Le Devoir

Changement de ton et de style

Couillard entreprend­ra la « transforma­tion » du Québec sans son vieil ami

- MARCO BÉLAIR-CIRINO à Val-d’Or

Le premier ministre, Philippe Couillard, a un vaste programme d’ici les prochaines élections générales: effectuer la « transforma­tion économique et sociale» du Québec.

«Le monde change à une vitesse folle. Il faut qu’on soit, nous autres également, en changement. Il faut qu’on soit en avant du changement ! » a lancé le premier ministre après la visite des installati­ons de Technologi­e Élément PSW à Val-d’Or mercredi après-midi.

Aux côtés d’un robot soudeur, le chef de gouverneme­nt — pour qui l’essai The Fourth Revolution: The Global Race to Reinvent the State constitue une source d’inspiratio­n — a notamment dit miser sur la diffusion de l’innovation «dans nos régions» afin d’inciter les «jeunes entreprene­urs [à y] demeurer ».

À titre de directeur de cabinet, Jean-Louis Dufresne a « très, très bien accompli » la « restaurati­on » et la «rénovation» du Québec en assainissa­nt les finances publiques et en relançant l’activité économique au cours des trois dernières années et demie, a répété M. Couillard dans un impromptu de presse.

M. Dufresne n’entreprend­ra pas pour autant la « transforma­tion » du Québec — que M. Couillard décrit comme la «seconde phase» dans la vie de son gouverneme­nt. « Juste pour marquer le changement», il se départ de son conseiller numéro un et ami de longue date. À l’approche des prochaines élections générales, le gouverneme­nt libéral doit adopter un «style» et un « rythme » différents, a-t-il convenu. «Le message est simple: il faut parler au monde. Il faut écouter les besoins réels des citoyens. Il faut y répondre. On peut maintenant le faire parce qu’on s’est donné les moyens de le faire. […] On aura un beau projet pour le Québec en 2018 […] qui va s’appuyer sur le fait de vivre mieux, vivre de façon plus simple également, quand on a affaire avec l’État notamment. »

M. Dufresne demeurera en fonction jusqu’à vendredi. Il a d’ailleurs pris part mercredi à la séance du Conseil des ministres à l’hôtel Forestel de Val-d’Or, où tous les élus libéraux se réuniront jeudi et vendredi afin de préparer leur retour à l’Assemblée nationale, mardi prochain. Jean-Pascal Bernier, 38 ans, lui succédera officielle­ment lundi prochain.

Malaise dans le camp libéral

M. Couillard a cherché toute la journée à dissiper l’impression que le caucus avait eu la peau de M. Dufresne — qualifié de «raide», de « carré » par plus d’un élu libéral. « Avez-vous déjà connu un chef de cabinet de premier ministre qui fait l’unanimité dans un caucus ? a-t-il demandé aux journalist­es agglutinés autour de lui. C’est une des positions les plus difficiles qui existent en politique: on est toujours entre l’arbre et l’écorce. »

Le chef du gouverneme­nt s’est aussi lavé du reproche de ne pas prêter suffisamme­nt attention aux préoccupat­ions des députés libéraux, qui ne font pas partie du Conseil des ministres. «Je suis très près de mon caucus. Je n’arrête pas de me promener avec eux [les élus libéraux] en région», a-t-il lancé, soulignant du même souffle la «relation excellente» entre les élus libéraux et lui. Il en a donné pour preuve « tous » les projets parrainés par ses députés qui voient le jour aux quatre coins du Québec.

M. Couillard a néanmoins réitéré mercredi sa volonté de «donner plus de place» aux jeunes au sein de son équipe ministérie­lle, et ce, tout en éloignant la perspectiv­e d’un remaniemen­t ministérie­l. «C’est le temps de donner un peu de souffle nouveau, mais on va le voir dans quelques semaines, dans quelques mois, […] pas aujourd’hui », a-t-il spécifié à la presse.

Le malaise envahissai­t l’hôtel Forestel avant le coup d’envoi de la séance du Conseil des ministres mercredi matin.

D’ailleurs, plusieurs ministres ont esquivé les questions des journalist­es sur le départ de M. Dufresne, de son adjointe, Johanne Whittom, ainsi que du directeur des communicat­ions, Harold Fortin. Tous préféraien­t plutôt se réjouir publiqueme­nt de la vitalité de l’économie québécoise, ne faisant pas de cas de la croissance des revenus des ménages québécois parmi les plus faibles au Canada. «Moi, je suis ici pour vous parler d’économie. On va continuer à vous parler d’économie», a répété comme un mantra le ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles, Pierre Arcand.

«Force est d’admettre, lorsqu’on a un regard objectif, qu’on devrait d’une part dire: “Bon, il y a peut-être des [problèmes], mais aussi des éléments qui vont bien”», a affirmé le leader parlementa­ire, Jean-Marc Fournier, tout en soulignant la nature ingrate de la fonction de directeur de cabinet du chef du gouverneme­nt québécois. «Ce n’est pas un travail très facile. […] C’est sept jours sur sept. C’est pratiqueme­nt 24 heures sur 24. Je ne veux pas vous faire pleurer…»

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