Le Devoir

À la défense d’un BAPE indépendan­t

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Àla mi-septembre, on a pu prendre connaissan­ce du décret instaurant un nouveau processus de sélection des membres du Bureau d’audiences publiques sur l’environnem­ent (BAPE). Le ministre David Heurtel avait promis de dépolitise­r ces nomination­s. Or le gouverneme­nt continue d’exercer un contrôle régalien sur les nomination­s au BAPE. Jusqu’à maintenant, le Conseil des ministres avait la main haute sur les nomination­s au BAPE. Avec le décret émanant du Conseil exécutif, le gouverneme­nt Couillard s’assure que ce pouvoir reste intouché. Le règlement crée un comité de sélection en vue de la nomination du président, du vice-président et des autres membres du BAPE. Il doit fournir deux noms par poste à pourvoir au ministre de l’Environnem­ent, qui recommande les candidats à nommer par le Conseil des ministres. Si le ministre n’est pas satisfait des candidats proposés, il peut ordonner la reprise le processus.

Le comité de sélection est contrôlé par le gouverneme­nt. Il est composé de trois membres, soit deux personnes issues de ses rangs et un représenta­nt du public. Comme les décisions sont prises à la majorité, le gouverneme­nt ne prend aucun risque : c’est sa volonté qui primera.

Le BAPE est un empêcheur de tourner en rond, et pour bien des ministres, promoteurs et fonctionna­ires, un enquiquine­ur de première. De tout temps, les gouverneme­nts successifs y ont nommé des fonctionna­ires de confiance ou des gens dont l’allégeance partisane les comblait. Malgré tout, le BAPE, qui détient les pouvoirs d’une commission d’enquête, est parvenu à maintenir la rigueur nécessaire à l’accompliss­ement de sa mission et, de là, une certaine indépendan­ce.

Rappelons que le gouverneme­nt n’est pas tenu de se plier aux exigences du BAPE; il peut passer outre ses avis, qui ne sont que consultati­fs. C’est dans l’ordre des choses. Il en découle qu’il aurait tort de chercher à miner son indépendan­ce et à réduire la portée de ses évaluation­s. Le BAPE, dont le rôle est de produire des analyses indépendan­tes sur des projets de développem­ent d’importance, doit continuer de tenir compte de toutes leurs dimensions : écologique, économique, sociale et culturelle.

Le nouveau comité a le mérite d’ajouter une forme de profession­nalisme au processus de sélection des membres du BAPE. Mais il ne dépolitise pas ces nomination­s. Le mieux serait que la nomination du président et du vice-président de l’organisme relève de l’Assemblée nationale, comme le réclame l’opposition, ce qui nécessiter­ait un changement à la loi. Entre-temps, le ministre Heurtel pourrait consentir à consulter les députés d’en face.

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ROBERT DUTRISAC

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