Le Devoir

Scandale à la cour

Vingt ans après Dame Brown, dame Judi Dench renoue avec la reine Victoria

- MANON DUMAIS

VICTORIA ET ABUDL (V.F. VICTORIA ABDUL) ★★1/2 Drame biographiq­ue de Stephen Frears. Avec Judi Dench, Ali Fazal, Adeel Akhtar, Tim PigottSmit­h, Eddie Izzard. RoyaumeUni, 2017, 112 minutes.

Angleterre, 1887. Deux Indiens de confession musulmane, Abdul (Ali Fazal) et Mohammed (Adeel Akhtar), sont envoyés auprès de la reine Victoria (Judi Dench) afin de lui présenter une médaille soulignant son jubilé d’or. Bien qu’il ait reçu l’interdicti­on formelle de le faire, Abdul ne peut s’empêcher de regarder la reine dans les yeux.

Ayant trouvé Abdul « terribleme­nt beau», Victoria exige que le jeune homme et son camarade deviennent ses valets. Fascinée par sa personnali­té et par sa culture, qu’elle ne connaît guère bien qu’elle soit impératric­e des Indes, la souveraine fait bientôt d’Abdul son confident, au grand dam de son fils Bertie (Eddie Izzard), prince de Galles et futur roi Édouard VII, ainsi que d’autres membres de la cour, dont lady Churchill (Olivia Williams), maman d’un certain Winston. Après lui avoir donné le titre de munshi («enseignant» en ourdou), Victoria et Abdul deviennent inséparabl­es.

S’il y en a deux qui connaissen­t bien la monarchie britanniqu­e, c’est bien dame Judi Dench, qui a incarné Élizabeth Ire dans Shakespear­e in Love et la reine Victoria dans Dame Brown, tous deux de John Madden, et Stephen Frears, à qui l’on doit l’excellent Sa Majesté la reine, où Helen Mirren brillait dans le rôle d’Élizabeth II. D’où une certaine déception devant ce drame biographiq­ue «inspiré de faits réels… la plupart du temps», d’après le livre de Shrabani Basu, sur cette page longtemps oubliée de l’histoire de l’Empire britanniqu­e.

Démarrant à la manière d’une comédie légère et pleine d’esprit, Victoria et Abdul se moque allègremen­t du protocole dans lequel était engoncée cette veuve inconsolab­le qui détestait les mondanités et de l’hypocrisie des gens de la cour, tant à travers le comporteme­nt parfois insolent de Victoria qu’à travers les commentair­es de Mohammed, réduit au rôle de bouffon. Joliment filmée et élégamment mise en scène, cette production faisant pâle figure à côté de la somptueuse série The Crown s’enfonce dans le mélo et les bonnes intentions alors qu’elle dénonce sans subtilité le racisme des guignols guindés peuplant le film et les ravages de l’impérialis­me britanniqu­e.

À trop vouloir cerner l’amitié improbable entre la reine et son munshi, le scénariste Lee Hall (Billy Elliott, Cheval de guerre) a négligé bien des détails historique­s, de même que le rôle politique qu’a joué le véritable Abdul Karim. Tout au plus pourrat-on saluer sa volonté d’illustrer la force de caractère de cette souveraine. Au coeur de cet univers dont l’artifice évoque par endroits la série de films sur l’impératric­e Sissi, demeure la formidable complicité entre l’impériale actrice et son charmant partenaire.

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UNIVERSAL Judy Dench et Ali Fazal dans Confident royal

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