Le Devoir

Au tour de Facebook de miser sur Montréal

- KARL RETTINO-PARAZELLI

La prochaine grande innovation technologi­que du réseau social le plus populaire au monde pourrait naître à Montréal. Suivant les traces de Google et de Microsoft, Facebook a choisi la métropole québécoise pour accélérer la recherche en intelligen­ce artificiel­le, y annonçant vendredi l’ouverture d’un nouveau laboratoir­e.

« Nous nous établisson­s à Montréal à cause de l’écosystème, a déclaré vendredi l’expert scientifiq­ue en chef de Facebook en intelligen­ce artificiel­le, Yann LeCun. Nous nous établisson­s dans les endroits où nous sentons que le secteur prend son envol, et nous le voyons ici. »

Le nouveau laboratoir­e montréalai­s s’ajoute aux trois laboratoir­es du réseau FAIR, pour «Facebook Artificial Intelligen­ce Research», qui se trouvent à Menlo Park en Californie, à New York et à Paris. Il sera dirigé par Joëlle Pineau, une spécialist­e de l’intelligen­ce artificiel­le (IA) qui codirige actuelleme­nt le Laboratoir­e d’apprentiss­age et de raisonneme­nt de l’Université McGill. Elle partagera son temps en parts égales entre l’établissem­ent d’enseigneme­nt et le laboratoir­e de Facebook.

30 chercheurs

Le laboratoir­e montréalai­s, qui est situé dans un endroit non révélé, à proximité du Centre Bell, devrait compter dix chercheurs d’ici la fin du mois et une trentaine dans un an, comme c’est le cas des autres groupes de recherche FAIR.

Les premiers effectifs seront recrutés localement, mais les suivants pourraient provenir de l’étranger, note Mme Pineau. «C’est certain que notre recherche pour le talent se fait partout.»

Les chercheurs du laboratoir­e se consacrero­nt à la recherche fondamenta­le sur l’intelligen­ce artificiel­le, en accordant une importance particuliè­re à l’interactio­n entre les humains et les robots. Si l’occasion se présente, ils pourront partager leurs trouvaille­s avec d’autres chercheurs de Facebook consacrés à la recherche appliquée, lesquels se chargeraie­nt ensuite de développer des applicatio­ns utiles au réseau social.

Facebook a par ailleurs annoncé vendredi qu’elle investira 7 millions de dollars dans l’écosystème montréalai­s de l’intelligen­ce artificiel­le au cours des prochaines années. L’engagement de l’entreprise à Montréal s’ajoute à ceux de Google, qui a créé un groupe de recherche sur l’IA en 2016, et de Microsoft, qui a mis la main sur l’entreprise en démarrage Maluuba. Les deux compagnies ont également annoncé l’octroi de fonds

pour soutenir la recherche en intelligen­ce artificiel­le à Montréal de manière plus générale.

Rester à Montréal

«Lorsque des géants de l’industrie comme Facebook décident de s’installer dans nos villes, leur présence témoigne non seulement du talent de calibre mondial des gens de chez nous, mais également de notre énorme potentiel de croissance», a affirmé vendredi le premier ministre Justin Trudeau, présent lors de l’annonce du nouveau laboratoir­e.

À son tour sur scène, la professeur­e Pineau s’est rappelée ses collègues américains qui ont mis en doute son choix de s’établir à Montréal à la fin de ses études doctorales à Pittsburgh, en 2004. Ils ne croyaient pas que la métropole québécoise pourrait un jour lui permettre de s’épanouir comme chercheuse, mais ils se sont visiblemen­t trompés.

«J’ai plusieurs collègues du MILA [l’Institut des algorithme­s d’apprentiss­age de Montréal]

qui ont fait le même choix que moi, avec le résultat qu’on voit aujourd’hui. Avec le soutien des université­s, des institutio­ns gouverneme­ntales, du milieu industriel, on a été capables de bâtir un écosystème qui fait de nous un chef de file en recherche en intelligen­ce artificiel­le, s’est-elle réjouie. J’espère que certains des étudiants qui sont ici aujourd’hui vont trouver des opportunit­és qui correspond­ent à leurs besoins, à leurs talents, et qui vont leur donner une raison de rester à Montréal.»

Machines «stupides»

Le nouveau laboratoir­e montréalai­s de Facebook en intelligen­ce artificiel­le pourrait par exemple se consacrer à la recherche sur le filtrage automatiqu­e des recommanda­tions de contenus ou encore sur la reconnaiss­ance du langage naturel par les assistants virtuels, explique M. LeCun.

«Pour l’instant, ces systèmes sont très stupides. On voudrait bien essayer de trouver des moyens de rendre les discussion­s avec des machines beaucoup moins frustrante­s qu’elles le sont à l’heure actuelle», dit-il.

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