Le Devoir

La lutte pour l’alphabétis­ation, une priorité pour le ministre de l’Éducation

Le ministre de l’Éducation, Sébastien Proulx, a fait de l’alphabétis­ation l’un des piliers de la Politique sur la réussite éducative, présentée en juin dernier. Les orientatio­ns et les objectifs sont bien définis, mais les solutions concrètes viendront pl

- JESSICA NADEAU

« La stratégie sur l’alphabétis­ation, c’est un domaine où il y a plus de choses à faire qu’ailleurs», lance d’emblée le ministre en entrevue au Devoir. «On a même eu de la difficulté — j’en étais le premier surpris — à trouver des données et à avoir des informatio­ns pour nous permettre d’aller rapidement de l’avant, mis à part les données que nous avons de l’Institut de la statistiqu­e ou de l’enquête internatio­nale [Programme pour l’évaluation internatio­nale des compétence­s

pour adultes (PEICA)]. Ça n’a pas été une priorité gouverneme­ntale assumée ou édictée de faire en sorte que l’État travaille à documenter ce sujet-là. »

En 2011-2012, lors de la dernière enquête internatio­nale, à peine 47% des adultes du Québec présentaie­nt un niveau de compétence élevé en littératie. Le ministre souhaite donc augmenter de cinq points de pourcentag­e la part de la population qui démontre des compétence­s élevées lors du prochain exercice en 2022.

Éveil à la littératie

Les questions de littératie et d’alphabétis­ation reviennent à plusieurs reprises dans la Politique sur la réussite éducative. Et pour cause. «La littératie et la numératie sont les assisses de toutes les trajectoir­es éducatives», peut-on lire dans le document qui fait environ 80 pages.

Sébastien Proulx, qui est également ministre de la Famille, souhaite développer ces compétence­s dès la petite enfance. Ainsi, il a déjà annoncé que le programme dans les maternelle 4 ans et maternelle 5 ans serait revu pour qu’on ne parle plus de «reconnaiss­ance » des lettres, mais bien de « connaissan­ce ».

Dès cet automne, des projets d’éveil à la littératie verront le jour dans les services de garde. Des initiative­s d’éveil à la littératie familiale seront également implantées dans les maisons de la famille. Des trousses et autres projets de littératie devraient être offerts sous peu dans les bibliothèq­ues publiques. Car si le développem­ent des compétence­s est essentiel pour les jeunes enfants, il l’est tout autant pour leurs parents, croit le ministre. «Chez les adultes, l’analphabét­isme ou le fait d’avoir de faibles compétence­s en littératie et en numératie est un problème qui se répercute non seulement sur le présent et sur l’avenir de la personne, mais aussi sur le développem­ent et la réussite scolaire de ses propres enfants. Le faible niveau de scolarité des parents, particuliè­rement celui de la mère, peut rendre plus difficiles l’engagement parental et le soutien à l’enfant, et augmenter

les risques d’abandon scolaire chez les élèves», précise le ministre dans sa politique sur la réussite éducative.

En entrevue, le ministre de l’Éducation, qui est également père de deux enfants d’âge scolaire, revient sur l’importance de l’apprentiss­age de l’écriture et de la lecture le plus tôt possible. «Ça doit devenir un élément phare de notre démarche éducative parce qu’il n’y a pas longtemps, les gens qui avaient des difficulté­s en lecture et en écriture étaient des gens qui n’avaient pas été scolarisés. Ça appartient à une autre époque et, aujourd’hui, les gens avec des difficulté­s sont des gens qui sont passés à travers un parcours éducatif. Alors, il faut se poser de sérieuses questions sur la façon dont les choses opèrent et sur nos résultats à terme.»

Éducation populaire

Répondant d’avance aux critiques, Sébastien Proulx affirme que d’autres ministères seront impliqués dans la future stratégie en matière d’alphabétis­ation. Il dit être déjà en lien, dans le cadre de la Politique sur la réussite éducative et des travaux qui en découlent, avec le ministère de la Santé et des Services sociaux, de même qu’avec ses collègues de l’Éducation supérieure et de l’Emploi.

« Lorsqu’il a été question du projet de loi 70 [sur la réforme de l’aide sociale] de mon collègue [ministre de l’Emploi] François Blais, je suis tout de suite intervenu pour discuter avec lui à l’égard des formations que les gens pourraient avoir dans le cadre d’organismes d’alphabétis­ation », explique le ministre. «Je pense que l’éducation populaire, c’est nécessaire, ajoute-t-il. Ça existe, ça fait partie du modèle qu’on a mis en place dans les années 1960 lorsqu’on a créé le ministère de l’Éducation. On a reconnu à l’éducation populaire, en dehors de l’école, une mission et une valeur ajoutée. Alors, ce sont des discussion­s que nous avons avec eux.»

Enveloppe de 20 millions

Bien avant la présentati­on de sa Politique sur la réussite éducative et de la stratégie sur l’alphabétis­ation, qui en découlera, le ministre a octroyé une enveloppe de 20 millions en décembre dernier pour soutenir les organismes communauta­ires, les commission­s scolaires et les entreprise­s qui luttent contre l’analphabét­isme.

Sébastien Proulx répète qu’il fait de la lutte contre l’analphabét­isme un « sujet d’intérêt personnel» dont il faut parler davantage. «Chaque fois que je me présente sur une tribune, je parle d’alphabétis­ation parce que c’est l’une des raisons pour lesquelles je fais de la politique.»

Sébastien Proulx affirme que d’autres ministères seront impliqués dans la future stratégie en matière d’alphabétis­ation

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Sébastien Proulx

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