Le Devoir

Julie Boulianne chante Rossini à Montréal

La Cenerentol­a prend l’affiche ce samedi à l’Opéra de Montréal pour quatre représenta­tions

- CHRISTOPHE HUSS

L’opéra de Rossini Cendrillon (La Cenerentol­a), qui prend l’affiche samedi à l’Opéra de Montréal, sera l’occasion d’entendre au Québec dans le rôle-titre un fleuron du chant québécois qui triomphe à Londres, à Paris, à Glyndebour­ne ou à Berlin, la mezzosopra­no Julie Boulianne.

Rossini est l’un des terrains de prédilecti­on de Julie Boulianne, qui avait décrit son rayon d’activité, en mars dernier au Devoir, comme évoluant «dans un créneau des romantique­s français, de Rossini et de Mozart (les rôles d’Elvira dans Don Giovanni et de Sesto dans La clémence de Titus )». Elle pensait d’ailleurs y être «bien installée pour quelque temps encore ».

Il est vrai que pour les chanteuses qui maîtrisent l’idiome vocal rossinien, à l’image, par exemple, de Joyce DiDonato, la chanteuse la plus en vue dans le monde sur ce terrain, un répertoire exceptionn­el s’ouvre avec ce qu’on a appelé «la révolution rossinienn­e», une renaissanc­e de ce répertoire qui s’est faite notamment autour des voix de mezzo-sopranos comme celles de Marylin Horne, Teresa Berganza ou Lucia Valentini-Terrani.

En marge de l’ouvrage phare qu’est Le barbier de Séville, La Cenerentol­a est — avec L’Italienne à Alger et, dans une moindre mesure, les délirants Voyage à Reims et Comte Ory, qui, eux, avaient complèteme­nt disparu — l’opéra qui a bénéficié au premier chef du renouveau stylistiqu­e de ce répertoire aussi en raison d’un afflux de chanteuses: Frederica von Stade, Agnès Baltsa, Vesselina Kasarova, Cecilia Bartoli, Jennifer Larmore et Elina Garanca venant s’ajouter aux noms précités.

Un conte épicé

Le conte de Cendrillon est bien connu: une jeune fille souffre-douleur d’une cruelle belle-mère et de ses demisoeurs réussit à aller à un grand bal où elle séduit le prince par sa beauté et sa pureté de coeur. Chez Rossini, le livret de Jacopo Feretti introduit, en lieu et place de la mégère, un beau-père ridicule nommé Don Magnifico, obsédé par son rang social et qui rêve du prince charmant pour ses deux filles oisives. Le personnage de Don Magnifico est capital, car il permet au musicien de rééquilibr­er le spectre des voix. Plutôt que d’avoir quatre protagonis­tes féminins au foyer, Rossini introduit ainsi l’un des profils vocaux qui l’intéressen­t le plus: celui de la basse bouffe.

Ce n’est pas non plus une fée qui vient à la rescousse de Cendrillon, mais Alidoro, le précepteur du prince. La question de la critique sociale ouvre dans La Cenerentol­a la porte à de très nombreuses situations comiques. Les filles de Don Magnifico laisseront ainsi échapper le prince puisqu’il sera déguisé en valet et se jetteront sur le valet, déguisé en prince, alors que le vrai prince Ramiro, lui, ne manquera pas Cendrillon, car il verra la pureté de son coeur.

Mise en scène fameuse

Achevé en un peu plus de trois semaines en 1816 par un Rossini en verve, La Cenerentol­a est un feu roulant de musique qui sera servi à Montréal dans une production qui a fait beaucoup de chemin depuis dix ans. Habillée des décors et costumes hauts en couleur de Joan Guillén, éclairés par Albert Faura, elle est mise en scène par l’Espagnol Joan Font, assisté par le chorégraph­e Xevi Dorca. Produite en 2007 pour l’Opéra de Houston, cette Cenerentol­a a voyagé ici à Toronto, Seattle, Washington, Chicago et Los Angeles, et en Europe à Cardiff, Genève, Bruxelles et Barcelone. C’est au Liceu de Barcelone qu’elle a été filmée, avec Juan Diego Florez et Joyce DiDonato, pour un DVD paru chez Decca.

À Montréal, Julie Boulianne sera entourée des basses Pietro Spagnoli dans le rôle du ridicule Don Magnifico et de Vito Priante dans celui de Dandini, le valet du prince Ramiro. C’est un ténor américain, Juan José de Léon, qui chantera le rôle du prince. Lauren Margison et Rose Naggar-Tremblay, deux membres de l’Atelier lyrique de l’Opéra de Montréal, interprète­nt les belles-soeurs de Cendrillon, Clorinda et Tisbe. Jose Miguel Pérez-Sierra dirigera l’Orchestre Métropolit­ain et le Choeur de l’Opéra de Montréal. LA CENERENTOL­A Opéra en deux actes de Gioachino Rossini. À la salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts les 11, 14, 16 et 18 novembre 2017 à 19 h 30. Billets : 514-842-2112.

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