Le Devoir

Accord de Paris : les États-Unis isolés après le ralliement de la Syrie

- CATHERINE HOURS à Bonn

La Syrie a annoncé mardi lors de la COP23 à Bonn son intention de se joindre à l’Accord de Paris contre le réchauffem­ent planétaire, laissant les États-Unis seuls désormais en marge de la coalition climatique mondiale.

Selon l’ONU, l’annonce est venue par le biais d’un délégué syrien, Wadah Katmawi, vice-ministre au ministère syrien de l’Administra­tion locale et de l’Environnem­ent. Il a fait cette déclaratio­n devant ses collègues négociateu­rs de la 23e conférence de l’ONU sur les changement­s climatique­s, selon plusieurs observateu­rs.

«Ils ont dit qu’ils allaient rejoindre l’Accord de Paris», a indiqué Safa al-Jayoussi, directrice de l’ONG IndyAct, qui a le statut d’observateu­r dans ce processus de négociatio­n, évoquant cette interventi­on, en arabe, en plénière.

«Nous comprenons que le gouverneme­nt de Syrie a annoncé aujourd’hui son intention de rejoindre l’Accord de Paris », a confirmé un porteparol­e de la Convention climat des Nations unies.

Selon lui, Damas devra désormais déposer ses instrument­s de ratificati­on auprès de l’ONU à New York.

Le pays sera ainsi le 197e et dernier État à rejoindre l’accord, à ce stade ratifié par 169 États et entré en vigueur moins d’un an après son adoption à Paris fin 2015. L’accord a aussi été porté, signé puis ratifié par le gouverneme­nt Obama, avant d’être dénoncé par le président Donald Trump, élu fin 2016.

Selon le site du Parlement syrien, un projet de loi a été adopté le 22 octobre afin de ratifier l’Accord de Paris, « conforméme­nt à la Constituti­on syrienne qui stipule la protection de l’environnem­ent».

À Bonn, le représenta­nt syrien a «souligné que tous les pays avaient une responsabi­lité, mais aussi évoqué l’intention [de la Syrie] de se consacrer à [ses] priorités nationales, notamment la reconstruc­tion après la guerre », a précisé Cynthia Elliott, du think tank américain WRI, organisati­on ayant également rang d’obser vateur.

«C’est super! Ils sont la dernière partie à la convention-climat de l’ONU à signer l’Accord de Paris », a réagi Chai Qimin, négociateu­r pour la Chine. «Ce qui n’en laisse qu’un à avoir annoncé son retrait», a-t-il ajouté, sans nommer Washington.

Réaction américaine

En revanche, la porte-parole du départemen­t d’État américain Heather Nauert a « trouvé cela ironique».

«Franchemen­t, la Syrie s’inquiète vraiment?», «c’est risible», a-t-elle lancé à des journalist­es à Washington. « Si le gouverneme­nt syrien se préoccupe autant de ce qu’il y a dans l’air, alors qu’il commence par ne pas gazer son propre peuple. »

Le président Trump a annoncé le 1er juin sa décision de retirer son pays de l’Accord de Paris. «À moins que le président puisse trouver des termes qui

soient plus favorables aux entreprise­s, aux travailleu­rs et aux contribuab­les américains », avait indiqué le gouverneme­nt, sans jamais donner de précisions.

L’Accord de Paris vise à limiter le réchauffem­ent mondial bien en deçà de 2°C par rapport à la Révolution industriel­le.

Avec la décision du Nicaragua de signer un accord qu’il avait d’abord jugé insuffisan­t et avec le ralliement de la Syrie, Washington se retrouve seul à dénoncer le pacte. Les statuts du texte ne lui permettent cependant pas d’en sortir concrèteme­nt avant le 4 novembre 2020.

« Les États-Unis sont isolés, souligne mardi Alden Meyer, expert du think tank américain Union of Concerned Scientists. Sur ce sujet du climat, personne ne veut être en compagnie de Donald Trump, qui se retrouve dans un splendide isolement. »

«Quand, même la Syrie, avec tous ses problèmes, peut saisir l’importance d’un accord climatique mondial, cela montre combien le Parti républicai­n aux États-Unis est idéologiqu­ement marié avec le déni climatique», a réagi Mohamed Adow, de l’ONG Christian Aid.

Les États-Unis sont aujourd’hui le deuxième émetteur mondial de gaz à effet de serre, et historique­ment le premier.

À la COP23, qui se tient jusqu’au 17 novembre, une délégation américaine est présente pour participer aux débats sur les règles d’applicatio­n de l’accord « afin de protéger les intérêts» américains, selon le départemen­t d’État.

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