Le Devoir

Coup de barre réclamé dans l’industrie de la publicité

L’agence GLO lance un manifeste pour instaurer de nouvelles règles d’éthique

- KARL RETTINO-PARAZELLI

Une nouvelle agence montréalai­se lancera ce mercredi un manifeste pour lutter contre le manque d’éthique et de transparen­ce au sein de l’industrie québécoise de la publicité, dont les effets seraient sentis par les annonceurs, mais aussi par les consommate­urs.

Jonathan Nicolas, l’un des cofondateu­rs de l’agence de publicité GLO, dévoilera le Manifeste pour une nouvelle éthique en publicité numérique lors d’un événement réunissant plusieurs acteurs de l’industrie montréalai­se. Son intention est claire, il veut brasser la cage.

«Je crois qu’on a besoin d’un coup de barre. Il faut rehausser les standards et adopter de nouveaux principes qui sont plus solides d’un point de vue éthique », explique-t-il en entrevue.

Pratiques dénoncées

L’industrie nord-américaine de la publicité est secouée depuis des mois par des rapports, commandés par des annonceurs du Canada et des États-Unis, qui dénoncent des conflits d’intérêts, des méthodes de rémunérati­on controvers­ées et des pratiques d’affaires douteuses.

Le principal problème allégué concerne la facturatio­n: les agences parviennen­t à réaliser des campagnes de publicité de manière plus efficace et moins coûteuse en automatisa­nt certaines opérations, mais les annonceurs ne sont pas toujours en mesure de savoir comment leur argent est dépensé, note M. Nicolas.

Un concession­naire automobile qui ferait affaire avec une agence pour réaliser une campagne publicitai­re pourrait par exemple connaître le coût total du contrat sans savoir quelle proportion du montant payé a véritablem­ent servi à acheter de l’espace médiatique, ou si l’agence a obtenu une commission en faisant affaire avec une compagnie externe.

Interpellé­es au sujet de ce genre de pratiques en début d’année par le média spécialisé américain Business Insider, les principale­s agences de publicité actives aux États-Unis, dont le groupe Publicis, qui a un bureau à Montréal, ont cependant rejeté les allégation­s des annonceurs.

Effets sur les consommate­urs

C’est en réaction à ces pratiques d’affaires jugées opaques que Jonathan Nicolas a fondé l’agence GLO. À son avis, le manque de transparen­ce de l’industrie de la publicité a des impacts sur les annonceurs, qui peuvent dans certains cas payer davantage que la valeur du service qu’ils reçoivent. Et si les annonceurs paient plus cher, on peut déduire qu’ils refilent

ensuite la facture aux consommate­urs, dit-il, sans toutefois pouvoir chiffrer ce phénomène.

Les premiers énoncés du manifeste qui sera présenté mercredi visent donc une rémunérati­on «transparen­te, claire et justifiée». Le document proscrit la facturatio­n de toute marge de profit non dévoilée, il souligne que les agences ne devraient pas obtenir une commission en faisant affaire avec une tierce partie et il indique que la rémunérati­on des agences devrait s’appuyer sur le nombre d’heures requises et travaillée­s, plutôt que sur un pourcentag­e de l’investisse­ment total des annonceurs.

Avec ses collègues, Jonathan Nicolas espère que les principes mis sur papier dans le manifeste encourager­ont plusieurs agences à revoir leurs pratiques. «Ce n’est pas une démarche qu’on veut entreprend­re en solitaires. Nous sommes tout à fait conscients que le lancement de ce manifeste va animer le débat. Selon les réactions, on pourra ajouter des principes, mais je pense que la direction est très claire», dit-il.

«On souhaite que d’autres acteurs de l’industrie s’approprien­t le manifeste, le fassent évoluer et rassurent les annonceurs sur leur manière à eux de faire des affaires», ajoute-t-il.

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Jonathan Nicolas

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