Le Devoir

À Ottawa, la fin des déficits n’est pas pour demain

Bill Morneau profite toutefois d’une économie en meilleure santé pour aider les familles

- HÉLÈNE BUZZETTI Correspond­ante parlementa­ire à Ottawa

L’économie va mieux, beaucoup mieux. Alors, Ottawa en profite pour améliorer son solde budgétaire et verser quelques cadeaux aux familles et aux gagne-petit au passage. Le ministre des Finances, Bill Morneau, a confirmé mardi dans sa mise à jour économique que les revenus du gouverneme­nt ont tellement augmenté et ses dépenses, tellement diminué que le déficit anticipé pour l’année en cours sera de 8,6 milliards de dollars inférieur à ce qui avait été projeté dans le dernier budget. Le retour à l’équilibre budgétaire n’est toutefois toujours pas sur l’écran radar libéral.

«Les revenus budgétaire­s prévus au budget de 2017 sont plus élevés sur la période de projection en raison de l’augmentati­on anticipée des revenus d’imposition des entreprise­s et des particulie­rs, ainsi que des droits et des taxes d’accise, peut-on lire dans le document rendu public mardi. Cette améliorati­on illustre l’améliorati­on générale de l’avenir économique.» Dans son discours livré à la Chambre des communes, Bill Morneau a fait preuve de triomphali­sme: «Non seulement notre plan fonctionne-t-il, mais il fonctionne encore mieux que prévu.»

Dans son dernier budget, Ottawa prévoyait que le déficit serait de 28,5 milliards en 20172018 et de 27,4 milliards l’année suivante. Il sera plutôt de 19,9 milliards et de 18,6 milliards respective­ment. La promesse électorale libérale de limiter les déficits annuels à environ 10 milliards et de rétablir l’équilibre budgétaire à temps pour l’élection de 2019 n’est cependant pas encore respectée: la mise à jour économique livrée mardi prévoit de l’encre rouge au moins jusqu’en 2022-2023, bien que pour toutes les années d’ici là les déficits prévus sont eux aussi moindres que ceux anticipés dans le dernier budget.

Cette améliorati­on notable de la situation économique permet à Ottawa de faire une dépense imprévue et d’en devancer une autre. Ainsi, Ottawa bonifiera à compter de 2019 la prestation fiscale pour le revenu de travail, un montant destiné aux salariés gagnant peu pour les encourager à rester sur le marché du travail. À l’heure actuelle, ce montant peut atteindre 1043$ par année pour une personne seule si ses revenus de travail ne dépassent pas 11 838$. Ottawa n’a pas encore indiqué comment les paramètres du programme seront modifiés: ces détails seront contenus dans le

d’autobus pourra demander à une personne de découvrir son visage afin de vérifier la validité de son titre de transport si celui-ci est accompagné d’une photo — les cartes OPUS à tarif réduit destinées aux étudiants, aux personnes âgées de 65 ans et plus ainsi qu’aux clients fidèles MAESTRO de la Société de transport de Montréal (STM), par exemple. Une fois identifié, l’usager ou l’usagère pourra prendre place dans l’autobus ou la voiture de métro tout en replaçant la pièce d’étoffe sur son visage.

« Cette interactio­n qui est la vérificati­on de l’identité peut être requise, et évidemment elle va se faire à visage découvert. Toutefois, une fois que l’on a pris place dans l’autobus ou dans le métro, on évolue dans le prolongeme­nt de l’espace public. La loi n’entend pas régir le prolongeme­nt de l’espace public », a longuement expliqué Mme Vallée en conférence de presse.

«Pour les gens qui sont dans l’autobus, c’est pendant toute la durée du trajet?» lui avait pourtant demandé la députée péquiste Agnès Maltais durant l’étude détaillée du projet de loi 62. « C’est ça. C’est clair », avait répété Mme Vallée après avoir sollicité l’avis d’un juriste de l’État.

« Si mes propos ont pu être appelés à être interprété­s, je fais amende honorable et je m’en excuse, tout simplement », a lâché Stéphanie Vallée devant la presse mardi.

Les partis d’opposition ont accusé mardi l’élue libérale d’avoir induit en erreur les membres de la commission des institutio­ns qui ont passé au crible le projet de loi 62.

«On a assisté, ce matin, au plus grand dégonfleme­nt depuis la cérémonie de clôture du Festival des montgolfiè­res de Saint-Jean-sur-Richelieu », a décrié le chef du Parti québécois, JeanFranço­is Lisée, moins d’une semaine après l’adoption d’une loi qualifiée de « raciste » et d’« islamophob­e » dans le reste du Canada. «Alors, donc, on a un gouverneme­nt qui vote une loi qui est très imparfaite, mais pour eux, elle devait être parfaite — ça fait 10 ans qu’ils y travaillen­t, ça fait 10 ans qu’ils fignolent —, et là, à la première tempête venue, ils s’écrasent. »

Bras de fer

À Montréal, le maire Denis Coderre s’oppose toujours aux dispositio­ns concernant la réception de services publics à visage découvert malgré les explicatio­ns de la ministre. « Une journée, c’est dans tout l’autobus. Là, c’est à l’entrée. On veut faire du vivre ensemble, donc on ne veut pas faire de pression avant que la personne entre dans l’autobus. Ça commence à être compliqué », a-t-il dit en pleine campagne électorale.

M. Coderre s’attend à ce que la loi controvers­ée, qui « stigmatise les femmes », soit contestée rapidement puisqu’elle « ne passe pas la rampe » des chartes des droits et des libertés. Selon lui, une demande d’injonction de la part du gouverneme­nt du Québec pourrait justement être l’occasion pour les tribunaux de tester la constituti­onnalité de la loi.

Mme Vallée a également interpellé mardi le personnel des établissem­ents d’enseigneme­nt, leur rappelant qu’«en classe, l’élève doit avoir le visage découvert étant donné qu’une communicat­ion est requise entre l’élève et son enseignant pour faciliter les apprentiss­ages ».

Le président du Syndicat général des professeur­s et professeur­es de l’Université de Montréal (SGPUM), Jean Portugais, est catégoriqu­e : «Il n’est pas question que les professeur­s deviennent des agents d’applicatio­n de la loi.»

Comme les conducteur­s d’autobus ou les employés d’hôpitaux, les professeur­s n’ont pas envie de se transforme­r en « police du niqab ». Le SGPUM n’a pas encore pris officielle­ment position à ce sujet, mais M. Portugais soutient que Mme Vallée a envoyé des signaux contradict­oires au cours des derniers jours. «Après la conférence de presse de ce matin, la confusion est encore plus grande », dit-il.

Le SGPUM estime que la direction de l’UdeM devra établir des lignes directrice­s à ce sujet. « Nous allons prendre connaissan­ce dans le détail des balises de la loi et de nos obligation­s avant de déterminer comment nous allons l’appliquer et quelles seront nos lignes directrice­s», a déclaré pour sa part la porte-parole de l’UdeM Geneviève O’Meara.

Cruficix

Après avoir fait des pieds et des mains pour faire adopter la Loi sur la neutralité religieuse de l’État, le gouverneme­nt libéral a réitéré mardi son attachemen­t à l’égard du crucifix qui est accroché dans le Salon bleu de l’Assemblée nationale, balayant du revers de la main une motion déposée par Québec solidaire. QS souhaitait confier au Bureau de l’Assemblée nationale (BAN) le mandat de discuter de la possibilit­é de déplacer l’objet « religieux » pour les uns, « patrimonia­l » pour les autres, mais en vain.

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Bill Morneau
 ?? JACQUES BOISSINOT LA PRESSE CANADIENNE ?? La ministre de la Justice, Stéphanie Vallée, a donné un nouvel éclairage sur l’applicatio­n de la loi sur la neutralité religieuse.
JACQUES BOISSINOT LA PRESSE CANADIENNE La ministre de la Justice, Stéphanie Vallée, a donné un nouvel éclairage sur l’applicatio­n de la loi sur la neutralité religieuse.

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