Le Devoir

L’armée met en garde le régime

Le chef des forces militaires dénonce l’éviction du vice-président

- REAGAN MASHAVAVE à Harare

Le chef de l’armée zimbabwéen­ne a adressé lundi une mise en garde sans précédent au parti du président, Robert Mugabe, dénonçant vivement l’éviction du viceprésid­ent du pays et prévenant que l’armée pourrait « intervenir » si cette « purge » ne cessait pas au sein du parti présidenti­el.

Emmerson Mnangagwa, longtemps pressenti comme dauphin du président Robert Mugabe dont il est un des anciens fidèles, a été humilié et démis de ses fonctions de vice-président la semaine dernière, après un bras de fer avec la première dame, Grace Mugabe.

Ce départ forcé d’un des lieutenant­s de Robert Mugabe a fait éclater au grand jour les rivalités au sein du parti présidenti­el, la Zanu-PF, au pouvoir depuis l’indépendan­ce en 1980.

«La purge actuelle qui vise clairement les membres du parti qui ont été engagés dans la guerre d’indépendan­ce doit cesser immédiatem­ent», a martelé lundi le général Constantin­o Chiwenga en lisant un communiqué devant la presse au quartier général de l’armée, dans une déclaratio­n particuliè­rement forte. Environ 90 hauts responsabl­es de l’armée y ont assisté.

«Nous devons rappeler à ceux qui sont derrière ces dangereuse­s manigances que, lorsqu’il s’agit de protéger notre révolution, l’armée n’hésitera pas à intervenir», a-t-il menacé.

Cette mise en garde intervient alors qu’Emmerson Mnangagwa, 75 ans, a fui le Zimbabwe pour l’Afrique du Sud, selon ses proches.

Figure controvers­ée

M. Mnangagwa, qui a reçu le soutien des anciens combattant­s de la guerre d’indépendan­ce au Zimbabwe, entretient des liens étroits avec les militaires, étant à la fois un ancien ministre de la Défense et un expatron des services secrets du Zimbabwe.

Il a joué un rôle clé dans les violences qui ont ensanglant­é la présidenti­elle de 2008, remportée par Mugabe après le retrait de l’opposant Morgan Tsvangirai. Il est aussi soupçonné d’être l’architecte des « atrocités de Gukurahund­i» dans le sud du pays dans les années 1980, alors qu’il était ministre de la Sécurité.

Après son éviction, il avait promis de défier Robert et Grace Mugabe, les accusant de se prendre pour des « demidieux ». Il a assuré qu’il « reviendrai­t au Zimbabwe pour diriger » la Zanu-PF, qui n’est pas «la propriété personnell­e» des Mugabe.

La réponse du régime ne s’est pas fait attendre: il a été exclu du parti, qui tient son congrès le mois prochain. À cette occasion, Grace Mugabe, une figure très controvers­ée, pourrait être nommée à un des deux postes de vice-président qui est désormais vacant et retrouvera­it en position idéale pour succéder à son époux, âgé de 93 ans.

Emmerson Mnangagwa a longtemps été pressenti comme dauphin du président Robert Mugabe

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