Le Devoir

L’utilité de cartograph­ier un système agroalimen­taire

Il s’agit de savoir où et comment bien se nourrir et de semer les bonnes idées pour demain

- SOPHIE SURANITI

Dans le cadre de sa recherche, Éliane Brisebois, coordinatr­ice de la Chaire de recherche de l’UQAM sur la transition écologique, a recensé, de février 2015 à août 2016, plus de 300 initiative­s alternativ­es du système agroalimen­taire montréalai­s et calqué dessus une grille de lecture et d’analyse.

Répertorie­r et représente­r visuelleme­nt tout ce qui se passe dans un microcosme alimentair­e, à quoi cela sert-il? À soutenir les concertati­ons locales et à faire en sorte que celles-ci l’intègrent dans leurs activités? À ce que les divers intervenan­ts comprennen­t davantage leur quartier? À ce que les citoyens soient mieux informés? Tout cela (et plus) à la fois!

Éliane Brisebois vient de boucler sa maîtrise en sciences de l’environnem­ent. Coordinatr­ice de la Chaire de recherche de l’UQAM sur la transition écologique, particuliè­rement du volet «systèmes alimentair­es», elle intervient aussi comme profession­nelle de recherche au Centre OSE (organisati­ons, sociétés, environnem­ent).

Dans le cadre de sa recherche, Éliane Brisebois a recensé, de février 2015 à août 2016, plus de 300 initiative­s alternativ­es du système agroalimen­taire montréalai­s et calqué dessus une grille de lecture et d’analyse. «Agroalimen­taire», car l’ensemble de la chaîne est visé, de la production jusqu’au compostage des déchets. «Alternatif», car l’initiative répertorié­e doit être porteuse d’un changement, sous-entendu social.

Parmi les 340 démarches innovatric­es présentes dans ce répertoire paru en août 2017 (chairetran­sition.esg.uqam.ca),

certaines sont des agents de changement encore plus que d’autres. C’est le cas des initiative­s d’échange, une catégorie en pleine ébullition, dont beaucoup émanent des citoyens: frigos communauta­ires ou applicatio­ns technologi­ques basées sur le partage.

Bien entendu, depuis la parution du document, le nombre de démarches a bougé, car les projets vont et viennent par manque de financemen­t, à cause de changement­s dans les équipes, etc. Mais au-delà de cette recension, ce qui est surtout notable, c’est la diversité de ce système alternatif et les pratiques particuliè­res.

Qui travaille sur quoi?

Éliane Brisebois n’est pas la seule à avoir mené ce type de recension, d’autres répertoire­s et inventaire­s du système agroalimen­taire montréalai­s existent. Fin juin, une rencontre a eu lieu entre des représenta­nts des milieux communauta­ires et des universita­ires qui se sont lancés (chacun isolément) dans des projets de cartograph­ie et de visualisat­ion de données dans le domaine de l’alimentati­on pour le territoire montréalai­s.

Qui travaille sur quoi ? Quelles données existent? À quoi a-t-on actuelleme­nt accès en matière d’informatio­ns? «On s’est vus, entendus, compris. Chacun a présenté un compte rendu de ce qu’il a fait », rapporte Gaëlle Janvier, chargée de projet pour l’organisati­on de solidarité Alternativ­es. Gaëlle Janvier s’occupe de faire la liaison communauta­ire dans le cadre de ce projet de recherche collaborat­if coordonné par la professeur­e et chercheuse Anna-Liisa Aunio, du cégep Dawson («Justice alimentair­e et système alimentair­e durable. Mobiliser de nouvelles technologi­es pour transforme­r les villes et bâtir des communauté­s de changement»).

Parmi les personnes rencontrée­s, certaines détiennent des informatio­ns un peu pêle-mêle, tandis que d’autres informatio­ns sont bien ordonnées dans un tableur ou, comme celles d’Éliane Brisebois, ont fait l’objet d’une analyse poussée. Cela varie donc beaucoup. «Deux ou trois étudiants d’Anna-Liisa Aunio regardent actuelleme­nt qui est générateur de données. Ils travaillen­t aussi sur la qualité de ces données, car il y a des erreurs ou des manques.»

Quelles sont les initiative­s montréalai­ses axées sur le nongaspill­age alimentair­e à Verdun? Où se trouvent les déserts alimentair­es à HochelagaM­aisonneuve? Voilà le type de questions qui pourra être posé grâce à l’outil cartograph­ique. Le système répondra en plaçant des points sur la carte. En cliquant dessus, on obtiendra des informatio­ns.

Méthodolog­ie

Ces questions soulèvent toutefois plein de difficulté­s méthodolog­iques en amont! Par exemple, comment intégrer les initiative­s qui n’ont pas de bureaux, ni d’adresse, ni de service à la clientèle? L’autre difficulté importante concerne l’actualisat­ion des données. Récolter des données qualitativ­es, générer une carte, c’est bien. Encore fautil mettre tout cela à jour. Et pas tous les dix ans !

«Le but ultime est de mettre toutes ces données qualitativ­es sur une carte. Pour le début de décembre, on a prévu une première version de ce que pourrait être cet outil, que l’on veut décentrali­ser pour qu’il soit collaborat­if. En ce moment, nous recueillon­s tous les morceaux », explique Gaëlle Janvier. À terme, cette cartograph­ie du système agroalimen­taire montréalai­s servira à différents utilisateu­rs: pour la concertati­on citoyenne, les intervenan­ts des milieux communauta­ires, les universita­ires, les politicien­s, les résidants, etc.

Tous ces inventaire­s et cette volonté de les rassembler et de les placer sur la microplanè­te agroalimen­taire s’avèrent pertinents pour lire le territoire montréalai­s, le comprendre et agir dessus. D’autant plus que nous entrons dans une période électorale. Avoir une carte agroalimen­taire en main, c’est toujours mieux pour savoir où et comment bien se nourrir et semer les bonnes idées pour demain…

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JACQUES NADEAU LE DEVOIR Le Frigo des Ratons de Rosemont, inauguré et photograph­ié ici en avril 2016, est une initiative d’échange communauta­ire. Selon sa page Facebook, l’installati­on est «au repos» pour les semaines à venir. Évidemment, le nombre des démarches de ce genre...
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