à ce jour revendique­nt le quart des capacités du pays. À titre de comparaiso­n, la côte texane abrite près d’un tiers des capacités de raffinage de pétrole des États-Unis.

Au Québec les prix à la pompe sont demeurés à un niveau élevé jeudi, après avoir fait un saut de 10¢ le litre. Ainsi à Montréal, le prix moyen se situait à 1,257¢ le litre. Il était à 1,155¢ à Québec. «Avec l’ALENA, nous sommes dans un marché très ouvert. Quand un coin est touché, c’est tout le continent qui est affecté», rappelle Carol Montreuil, viceprésid­ent pour l’est du Canada de l’Associatio­n canadienne des carburants.

«La situation ne s’améliore pas. Les raffinerie­s touchées ne sont pas sur le point de reprendre leurs activités. Et n’oublions pas que leurs employés sont également personnell­ement touchés » par la catastroph­e. Le spécialist­e ajoute que si la lecture n’est pas positive, l’état du marché affichait des inventaire­s «confortabl­es» avant que l’ouragan ne frappe le Texas. Avec une perte évaluée à 5 ou 6 millions de barils depuis le début de la tempête, «les inventaire­s sont en baisse pour revenir

à des niveaux normaux», dit-il. Jeudi, le départemen­t américain de l’Énergie soulignait d’ailleurs que le niveau des réserves d’essence dans la zone sud-est du pays «est actuelleme­nt au niveau ou au-dessus de la moyenne des cinq dernières années».

«Nous sommes encore dans une zone confortabl­e, et rien n’indique une pénurie de produits. Mais le problème est l’acheminent », souligne Carol Montreuil. À ses yeux, la pression haussière sur les prix semble vouloir persister, exacerbée par l’action de la spéculatio­n. Quant au risque que la pénurie appréhendé­e déborde au Québec, il rappelle que le marché québécois compte deux raffinerie­s qui s’approvisio­nnent à l’internatio­nal, dans le bassin de l’Atlantique.

 ?? CHARLIE RIEDEL ASSOCIATED PRESS ?? Le prix du gallon d’essence a accéléré sa progressio­n jeudi sur le marché new-yorkais des denrées.
CHARLIE RIEDEL ASSOCIATED PRESS Le prix du gallon d’essence a accéléré sa progressio­n jeudi sur le marché new-yorkais des denrées.

Newspapers in French

Newspapers from Canada