Le Devoir

Les voyageurs, ces balles de ping-pong.

- ISABELLE PARÉ

D«Les voyageurs victimes de retards, d’annulation­s ou de surréserva­tions doivent se référer au tarif de chaque compagnie aérienne pour savoir quels sont leurs recours Annick Bélanger-Krams, avocate et analyste chez Option consommate­urs

es passagers qui s’estiment «traités comme du bétail » ou plongés «dans un cauchemar »… C’est loin d’être le genre d’image qui traverse l’esprit des voyageurs qui ont payé des centaines — ou des milliers — de dollars pour s’envoler vers des paradis tropicaux ou d’exotiques destinatio­ns. C’est la brutale réalité qu’ont vécue les passagers des vols d’Air Transat en partance de Rome et de Bruxelles, restés coincés plus de cinq heures sur le tarmac de l’aéroport d’Ottawa le 31 juillet dernier.

Une aventure extrême, soit, mais qui a de quoi faire réfléchir sur les possibles dérapages qui guettent les voyageurs, de plus en plus nombreux à prendre la voie des airs pour de petites ou de longues vacances.

Au Canada, les voyageurs doivent monter seuls aux barricades pour obtenir un dédommagem­ent d’une compagnie aérienne quand survient un gros pépin, explique Annick Bélanger-Krams, avocate et analyste chez Option consommate­urs. « Contrairem­ent à ce qui se passe en Europe ou aux États-Unis, les voyageurs victimes de retards, d’annulation­s ou de surréserva­tions doivent se référer au tarif [contrat] de chaque compagnie aérienne pour savoir quels sont leurs recours. Aucune règle uniforme ne s’applique.» Ces règles, qui figurent parfois en caractères lilliputie­ns au bas des contrats, sont rarement connues des voyageurs au moment d’imprimer leur carte d’embarqueme­nt.

Aux États-Unis, les lois sont claires. En cas de surréserva­tion de tout vol décollant en sol américain, un voyageur retardé de moins de deux heures peut avoir droit à une indemnité allant jusqu’à 650$US (ou 200 % du billet à l’aller) et jusqu’à 1300$US (400% du prix de l’aller simple) après deux heures, ou quatre heures pour un vol internatio­nal.

En Europe, les indemnités prévues en cas de vols annulés, surréservé­s ou retardés de plus de trois heures peuvent atteindre, selon la distance, entre 250euros et 400euros pour les vols interconti­nentaux, et entre 250euros et 600euros pour les vols internatio­naux.

Pourtant, nombreux sont les voyageurs qui l’ignorent, et la multiplica­tion des intermédia­ires (agences, grossistes en billets d’avion, compagnies à bas prix et partenaire­s) transforme toute réclamatio­n en une course à obstacles.

À qui la faute?

En juillet dernier, Marika Patoto et une quinzaine d’amies, atterries tôt en matinée à Barcelone, ont eu la surprise de se voir refuser l’accès à leur vol de transfert vers Séville. Leurs billets, dont elles avaient en main la confirmati­on d’achat, ne figuraient pas dans le système, arguait le transporte­ur à bas prix Vueling. Plus encore, la compagnie les dirige vers le transporte­ur Iberia, chargé d’assurer ce vol intérieur avec l’un de ses appareils. À bout de nerfs, ballottées d’un comptoir à l’autre pendant plus de sept heures, elles haussent le ton! Les vols vers Séville sont complets, on leur offrira in extremis de prendre un vol pour Malaga, situé à plus de 200 kilomètres de Séville, et de faire le reste à bord de minibus. Un joli trajet de deux heures et quart. «On est arrivées à destinatio­n à 5 h du matin, épuisées et en colère. On n’avait rien mangé. L’agence, Iberia, Vueling : personne n’a voulu prendre le blâme. On était des balles de ping-pong!» déplore-t-elle.

Chose certaine, avise Me Bélanger-Krams, pour être dédommagé, un voyageur doit s’empresser de formuler une plainte écrite à la compagnie et à l’Office des transports du Canada (OTC). Au Québec, si un service (billet, hôtel, voiture, etc.) a été acheté par le biais d’une agence de voyages, il est possible, si le service n’a pas été rendu, de faire une réclamatio­n dans les 30 jours au Fonds d’indemnisat­ion des clients des agences de voyages.

Dans le cas de pertes ou de dommages de bagages, la Convention de Montréal (qui s’applique au Canada) prévoit jusqu’à 2000$ de dédommagem­ents, mais la réclamatio­n doit être faite dans les 21 jours. Pour des bagages endommagés, la réclamatio­n doit être faite avant même de quitter l’aéroport.

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