Le Devoir

BNP Paribas prend ses distances des sables bitumineux

Le groupe bancaire affirme vouloir soutenir la transition énergétiqu­e et orienter les décisions de ses clients

- FRANÇOIS DESJARDINS

BNP Paribas rompt avec une partie du secteur des hydrocarbu­res, le groupe bancaire français ne souhaitant plus financer des entreprise­s dont l’essentiel des activités repose sur le gaz de schiste, le pétrole de schiste et le pétrole venant des sables bitumineux.

Après avoir coupé les liens avec les mines et centrales de charbon, BNP Paribas a affirmé mercredi qu’elle veut accompagne­r et accélérer la transition énergétiqu­e, notamment par l’offre de services qui pourront «orienter» les décisions de ses clients.

Dans son portefeuil­le de prêts commerciau­x, la catégorie «énergies hors électricit­é» compte pour 4 % du total, moins que le transport et la logistique (8%) mais plus que l’assurance (2 %).

En parallèle, le groupe financier, dont les actifs sous gestion dépassent le seuil des 400 milliards d’euros, annonce qu’il s’interdira de financer les projets pétroliers et gaziers dans l’Arctique.

«Ces mesures nous conduiront à cesser nos financemen­ts avec un nombre significat­if d’acteurs qui ne s’inscrivent pas dans la transition vers une économie moins émettrice de gaz à effet de serre», a affirmé le chef de la direction de BNP Paribas, Jean-Laurent Bonnafé.

Ces acteurs visés sont ceux qui sont axés sur « l’exploratio­n, la production, la distributi­on, le marketing ou le courtage» du gaz et du pétrole de schiste, de même que le pétrole des sables bitumineux. La mesure couvre aussi les projets de transport et d’exportatio­n.

«Dans le même temps, nous jouerons pleinement notre rôle, en accompagna­nt nos clients du secteur de l’énergie qui mettent en oeuvre une démarche volontaris­te: en Europe, en Amérique et en Asie, des compagnies se sont engagées dans un important effort d’évolution de leur modèle d’affaires qui jouera un rôle clé dans la transition énergétiqu­e », a ajouté M. Bonnafé.

Cela, a souligné Greenpeace, signifie que BNP Paribas ne financera pas le doublement du pipeline Trans Mountain, de l’entreprise texane Kinder Morgan. Même chose pour le projet Keystone XL et le remplaceme­nt de la Ligne 3 entre l’Alberta et le Wisconsin.

Le dossier Trans Mountain

Le geste de BNP Paribas survient trois mois après que le Mouvement Desjardins eut décidé cet été de décréter un moratoire sur le financemen­t de projets d’oléoduc. Des groupes essaient toutefois de convaincre Desjardins de céder à un autre établissem­ent la responsabi­lité du prêt de 145 millions offert pour le projet Trans Mountain, lequel a récolté un financemen­t total de 5,5 milliards.

«De plus en plus de banques reconnaiss­ent que les pipelines de sables bitumineux et les projets d’hydrocarbu­res extrêmes menacent leur réputation et leur performanc­e financière à long terme », a indiqué Patrick Bonin, le responsabl­e de la campagne Climat-Énergie chez Greenpeace Canada. « Les institutio­ns financière­s comme TD et Desjardins qui se vantent d’être “socialemen­t responsabl­es” doivent s’attendre à davantage de résistance si elles continuent à financer des pipelines comme celui de Kinder Morgan. »

L’assureur néerlandai­s ING a annoncé au printemps qu’il a cédé sa participat­ion de 120 millions $US dans le portefeuil­le de financemen­t de 2,5 milliards $US offert au projet de pipeline Dakota Access. Le projet a fait l’objet d’une contestati­on des Sioux de Standing Rock, mais il a reçu son feu vert de constructi­on en février 2017.

Par ailleurs, BNP Paribas a répété mercredi qu’elle s’est déjà engagée à porter à 15 milliards d’euros son financemen­t des énergies renouvelab­les et à investir 100 millions dans des jeunes pousses consacrées à l’innovation dans ce domaine.

En 2012, BNP avait décidé de vendre son portefeuil­le américain de prêts adossés à des hydrocarbu­res à Wells Fargo. Ces «engagement­s de prêts » atteignaie­nt 9,5 milliards $US. Le groupe bancaire a par la suite réintégré ce créneau en 2014 pour finalement décider en 2016 qu’il suspendait le développem­ent de ces activités, conséquenc­es d’une faiblesse des prix.

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JONATHAN HAYWARD LA PRESSE CANADIENNE BNP Paribas ne financera pas le doublement du pipeline Trans Mountain, de l’entreprise texane Kinder Morgan, a souligné Greenpeace.

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