Puigdemont interpelle l’UE et dénonce un « coup d’État » contre la Catalogne
Le président destitué de Catalogne, l’indépendantiste Carles Puigdemont, a demandé mardi à l’Union européenne de renoncer à soutenir un « coup d’État » contre sa région espagnole, où les indépendantistes ont échoué à s’unir pour les élections de décembre.
Si les Catalans donnent à nouveau une majorité aux séparatistes lors des élections régionales prévues le 21 décembre, « accepterez-vous le résultat du vote des Catalans ? » a demandé M. Puigdemont aux dirigeants de l’UE lors d’un discours devant quelque 200 maires séparatistes catalans qui s’étaient déplacés jusqu’à Bruxelles pour le soutenir.
Il a qualifié de « coup d’État » la mise sous tutelle de sa région, décidée par le gouvernement central le 27 octobre, quelques heures après une déclaration d’indépendance votée au Parlement régional sur la base d’un référendum d’autodétermination organisé le 1er octobre et aussitôt interdit par le gouvernement central espagnol.
Les séparatistes affirment que le «oui» l’avait emporté ce jour-là à 90% avec 43% de participation, des chiffres invérifiables faute d’une commission électorale indépendante.
Ils doivent maintenant tenter de conser ver le pouvoir lors des élections régionales du 21 décembre, imposées par le gouvernement de Mariano Rajoy pour tenter d’apaiser la crise.
Pour ce scrutin, Carles Puigdemont défend un front commun des trois partis indépendantistes, son PDeCAT (conservateur), la Gauche républicaine de Catalogne (ERC) et la Candidature d’unité populaire (CUP) d’extrême gauche.
Mais mardi soir, l’ERC a écarté cette option, son porteparole Sergi Sabria affirmant dans un communiqué que « devant l’impossibilité de former une liste réellement unitaire, il faudra chercher à nous coordonner sur la base de candidatures différentes».
En 2015, la coalition «Ensemble pour le oui» avait réussi à rassembler les deux principales formations indépendantistes, le parti de M. Puigdemont et l’ERC. La CUP s’était présentée seule.
Au total, ces trois partis avaient obtenu la majorité en sièges, mais pas en voix, avec 47,8% des suffrages, mais 72 sièges sur 135 au Parlement régional.
Certains estiment qu’une candidature unique profiterait aux indépendantistes dans leur ensemble, car la pondération des voix donne une «prime au résultat le plus fort», selon Joan Botella, recteur de la Faculté de sciences politiques de l’Université autonome de Barcelone.
Le PDeCAT aurait tout intérêt à rester au sein d’une coalition: les sondages prédisent en effet un effondrement à ce parti héritier de la puissante Convergence démocratique de Catalogne (CDC), qui a longtemps régné sur la région.
L’ERC, qui a le vent en poupe dans les sondages, a intérêt à faire cavalier seul, avec l’espoir d’être pour la première fois aux commandes de la Catalogne depuis 1936.
Les sondages prédisent aussi, à nouveau, une division presque à égalité entre indépendantistes et partisans de l’Espagne.
Ministres écroués
D’autres inconnues accompagnent cette élection atypique: que feront les élus emprisonnés qui l’emporteraient? Et ceux qui sont à Bruxelles et visés par un mandat d’arrêt ?
Le noyau dur indépendantiste est en effet éparpillé entre Bruxelles et… une prison près de Madrid.
Huit des treize ministresconseillers de l’exécutif régional destitué par le gouvernement espagnol sont écroués après avoir été inculpés notamment pour rébellion, sédition et détournements de fonds publics.
Carles Puigdemont est également visé par ces poursuites, mais il se trouve en Belgique avec quatre autres membres de son gouvernement, dans l’attente de l’examen par la justice belge d’un mandat d’arrêt international lancé par l’Espagne.
M. Puigdemont, qui a assuré s’être « exilé » pour faire connaître sa cause au reste de l’Europe, a déclaré mardi qu’il avait aussi cherché à éviter «une vague de violence» en Catalogne.
Les incarcérations suscitent l’indignation en Catalogne. Pour mercredi, les associations indépendantistes ont appelé à une grève générale, et une grande manifestation est prévue samedi.