Le Devoir

L’engagement de la CSN

Après des années de luttes syndicales dans un climat d’austérité, en 2018, la Confédérat­ion des syndicats nationaux (CSN) compte déployer des efforts considérab­les pour faire avancer des causes, développer de nouveaux concepts et, pourquoi pas, se renouve

- MARIE-HÉLÈNE ALARIE Collaborat­ion spéciale

En de juinla CSN. dernier De se nombreuses­tenait l’important propositio­ns congrèsy ont été C’est adoptéesle signeet un que plan les de luttes travail syndicales­a été développé. viennentqu­itté l’époquede franchirde la lutteune nouvelleco­ntre l’austérité,étape. «On pas a parcemais parce qu’on que ne le ressent gouverneme­ntplus les effetsse trouve des maintenant coupes, dans une conjonctur­e politique et économique plutôt favorable avec un taux de chômage très bas », déclare Jacques Létourneau, président de la CSN. On recommence même à voir de nouvelles embauches dans le secteur public. «Il faut dire que le gouverneme­nt avait tellement coupé qu’il est maintenant obligé d’embaucher, alors que, dans certaines régions, c’est quasiment le plein emploi. »

Pour les prochaines années, le phénomène soulève la difficile question du déficit démographi­que lié à la main-d’oeuvre, un défi que devront relever tant les syndicats que les gouverneme­nts. Dans le contexte, Jacques Létourneau s’explique mal l’ampleur du débat qui a cours actuelleme­nt au Québec autour de l’immigratio­n: «On sait très bien qu’au Québec, dans les prochaines années, si on n’ouvre pas les frontières, on va avoir deux ou trois problèmes, et pas seulement pour des emplois généraux, mais pour des emplois de technicien­s et de profession­nels», lance-t-il spontanéme­nt.

Le président revient sur la conjonctur­e actuelle et les finances publiques. Il souhaitera­it des réinvestis­sements massifs en éducation, en santé et dans les infrastruc­tures. Pourtant, ce qu’on observe actuelleme­nt, c’est une certaine lenteur à

réaliser ces réinvestis­sements: «Ce gouverneme­nt est arrivé à l’équilibre budgétaire assez rapidement et c’est à coups de milliards de dollars qu’il transfère ses surplus au Fonds des génération­s. Depuis des années nous disons que, oui, c’est important d’équilibrer les finances publiques, mais qu’il faut aussi investir dans les programmes et dans les services », affirme-t-il. Il faudrait que le Québec soit capable de se sortir de la logique des agences de notation. «Le gouverneme­nt prétend toujours que c’est la décote qui nous menace. On est à la solde de cette logique alors que, dans les faits, on veut un gouverneme­nt responsabl­e, capable de mettre son pied à terre et dire, oui, on fait du ménage dans les finances publiques, mais ce n’est pas vrai qu’on va appauvrir et frapper les plus démunis. C’est un enjeu pour le mouvement syndical.»

Une année électorale

Le 65e congrès de la CSN de juin dernier a accouché d’un manifeste intitulé Voir loin, viser

juste. Ambitieuse, cette déclaratio­n demande la sécurité du revenu tout au long de la vie, le développem­ent de l’économie et d’emplois de qualité, le contrôle des services publics, la lutte contre les changement­s climatique­s et le renforceme­nt de la démocratie. Dans une année électorale, publier un tel manifeste n’est pas un geste anodin. La CSN est une organisati­on syndicale qui ne fait pas de politique partisane, précise M. Létourneau: «On ne dit pas à nos membres comment voter… Mais on fait tout le reste!»

À l’arrivée du printemps, la Centrale souhaite s’activer un peu plus sur le terrain pour se préparer aux élections en octobre.

La carte du territoire québécois est diversifié­e et chaque groupe, chaque région a des enjeux qui lui sont propres. «On veut proposer aux

travailleu­rs d’aller interpelle­r les candidats de tous les partis sur un enjeu bien précis qui reflète leur réalité », explique Jacques Létourneau. Que ce soit les travailleu­rs de la SAQ qui s’inquiètent d’un dérèglemen­t ou d’une privatisat­ion ou encore ceux du secteur manufactur­ier qui sont préoccupés par les conséquenc­es de la renégociat­ion de l’ALENA… La CSN demandera donc à chaque syndicat de recenser les priorités de leur secteur: «On veut partir du terrain, avec les demandes des gens. C’est ce qu’on veut porter dans le cadre de la campagne électorale et on veut travailler sur une base régionale et on veut le faire simplement», déclare le président. Les nombreux mandats

Si la Centrale s’intéresse de près à la politique, ce n’est qu’une partie de son mandat. L’automne ramènera une intensific­ation de certaines négociatio­ns de contrat de travail, entre autres dans le secteur ambulancie­r, avec les agents correction­nels du fédéral et dans les centres de la petite enfance.

Depuis quelque temps déjà, la CSN travaille avec les syndicats du secteur privé; commerce, vente au détail, manufactur­ier et les finances. Cet automne se tiendra un colloque sur le numérique, un enjeu syndical important. Encore aujourd’hui, ce secteur est imperméabl­e à la syndicalis­ation. Jacques Létourneau donne l’exemple de l’industrie du jeu vidéo, un secteur difficile à syndiquer de façon traditionn­elle: « On se dit qu’on devrait peut-être permettre une certaine couverture. À une époque, on appelait ça des décrets de convention collective. » Cette loi, aujourd’hui abandonnée, permettait au gouverneme­nt de décréter qu’une convention collective relative à un métier, à une industrie, à un commerce ou à une profession lie également tous les salariés et tous les employeurs profession­nels du Québec.

L’autre sujet qui préoccupe actuelleme­nt de nombreuses organisati­ons syndicales et qui est amené par la CSN est la question des agences de placement. «On est la seule province canadienne qui n’a pas encore de loi sur le sujet, relève le président. Avec les agences de placement, on est parfois dans une dynamique qui frise l’esclavage où l’on emploie des gens sans même savoir s’ils ont des permis de travail alors s’ils se blessent au travail… Le premier ministre a promis d’agir sur le sujet, on va suivre ça de près.»

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ISTOCK Pour Jacques Létourneau, l’industrie du jeu vidéo est difficile à syndiquer de façon traditionn­elle.
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Jacques Létourneau

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