Le Devoir

Le patron de Bombardier n’avait pas vraiment d’autres options

- JOANNA SMITH à Ottawa

Quelques heures à peine avant que Bombardier ne dévoile un plan de sortie de crise frappant, Jerry Dias avait été convoqué à Montréal pour s’entretenir avec Alain Bellemare, le chef de la direction de l’entreprise.

À ce moment, le président du plus important syndicat du secteur privé au pays s’est fait dire qu’après des mois à chercher des partenaire­s pour aider à financer la CSeries, Bombardier ferait équipe avec le constructe­ur européen Airbus, qui prendrait en majeure partie la responsabi­lité de fabriquer et de vendre les appareils.

L’entente donnerait à Bombardier une manière d’éviter les droits compensato­ires imposants déterminés par les ÉtatsUnis à la suite d’une plainte du rival américain Boeing. Mais elle place aussi M. Dias — président d’Unifor, un syndicat qui représente plus de 315 000 travailleu­rs canadiens, la plupart au sein de ces deux entreprise­s — dans une position particuliè­rement inconforta­ble.

M. Dias, âgé de 59 ans, ne se réjouissai­t pas. Mais il se disait que M. Bellemare avait peu d’options devant lui. «Devant une situation similaire, où c’est la vie ou la mort, je choisis la vie», a-t-il affirmé en entrevue récemment.

Un porte-parole de Bombardier a assimilé la rencontre à une informatio­n livrée de première main à un interlocut­eur fiable et intéressé. Mais M. Dias a dit croire que sa propre conclusion pragmatiqu­e avait probableme­nt été reçue avec soulagemen­t par M. Bellemare. Après tout, rien n’empêchait le président d’Unifor de fustiger l’entente à qui voulait l’entendre.

Selon Peggy Nash, une ancienne députée fédérale néodémocra­te ayant travaillé avec M. Dias dans les années 1980 au syndicat canadien des Travailleu­rs automobile­s, qui a fusionné avec le Syndicat canadien des communicat­ions, de l’énergie et du papier pour former Unifor en 2012, le représenta­nt syndical n’a pas l’habitude de mâcher ses mots. «Si vous recherchez quelqu’un qui censure considérab­lement ce qu’il pense, ce n’est pas Jerry», at-elle fait valoir.

M. Dias a affirmé qu’il savait qu’un mouvement majeur était à l’horizon. Ancien travailleu­r de l’aéronautiq­ue lui-même, il était conscient que la plainte de Boeing au Départemen­t du commerce avait mis l’entreprise montréalai­se entre l’arbre et l’écorce. Tôt ou tard, un geste radical devait être posé.

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CHRIS YOUNG LA PRESSE CANADIENNE Jerry Dias, président du syndicat Unifor

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