Le Devoir

Après l’américaine Uber, voici venir l’estonienne Taxify

L’entreprise lancera son service à Toronto, puis visera le Québec et l’Alberta

- KARL RETTINO-PARAZELLI

Une jeune compagnie estonienne qui tente de concurrenc­er Uber en laissant plus d’argent dans les poches des chauffeurs a l’intention de s’implanter à Montréal, a appris Le Devoir.

L’entreprise Taxify a récemment publié une offre d’emploi pour un poste de directeur des opérations à Montréal. La porte-parole de la compagnie, Marilin Noorem, n’est pas en mesure d’indiquer à quel moment le service de transport pourrait être offert dans la métropole québécoise, mais elle indique qu’après le lancement prévu à Toronto d’ici la fin de l’année, Montréal et Calgary seront dans la ligne de mire.

«Nous allons d’abord effectuer un lancement à Toronto et, peu de temps après, nous allons nous tourner vers d’autres villes», affirme-t-elle.

«Montréal a un encadremen­t strict. Nous voulons nous assurer de nous conformer aux règles en vigueur », souligne Mme Noorem, tout en précisant que l’entreprise n’a pas encore entamé de discussion­s avec les autorités québécoise­s.

Rivaliser avec Uber

Depuis sa fondation en 2013, Taxify mise sur le même modèle d’affaires qu’Uber: des usagers qui commandent des courses à l’aide d’une applicatio­n mobile et des chauffeurs qui utilisent leur véhicule personnel pour les transporte­r. La compagnie dit toutefois se distinguer d’Uber en limitant à environ 15 % la commission qu’elle retient sur chaque course, comparativ­ement à 25 ou 30% pour ses concurrent­s dans certains marchés, dit-elle.

«En imposant une commission moins élevée à nos chauffeurs, nous pouvons également offrir des prix plus abordables aux consommate­urs», soutient Mme Noorem.

Présenteme­nt active dans 20 pays, Taxify a d’abord pris de l’expansion en Europe de l’Est et en Afrique, mais elle entre maintenant dans une nouvelle phase de son développem­ent en s’attaquant à des marchés où Uber domine. L’entreprise a par exemple lancé ses activités à Paris il y a un mois et elle attend le feu vert pour le faire à Londres.

Manque de chauffeurs?

L’arrivée de Taxify à Montréal porterait-elle un coup dur à Uber? Le chargé de cours à l’École nationale d’administra­tion publique (ENAP) et ancien conseiller municipal Guillaume Lavoie, qui suit de près l’évolution de l’économie collaborat­ive, affirme qu’il faudrait d’abord que les règles québécoise­s permettent l’entrée en scène de l’entreprise estonienne.

Parce qu’à son avis, le projet-pilote encadrant les activités d’Uber au Québec est trop restrictif, notamment en ce qui concerne les 35 heures de formation obligatoir­es.

« Si nous ne sommes pas capables de tracer des règles qui sont invitantes, on va finir par avoir seulement la compagnie la plus costaude, capable de faire face à des barrières à l’entrée beaucoup trop élevées », dit-il en parlant d’Uber.

Pour le reste, il croit que la venue de Taxify forcerait Uber à ajuster ses prix et offrirait une option supplément­aire aux Montréalai­s pour réduire l’utilisatio­n de l’auto solo.

Le président de l’entreprise de covoiturag­e Netlift, Marc-Antoine Ducas, se demande quant à lui si Taxify a des chances de remporter sa bataille contre Uber au Québec. Elle aurait, selon lui, du mal à garder ses prix et sa commission au plancher, parce qu’elle devrait payer des redevances au gouverneme­nt, comme a accepté de le faire Uber.

Et surtout, dit-il, elle serait confrontée à un bassin de chauffeurs limité dans le marché montréalai­s.

«Partout dans le monde, la bataille des compagnies comme Uber et les autres se fait sur le recrutemen­t et la rétention des chauffeurs, explique-til. Et actuelleme­nt, Uber a du mal à recruter plus de chauffeurs et à garder ses chauffeurs.»

Du côté d’Uber, on réserve l’affronteme­nt pour plus tard. «Nous croyons que la compétitio­n permet d’offrir plus d’alternativ­es de transport aux consommate­urs, ce qui aide à combattre l’auto solo responsabl­e de la congestion et de la pollution», affirme son porte-parole au Québec, Jean-Christophe de Le Rue.

 ?? JACQUES NADEAU LE DEVOIR ?? Taxify, qui offre un service semblable à Uber, est présente dans une vingtaine de pays, surtout en Europe de l’Est et en Afrique. Elle vient toutefois d’inaugurer son service à Paris et attend le feu vert des autorités pour l’offrir à Londres.
JACQUES NADEAU LE DEVOIR Taxify, qui offre un service semblable à Uber, est présente dans une vingtaine de pays, surtout en Europe de l’Est et en Afrique. Elle vient toutefois d’inaugurer son service à Paris et attend le feu vert des autorités pour l’offrir à Londres.

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