Le Devoir

Une triste farce

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Les déboires de la présidente de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse du Québec, Tamara Thermitus, et l’intention de tenir à huis clos les consultati­ons sur la discrimina­tion systémique et le racisme ont achevé la crédibilit­é de cet exercice périlleux. Visée par trois plaintes pour abus d’autorité, mauvaise gestion et manque de respect envers le personnel à peine six mois après son entrée en fonction, Mme Thermitus n’a pas la crédibilit­é exigée pour s’attaquer à ce dossier miné.

N’eût été la pression du gouverneme­nt Couillard, la Commission n’aurait sans doute pas envisagé de sonder le coeur des Québécois de tous horizons. La perméabili­té de l’organisme face aux calculs électorali­stes du gouverneme­nt (lui-même poussé dans le dos par une résolution des jeunes libéraux) n’est pas de nature à rassurer quant à l’indépendan­ce de cette consultati­on. Et la transparen­ce n’y est pas. La Commission veut sous-traiter son jugement à une vingtaine d’OBNL (pour le moment inconnus), qui doivent mener des consultati­ons cet automne. Les témoignage­s seront recueillis à l’insu du public et des médias. C’est là un autre écueil. Comment le public pourra-t-il accepter les recommanda­tions à venir s’il est tenu dans l’ignorance des travaux ?

Aussi bien mettre un terme à cette triste farce. Quoi qu’il advienne, le rapport sera torpillé par la CAQ et le PQ, qui prévoient un procès en discrimina­tion systémique des Québécois. Le premier ministre Philippe Couillard a déjà commencé celui de JeanFranço­is Lisée, en l’accusant injustemen­t de «négationni­sme».

Cela dit, il ne faudrait surtout pas que le débat sur le racisme et la discrimina­tion systémique soit frappé d’un tabou au Québec. Ces questions font partie intrinsèqu­e du mandat de la Commission. Son rapport de 2008 (La diversité: une valeur ajoutée) est d’ailleurs riche de propositio­ns qui n’ont pas toutes été suivies. Tout est dans la manière. Une politique de lutte contre le racisme et la discrimina­tion doit reposer sur des données fiables et mesurées, et non sur des états d’âme livrés derrière des portes closes. Par ailleurs, la Commission ferait mieux de se distancier des joutes politiques du moment dans la poursuite de sa mission. Il en va de sa crédibilit­é.

Même s’ils demeurent des phénomènes marginaux, le racisme et la discrimina­tion sont bien réels au Québec, et ils freinent l’élan des groupes minoritair­es ou racisés qui en font les frais, entre autres dans l’accès à l’emploi et au logement, et dans leurs rapports avec les autorités publiques.

Les solutions à ces problèmes sont connues depuis belle lurette. Il suffit de les mettre en applicatio­n.

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BRIAN MYLES

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