BNP Paribas prend ses distances des sables bitumineux
Le groupe bancaire affirme vouloir soutenir la transition énergétique et orienter les décisions de ses clients
BNP Paribas rompt avec une partie du secteur des hydrocarbures, le groupe bancaire français ne souhaitant plus financer des entreprises dont l’essentiel des activités repose sur le gaz de schiste, le pétrole de schiste et le pétrole venant des sables bitumineux.
Après avoir coupé les liens avec les mines et centrales de charbon, BNP Paribas a affirmé mercredi qu’elle veut accompagner et accélérer la transition énergétique, notamment par l’offre de services qui pourront «orienter» les décisions de ses clients.
Dans son portefeuille de prêts commerciaux, la catégorie «énergies hors électricité» compte pour 4 % du total, moins que le transport et la logistique (8%) mais plus que l’assurance (2 %).
En parallèle, le groupe financier, dont les actifs sous gestion dépassent le seuil des 400 milliards d’euros, annonce qu’il s’interdira de financer les projets pétroliers et gaziers dans l’Arctique.
«Ces mesures nous conduiront à cesser nos financements avec un nombre significatif d’acteurs qui ne s’inscrivent pas dans la transition vers une économie moins émettrice de gaz à effet de serre», a affirmé le chef de la direction de BNP Paribas, Jean-Laurent Bonnafé.
Ces acteurs visés sont ceux qui sont axés sur « l’exploration, la production, la distribution, le marketing ou le courtage» du gaz et du pétrole de schiste, de même que le pétrole des sables bitumineux. La mesure couvre aussi les projets de transport et d’exportation.
«Dans le même temps, nous jouerons pleinement notre rôle, en accompagnant nos clients du secteur de l’énergie qui mettent en oeuvre une démarche volontariste: en Europe, en Amérique et en Asie, des compagnies se sont engagées dans un important effort d’évolution de leur modèle d’affaires qui jouera un rôle clé dans la transition énergétique », a ajouté M. Bonnafé.
Cela, a souligné Greenpeace, signifie que BNP Paribas ne financera pas le doublement du pipeline Trans Mountain, de l’entreprise texane Kinder Morgan. Même chose pour le projet Keystone XL et le remplacement de la Ligne 3 entre l’Alberta et le Wisconsin.
Le dossier Trans Mountain
Le geste de BNP Paribas survient trois mois après que le Mouvement Desjardins eut décidé cet été de décréter un moratoire sur le financement de projets d’oléoduc. Des groupes essaient toutefois de convaincre Desjardins de céder à un autre établissement la responsabilité du prêt de 145 millions offert pour le projet Trans Mountain, lequel a récolté un financement total de 5,5 milliards.
«De plus en plus de banques reconnaissent que les pipelines de sables bitumineux et les projets d’hydrocarbures extrêmes menacent leur réputation et leur performance financière à long terme », a indiqué Patrick Bonin, le responsable de la campagne Climat-Énergie chez Greenpeace Canada. « Les institutions financières comme TD et Desjardins qui se vantent d’être “socialement responsables” doivent s’attendre à davantage de résistance si elles continuent à financer des pipelines comme celui de Kinder Morgan. »
L’assureur néerlandais ING a annoncé au printemps qu’il a cédé sa participation de 120 millions $US dans le portefeuille de financement de 2,5 milliards $US offert au projet de pipeline Dakota Access. Le projet a fait l’objet d’une contestation des Sioux de Standing Rock, mais il a reçu son feu vert de construction en février 2017.
Par ailleurs, BNP Paribas a répété mercredi qu’elle s’est déjà engagée à porter à 15 milliards d’euros son financement des énergies renouvelables et à investir 100 millions dans des jeunes pousses consacrées à l’innovation dans ce domaine.
En 2012, BNP avait décidé de vendre son portefeuille américain de prêts adossés à des hydrocarbures à Wells Fargo. Ces «engagements de prêts » atteignaient 9,5 milliards $US. Le groupe bancaire a par la suite réintégré ce créneau en 2014 pour finalement décider en 2016 qu’il suspendait le développement de ces activités, conséquences d’une faiblesse des prix.