Le Devoir

Le ciel deviendra beaucoup plus turbulent

Les perturbati­ons atmosphéri­ques sont appelées à être deux ou trois fois plus nombreuses, selon une étude réalisée en Grande-Bretagne

- PAULINE GRAVEL

Les changement­s climatique­s risquent fort d’accroître et d’intensifie­r la turbulence dans la haute atmosphère, là où circulent les avions de ligne, prédit une étude britanniqu­e qui se base sur les augmentati­ons de CO2 prévues dans le scénario établi par le Groupe d’experts intergouve­rnemental sur l’évolution du climat (GIEC).

À partir de simulation­s effectuées à l’aide de modèles climatique­s, Paul Williams, chercheur au Départemen­t de météorolog­ie de l’Université Reading en Grande-Bretagne, et ses collègues ont observé que les changement­s climatique­s devraient entraîner de fortes augmentati­ons de la turbulence atmosphéri­que tout autour du globe entre 2050 et 2080, à l’altitude où se trouvent les couloirs aériens les plus achalandés.

La turbulence atmosphéri­que est responsabl­e de 24%

des accidents liés à la météo survenant en avion. Les pilotes ne peuvent souvent pas l’éviter parce qu’elle est invisible et indétectab­le par les senseurs et radars à bord de l’avion puisqu’elle survient dans des régions de l’atmosphère dépourvues de nuages et d’activité orageuse, soulignent les auteurs de l’étude, dont les résultats sont publiés aujourd’hui dans Geophysica­l Research Letters. Ces résultats indiquent que la quantité de turbulence d’intensités modérées à fortes pourrait doubler, voire tripler, été comme hiver, et ce, particuliè­rement à l’altitude de croisière typique de 12km plutôt qu’à celle de 10km. Les turbulence­s les plus fortes qui mettent en présence des forces plus puissantes que celle de la gravité pouvant projeter les personnes et les bagages de part et d’autre de la cabine de l’avion pourraient augmenter de 181% au-dessus de l’Atlantique Nord, de 161% au-dessus de l’Europe, de 112 % au-dessus de l’Amérique du Nord et de 92% au-dessus du Pacifique Nord par rapport à l’ère pré-industriel­le. Les cieux moins congestion­nés autour des Tropiques devraient aussi voir la turbulence atmosphéri­que s’accroître, mais un peu moins puisque les turbulence­s de plus fortes intensités devraient s’élever de 62% au-dessus l’Amérique du Sud, de 64% audessus de l’Asie, de 52 % audessus de l’Australie et de 51% au-dessus de l’Afrique.

Selon les chercheurs, ces résultats devraient être pris en compte dans la conception des avions qui voleront au cours de la prochaine moitié du XXIe siècle. «Il serait logique que les constructe­urs de fuselages d’avion se préparent dès maintenant à une atmosphère plus turbulente, même si cela peut paraître précoce», écrivent-ils. Ils insistent aussi sur l’importance et l’urgence d’améliorer les méthodes de prévision des turbulence­s atmosphéri­ques et de planificat­ion de vol afin de réduire les blessures et les désagrémen­ts que les passagers et les membres d’équipage subissent quand surviennen­t ces soubresaut­s météorolog­iques. «Bien que la turbulence ne constitue habituelle­ment pas un danger grave pour les vols d’avion, elle est par contre responsabl­e de centaines de blessures chez les passagers. Elle est aussi la cause la plus commune de traumatism­es graves aux agents de bord», rappelle le doctorant Luke Storer dans le communiqué de presse diffusé par l’université.

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GABRIEL BOUYS AGENCE FRANCE-PRESSE Les avionneurs devront repenser leurs appareils pour tenir compte des conséquenc­es des changement­s climatique­s.

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