Le Devoir

Concert de critiques contre le projet de règlement sur les forages pétroliers

- ALEXANDRE SHIELDS Avec Dave Noël

Le projet de règlement qui autorisera les forages pétroliers près de secteurs résidentie­ls, de garderies et d’aires protégées, mais aussi dans les lacs et les rivières, a suscité un concert de critiques jeudi. Le gouverneme­nt Couillard a répondu qu’il sera à l’écoute des « commentair­es » sur ce document, qui ne ferme pas la porte aux forages avec fracturati­on sous les zones habitées, a constaté Le Devoir.

Les partis d’opposition, mais aussi les groupes environnem­entaux, les syndicats et le monde municipal ont vivement dénoncé les projets de règlements élaborés par le gouverneme­nt libéral, dans la foulée de l’adoption de la première Loi sur les hydrocarbu­res de l’histoire du Québec.

Le président de la Fédération québécoise des municipali­tés (FQM), Richard Lehoux, est convaincu que cette réglementa­tion conduira à une «absence totale d’acceptabil­ité sociale» pour les projets pétroliers et gaziers.

Selon lui, les distances entre les forages et les secteurs résidentie­ls sont tout simplement «insuffisan­tes». Le projet de règlement du gouverneme­nt prévoit une distance minimale de 175 mètres entre les forages et les zones habitées, et de 275 mètres par rapport aux écoles, aux garderies et aux hôpitaux.

La FQM, qui représente plus de 900 municipali­tés, critique aussi la volonté des libéraux d’autoriser la fracturati­on. Et selon les précisions fournies au Devoir par le ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles, la future réglementa­tion n’interdit pas les forages horizontau­x sous les secteurs habités, les cours d’eau, les aires protégées et les parcs nationaux. Le projet précise seulement des distances séparatric­es pour la tête des puits de forage.

Il n’y a pas d’épidémie de projets David Heurtel, ministre de l’Environnem­ent du Québec

Pour une « transition énergétiqu­e »

Dans une sortie publique commune jeudi, des groupes environnem­entaux et citoyens, mais aussi les grandes centrales syndicales, ont exigé rien de moins que le «retrait» pur et simple des projets de règlements, qui totalisent 269 pages de documents très techniques.

«Déjà que l’État québécois manque de personnel pour assurer le respect des lois et règlements censés protéger l’environnem­ent, voilà que ce gouverneme­nt propose des règles invraisemb­lables pour livrer notre territoire à l’exploratio­n et à l’exploitati­on des hydrocarbu­res », a fait valoir le président général du Syndicat de la fonction publique et parapubliq­ue du Québec, Christian Daigle.

Les groupes ont d’ailleurs rappelé la vive opposition à la nouvelle Loi sur les hydrocarbu­res, qui oblige notamment les municipali­tés à cohabiter avec les permis d’exploratio­n déjà concédés au fil des ans, essentiell­ement entre 2006 et 2010, sous le gouverneme­nt de Jean Charest. Ils ont du même coup plaidé pour un abandon des projets pétroliers et gaziers au Québec, mais aussi pour une «transition énergétiqu­e».

Un message repris par Québec solidaire, mais aussi par le Parti québécois. Selon le député Sylvain Gaudreault, le ministre David Heurtel, qui a dû défendre la position du gouverneme­nt jeudi, semble avoir «honte» des projets de règlements développés par le ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles.

Encadremen­t «très sévère»

M. Heurtel a répondu jeudi que ce cadre réglementa­ire développé depuis plusieurs mois n’est qu’un «projet de règlement». «Il ne faut pas sauter aux conclusion­s ». a-t-il dit. «Je comprends l’inquiétude», a ajouté le ministre, avant d’affirmer que «le gouverneme­nt va tenir compte des commentair­es».

«Il y a une période de consultati­ons qui s’amorce. Je crois qu’il va y avoir beaucoup de réactions et beaucoup de commentair­es», a reconnu M. Heurtel. Cette période est d’une durée de 45 jours, après quoi le gouverneme­nt pourra édicter la nouvelle réglementa­tion.

«Nous encadrons de façon très sévère et très rigoureuse» les projets d’hydrocarbu­re, a également affirmé M. Heurtel, en précisant que les éventuels projets d’exploitati­on seraient soumis à un examen du Bureau d’audiences publiques sur l’environnem­ent (BAPE). « Il n’y a aucun projet de fracturati­on en cours au Québec. Et je crois qu’il y a cinq ou six projets d’hydrocarbu­re au Québec. Il n’y a pas d’épidémie de projets.»

Concrèteme­nt, il existe plusieurs dizaines de permis d’exploratio­n en vigueur au Québec, pour une superficie totale de 53 225 km2. Et si des projets d’exploitati­on sont lancés, ils pourraient être actifs pendant plus de 50 ans, selon ce que précise le projet de règlement du gouverneme­nt.

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ALEXANDRE SHIELDS LE DEVOIR Québec veut autoriser les forages près des secteurs résidentie­ls, notamment à Gaspé, où Pétrolia développe le projet Haldimand.

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