Du sang neuf en politique municipale
Les aînés et les femmes prennent d’assaut les différents Hôtels de Ville
Un vent de changement a soufflé sur de nombreuses municipalités du Québec dimanche. Appelés aux urnes, les citoyens ont préféré donner leur voix à de nouvelles têtes. Parallèlement, les candidats de plus de 65 ans n’ont jamais été aussi nombreux.
Parmi les élus, 41,7% n’occupaient aucun poste électif — que ce soit maire ou conseiller — avant le jour du scrutin, selon les données dévoilées par le ministère des Affaires municipales et de l’Occupation du territoire, jeudi.
«On voit la tendance du “sortez les sortants” qu’on avait déjà vue en France ou aux États-Unis aux dernières élections présidentielles», constate Caroline Patsias, professeure de sciences politiques à l’Université du Québec à Montréal.
D’après elle, l’expérience politique n’est plus un atout. C’est même devenu un « handicap», pour certains.
«Denis Coderre a fait sa campagne électorale sur l’expérience, François Fillon en France aussi, et Hillary Clinton aux États-Unis, mais ça ne fonctionne plus, estime-t-elle. Les gens veulent des sociétés plus transparentes, et ça passe par un brassage démocratique important.»
Les plus jeunes ont profité de cette volonté de voir du sang neuf à la tête des municipalités. Parmi les élus faisant leur entrée, 36,5 % ont moins de 44 ans.
Des élus plus âgés
Les jeunes de 18 à 34 ans ne représentent pourtant que 8,3% de l’ensemble des élus, une proportion stable par rapport à l’élection de 2013.
À l’inverse, le nombre de maires et de conseillers de plus de 65 ans ne cesse d’augmenter. Alors qu’ils étaient 8,5% en 2005, ils sont désormais 20,1 %.
Une augmentation liée d’une part à «un certain conservatisme» menant à la réélection de candidats sortants, selon Mme Patsias. Mais elle explique surtout ce phénomène par le vieillissement de la population, les candidats se lançant en politique une fois à la retraite, ayant le temps et l’énergie pour le faire.
Place aux femmes
Les femmes ont aussi profité de cette envie de changement, représentant 37,3% des nouveaux élus.
Elles ont été nombreuses à tenter leur chance aux municipales cette année, «un palier stratégique pour celles qui souhaitent commencer en politique» selon Mme Patsias.
Entre 2005 et 2017, le nombre de femmes candidates est passé de 24,7% à 31,3%. Dimanche, 205 femmes ont été élues mairesses et 2 358, conseillères. En 2013, elles étaient respectivement 190 et 2 204.
La plus grande présence de partis politiques aux élections municipales explique en partie cette augmentation, croit la professeure. «Un parti politique, c’est une machine qui veut s’assurer la présence des femmes, c’est important d’en avoir. »
Mais la parité n’est pas au rendez-vous: seuls 34,7% des conseils municipaux comptent presque autant d’hommes que de femmes à l’issue de cette élection.
«Dans l’absolu, c’est un taux très faible, mais c’est encourageant de voir que le changement est favorable à une féminisation », note Mme Patsias, rappelant que, quel que soit le palier politique, la parité est rarement atteinte à moins qu’elle soit imposée, comme l’a fait le gouvernement Trudeau.
Ce phénomène s’explique par le vieillissement de la population, les candidats se lançant en politique une fois à la retraite
Participation à la baisse
Cette année encore, les électeurs ne se sont pas pressés aux bureaux de vote. Ils étaient 44,8% à avoir fait entendre leur voix, comparativement à 47,2 % en 2013.
Considérée comme un palier «purement administratif», la politique municipale peine encore à susciter l’intérêt des Québécois, souligne Mme Patsias.
Et la pluie qui s’est abattue sur la province n’a pas aidé à motiver les citoyens à faire valoir leur droit de vote.
Plusieurs études, dont celle de Daniel Stockemer et Michael Wigginton de l’Université d’Ottawa, démontrent que le climat influence le taux de participation.
«Ce n’est pas juste une question de pluie et de froid. Faites une élection pendant les vacances d’été, il y aura forcément moins de personnes qui vont voter», renchérit Mme Patsias.