Questions sans réponses
CONTE À RENDRE (UN INTERROGATOIRE) Maîtrise d’oeuvre: Jean Asselin, Réal Bossé et Sylvie Moreau. Une production d’Omnibus. À Espace libre jusqu’au 23 septembre.
Les trois codirecteurs de la compagnie Omnibus signent une cinquième création collective en autant d’années. Intitulée Conte à rendre (un interrogatoire), la «maîtrise d’oeuvre» de Jean Asselin, Réal Bossé et Sylvie Moreau est une étrange méditation sur les thèmes de la responsabilité, de l’imputabilité et du libre arbitre, mais peutêtre plus encore sur la notion de transmission.
Sur une petite scène cernée de spectateurs, un espace sans murs dont l’exiguïté est censée évoquer celle d’une salle d’interrogatoire, Alice (Andréanne Théberge) répond aux questions d’un psychologue (Charles Préfontaine) chargé d’évaluer sa santé mentale. C’est que, pour protéger une victime d’agression, la jeune femme a malencontreusement tué un homme en lui assénant derrière la tête un coup de vieux poêlon en fonte. Tout ce qui préoccupe Alice, à part retrouver sa liberté, c’est de récupérer ce que les autorités considèrent comme l’arme du crime, le fameux ustensile, un objet précieux à ses yeux parce que légué par sa grand-mère.
Le spectacle comporte trois trames, trois espaces-temps, trois registres pour le moins contrastés dont l’agencement est loin de convaincre. Ainsi, on passe abruptement des interrogatoires, plutôt réalistes, pour ne pas dire plats, aux scènes d’apprentissage, souvenirs d’une enfance rurale, des moments plus oniriques, chantés et chorégraphiés, où apparaît le père de l’héroïne (Jean Asselin). Le troisième niveau est celui de l’attachante grandmère, dont on entend la voix (celle de Sylvie Moreau) sur bande sonore, mais dont on regrette l’absence en chair et en os.
L’objet parvient en plus ou moins une heure à susciter l’ennui. La partition physique est sans grand relief, le propos est plutôt mince et on s’explique mal, au-delà de la joliesse, le recours aux chansons de Luis Mariano, Jean Ferrat et Pauline Julien. À vrai dire, la représentation, bancale, fragmentée, alourdie par les fondus au noir, ne transcende guère l’exercice de style. Les discours et les esthétiques sont juxtaposés, emboîtés, mais jamais ils ne dialoguent vraiment. En fin de compte, les créateurs semblent aussi prisonniers de leur concept que les interprètes le sont du plateau.