Le Devoir

Départ du chef de cabinet de Couillard

Le directeur des communicat­ions quitte lui aussi son poste

- MARIE-MICHÈLE SIOUI Correspond­ante parlementa­ire à Québec

Cap sur 2018. Sous le prétexte avoué de donner un nouvel élan à sa formation politique, le premier ministre Philippe Couillard a annoncé mardi le départ de son chef de cabinet et fidèle ami depuis l’adolescenc­e, Jean-Louis Dufresne.

Jean-Pascal Bernier, collaborat­eur de la première heure du premier ministre depuis son retour en politique active, il y a cinq ans, accède au poste stratégiqu­e et devient le premier conseiller de Philippe Couillard.

«J’ai décidé de confier cette importante responsabi­lité à M. Bernier parce qu’il a toujours démontré une grande capacité à gérer des situations complexes», a déclaré le premier ministre dans un communiqué.

Le directeur des communicat­ions et porte-parole du premier ministre, Harold Fortin, a lui aussi été muté vers de nouvelles fonctions. Il devient responsabl­e des relations avec les autres provinces, des relations internatio­nales et des relations avec les États-Unis, en vertu d’une décision qui aurait été prise il y a quelques semaines. Les relations internatio­nales incombaien­t auparavant‐à Johanne Whitthom, qui a été nommée sous ministre adjointe au ministère des Relations internatio­nales et de la Francophon­ie la semaine dernière. Les relations avec les États-Unis relevaient quant à elles de Jean-Louis Dufresne.

Ce dernier, un ami du premier ministre depuis l’adolescenc­e, s’est joint à l’équipe de Philippe Couillard après la course à la direction du Parti libéral du Québec (PLQ), en 2013. Il avait auparavant travaillé dans l’entourage de Robert

Bourassa et de Daniel Johnson, à titre de conseiller exécutif. «M. Dufresne quitte ses fonctions, mais il ne fait aucun doute que notre amitié des 45 dernières années se poursuivra», a d’ailleurs souligné le premier ministre dans le communiqué annonçant le départ de son chef de cabinet.

Le principal intéressé n’a pas répondu aux demandes d’entrevues du Devoir.

Couillard montré du doigt

En coulisse, les troupes libérales ont refusé d’associer le départ de Jean-Louis Dufresne à la déconfitur­e d’Éric Tétrault, candidat démissionn­aire du PLQ dans Louis-Hébert en raison d’allégation­s passées de harcèlemen­t psychologi­que. Les proches du premier ministre ont plutôt évoqué une « transforma­tion » au sein du parti, à un peu plus d’un an des élections.

Les ministres libéraux se réunissent ce matin, mercredi, à Val-d’Or. L’ensemble du caucus libéral a ensuite rendez-vous dans cette ville abitibienn­e, dès jeudi. Ils doivent être informés du plan de match du PLQ en vue de l’élection d’octobre 2018.

En dépit du désir des libéraux de tourner la page sur la controvers­e causée par le passage d’Éric Tétrault, les partis de l’opposition n’ont pas manqué de souligner que la candidatur­e du protégé du ministre Pierre Moreau avait, en définitive, été approuvée par le premier ministre luimême, tel que le prévoient les statuts du PLQ.

«Le responsabl­e ultime, c’est le chef. […] M. Couillard, parfois, ne semble pas avoir de bons réflexes. Il ne peut pas blâmer son directeur de cabinet ou son personnel pour [ça] », a déclaré le chef de la Coalition avenir Québec, François Legault, en point de presse. « On ne connaît pas les vraies raisons [du départ de Jean-Louis Dufresne]. Moi, je n’en connais pas plus que vous, a-t-il aussi souligné. C’est une bonne décision, compte tenu des liens qu’avait M. Dufresne avec certaines personnes.»

Le député du Parti québécois Pascal Bérubé a lui aussi reproché à Jean-Louis Dufresne de s’être placé «dans certaines situations» ou d’avoir pris «certaines décisions», sans toutefois préciser lesquelles. «Ce n’était pas prématuré», a-t-il dit au sujet de la décision du premier ministre. À son avis, la nomination de Jean-Louis Dufresne, comme son maintien en poste, était « contestabl­e ».

Le député solidaire Amir Khadir a exigé des « explicatio­ns » du premier ministre. « Le bilan en matière d’éthique du duo Couillard-Dufresne est tellement loin de la note de passage qu’il faut juste espérer que sa démission ne cache pas d’autres pratiques politiques douteuses », a-t-il déclaré.

Sur la défensive depuis des mois

Jean-Louis Dufresne s’est retrouvé sur la défensive à quelques reprises au cours des derniers mois en raison de ses contacts avec l’ancien collecteur de fonds libéral Marc Bibeau, ciblé par une enquête de l’Unité permanente anticorrup­tion. En avril dernier, un reportage de TVA l’avait forcé à révéler qu’il avait entretenu une relation d’affaires avec l’ex-argentier, en 2011. Jean-Louis Dufresne était alors vice-président principal de la firme de relations publiques BCP Consultant­s.

Le rapport de la commission Charbonnea­u a aussi retenu une partie du témoignage de l’entreprene­ur Paul Sauvé concernant des gestes qu’aurait posés Jean-Louis Dufresne en 2003, pendant qu’il était chez BCP Consultant­s. Paul Sauvé reprochait à Jean-Louis Dufresne de l’avoir encouragé en 2003 à «être plus actif» dans les cocktails de financemen­t du PLQ, dans un contexte où l’entreprene­ur cherchait à obtenir une subvention gouverneme­ntale pour des travaux de maçonnerie. Les libéraux ont toujours vigoureuse­ment démenti les allégation­s de Paul Sauvé. Cela dit, rien n’a été fourni à la commission Charbonnea­u, par le biais de mises en cause, pour invalider son témoignage.

Un jeune chef de cabinet

Le nouveau chef de cabinet de Philippe Couillard, Jean-Pascal Bernier, était jusqu’ici le chef de cabinet adjoint du premier ministre. Il était responsabl­e du contenu lors de la campagne à la chefferie de Philippe Couillard, en 2012-2013. À 38 ans, il a déjà été attaché de presse et chef de cabinet de la ministre Michelle Courchesne. Il gravite dans l’entourage libéral depuis 2003. Il entre officielle­ment en poste le 18 septembre.

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