Le Devoir

Le Manitoba veut contourner l’objectif fixé par Ottawa

La tarificati­on annoncée par la province mise sur un prix inférieur à celui souhaité par le fédéral

- FRANÇOIS DESJARDINS

La tarificati­on du carbone compte une nouvelle province, le Manitoba, mais celui-ci mettra le cap sur un prix plus bas que celui préconisé par le gouverneme­nt Trudeau en affirmant que le plan coûterait beaucoup moins cher aux citoyens.

Dès 2018, le carbone sera soumis à un prix de 25$ la tonne, un montant qui demeurera jusqu’en 2022, lorsque le gouverneme­nt manitobain procédera à l’analyse du plan, a indiqué le premier ministre Brian Pallister, dont la province emboîte le pas notamment au Québec, à la Colombie-Britanniqu­e, à l’Ontario et à l’Alberta. Seule la Saskatchew­an n’a pas encore dévoilé sa stratégie.

«Notre plan “fait sur mesure pour le Manitoba” coûtera moins cher que le plan conçu à Ottawa. Le prix plus bas reflète les gros investisse­ments hydroélect­riques que les Manitobain­s ont

effectués sur plusieurs décennies pour construire un des systèmes d’électricit­é les plus propres au

monde », a dit M. Pallister. Le premier ministre Justin Trudeau a indiqué aux provinces l’an dernier qu’elles devaient d’ici 2018 mettre sur pied un plan de tarificati­on du carbone, qu’il s’agisse d’une taxe ou d’un système de plafonneme­nt et d’échange de droits d’émissions. Ottawa avait alors fixé un prix plancher de 10$ en souhaitant qu’il augmente graduellem­ent jusqu’à 50 $ en 2022. L’objectif est de réduire les émissions de 30% d’ici 2030 par rapport au niveau de 2005.

Économies

Le Manitoba, qui cherchait des avis juridiques au sujet du plan fédéral cet été, a insisté sur le fait que son prix carbone serait, dans cinq ans, le «deuxième plus bas au Canada ». En refusant d’adhérer aux objectifs fédéraux, la province économiser­a 260 millions sur cinq ans, estime-t-il. Cela équivaut à 245$ par ménage en moyenne.

Le plan prend soin d’exclure le secteur agricole. Le Manitoba croit pouvoir réduire ses émissions d’un million de tonnes au cours des cinq prochaines années, soit 80 000 tonnes de plus que ce qu’aurait pour effet le plan fédéral.

Au moment de dévoiler son plan pancanadie­n en octobre 2016, Ottawa avait précisé qu’il se réserverai­t le droit d’intervenir auprès des provinces qui n’avanceraie­nt pas à un rythme jugé acceptable. Cela dit, il laissait aux provinces le choix d’adopter la méthode leur convenant le mieux. La Saskatchew­an a indiqué jeudi qu’elle lèvera le rideau sur son plan d’ici la fin de sa session parlementa­ire prévue le 6 décembre.

Il y a déjà quatre ans que le Québec a créé un système de plafonneme­nt et d’échange de droits d’émissions (SPEDE). Le SPEDE verse aux entreprise­s des allocation­s gratuites. Mais il fixe un plafond d’émissions et oblige les entreprise­s à s’y conformer, à défaut de quoi elles doivent acheter des droits. Les sociétés qui affichent un excédent de droits peuvent les revendre. De 2013 à 2020, Québec amassera 3,3 milliards, versés au Fonds vert.

Le gouverneme­nt Couillard a récemment mené une consultati­on sur les règles qui s’appliquero­nt après 2020. Alors que le secteur industriel demande à Québec de tenir compte de la compétitiv­ité des entreprise­s, dont les concurrent­s hors Québec ne sont pas soumis aux mêmes règles, les écologiste­s souhaitent plus de transparen­ce dans l’élaboratio­n des règles.

Greenpeace et Nature Québec ont demandé au gouverneme­nt de procéder à tout le moins à une consultati­on publique, comme une commission parlementa­ire, et de ne pas s’arrêter là. Les deux s’interrogen­t notamment sur les allocation­s gratuites visant à «amoindrir» l’impact du SPEDE sur certains secteurs. La démonstrat­ion de cet impact n’a pas été faite, affirment-ils.

 ?? JASON FRANSON LA PRESSE CANADIENNE ?? Dès 2018, le carbone sera soumis à un prix de 25$ la tonne, un montant qui demeurera jusqu’en 2022, a indiqué le premier ministre manitobain Brian Pallister.
JASON FRANSON LA PRESSE CANADIENNE Dès 2018, le carbone sera soumis à un prix de 25$ la tonne, un montant qui demeurera jusqu’en 2022, a indiqué le premier ministre manitobain Brian Pallister.

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