ALENA : désaccord en vue concernant le droit du travail
Les États-Unis déposent une proposition qui serait moins ambitieuse que celle du Canada
Les États-Unis se sont officiellement prononcés mardi sur le droit du travail dans le cadre de la renégociation de l’Accord de libreéchange nord-américain (ALENA) en soumettant une proposition jugée insuffisante et beaucoup moins ambitieuse que celle du Canada, selon des syndicats de travailleurs canadiens.
Le directeur des affaires publiques de Teamsters Canada, Christopher Monette, a indiqué mardi après-midi que la division américaine de son syndicat avait pu prendre connaissance de la position des États-Unis. Les Teamsters la jugent «inadéquate».
Sans entrer dans le détail, M. Monette a affirmé que les Américains sont essentiellement revenus à la charge avec la proposition qu’ils avaient présentée dans le cadre de la négociation du Partenariat transpacifique, un accord mis sur la glace depuis.
«La proposition canadienne va beaucoup plus loin», a-t-il souligné, précisant que le Mexique n’a pas encore déposé la sienne.
Se retirer au besoin
«Je suis convaincu que la position du Canada au sujet du travail est la bonne, parce qu’elle tient compte des inégalités qu’on observe actuellement », a pour sa part déclaré Jerry Dias, le président du syndicat Unifor.
«Je sais que l’équipe de négociateurs canadiens a assez de courage pour se retirer si l’accord n’est pas revu [au sujet du droit du travail], parce qu’ils ont déjà vu les effets négatifs sur l’économie canadienne », a-t-il ajouté, faisant référence aux usines de l’industrie automobile délocalisées au Mexique.
Actuellement, l’ALENA tient compte des droits du travail, mais seulement dans un accord parallèle. Le Canada souhaite insérer «de solides mécanismes de protection relatifs au travail au coeur même de l’accord».
Lundi, la ministre canadienne des Affaires étrangères, Chrystia Freeland, a soutenu que la position du Canada en matière de droit du travail propose «les normes du travail les plus progressistes et les plus robustes jamais présentées par des négociateurs commerciaux canadiens ».
M. Dias a par ailleurs noté que les enjeux les plus litigieux de la renégociation de l’ALENA, comme les règles d’origine dans le secteur automobile ou le chapitre 19, qui encadre le mécanisme de règlement des différends liés aux droits antidumping et compensateurs, n’ont pas encore été abordés.
Peu de détails
Ni la ministre Freeland ni le négociateur en chef du Canada, Steve Verheul, n’ont pris la parole publiquement mardi pour faire le point sur les échanges, à la veille de la dernière journée de la troisième ronde de négociation.
Mardi soir, la ministre Chrystia Freeland a reçu le secrétaire mexicain de l’Économie, Ildefonso Guajardo Villarreal, et le représentant au Commerce des États-Unis, Robert Lighthizer, pour un souper de travail.
Plus tôt en journée, à Ottawa, le député néodémocrate Pierre Nantel a utilisé cette rencontre pour ramener la question de l’exception culturelle sur le tapis. Le fait que la réception ait lieu au Centre national des arts d’Ottawa est symbolique, a-til
noté, mais il ne faudrait pas que le gouvernement Trudeau s’arrête là.
« En choisissant ce lieu, la ministre dit vouloir démontrer l’importance de l’exception culturelle dans l’accord, a-t-il affirmé lors de la période des questions. Bravo, mais j’espère sincèrement que ce geste n’est pas qu’un autre acte symbolique, parce que tous les signataires de la coalition pancanadienne du manifeste pour la culture sont, eux, inquiets. »
«La protection de l’exception culturelle est une priorité pour notre gouvernement, a répondu la ministre du Patrimoine canadien, Mélanie Joly. Nous continuons à travailler à l’échelle nationale et internationale, afin de préserver la diversité culturelle à l’ère numérique.»
Dernière journée à Ottawa
La cinquième et dernière journée de la ronde de négociation organisée à Ottawa depuis samedi s’annonce chargée. Mercredi, des réunions bilatérales sont prévues en matinée entre les représentants canadiens et ceux des États-Unis et du Mexique.
Une rencontre réunissant les trois pays aura lieu à midi et sera suivie d’une déclaration commune en après-midi.
Mais au rythme où avancent les discussions, il ne faut pas s’attendre à une entente sous peu, estime M. Dias, d’Unifor. Selon lui, il est «pratiquement impossible» qu’un accord soit conclu au début de 2018, comme le souhaitent les États signataires.