Le Devoir

Pas une loi ne serait adoptée sans un examen de ses effets sur les anglophone­s

L’offensive de charme auprès de cet électorat sera discutée au congrès

- MARIE-MICHÈLE SIOUI Correspond­ante parlementa­ire à Québec

La Commission politique du Parti libéral du Québec (PLQ) prend à bras-le-corps les préoccupat­ions des troupes de Philippe Couillard pour le sort des Québécois anglophone­s: elle suggère au gouverneme­nt du Québec de se préoccuper des «citoyens d’expression anglaise» lors de l’élaboratio­n de « tout nouveau projet de loi ou règlement ».

Dans un souci de « maximiser » la participat­ion des citoyens d’expression anglaise à «l’avancement de la société québécoise», la Commission politique présente cinq résolution­s concernant les anglophone­s. Ces résolution­s feront l’objet d’un débat et d’un vote de la part des membres du PLQ, qui se réunissent en congrès à Québec du 24 au 26 novembre.

L’une d’elles suggère que le gouverneme­nt du Québec s’assure «d’évaluer, lors de l’élaboratio­n de tout nouveau projet de loi ou règlement, l’impact de ceux-ci sur les citoyens d’expression anglaise et d’inclure à tout nouveau projet de loi, règlement ou politique des dispositio­ns qui les concernent».

La Commission politique propose aussi de s’assurer «d’avoir une représenta­tivité des personnes issues de ces communauté­s [anglophone­s] au sein de la fonction publique et des instances décisionne­lles ». Elle suggère également de mandater l’Institut de la statistiqu­e du Québec afin qu’il collige «davantage de données et [établisse] un

portrait clair et précis de leurs caractéris­tiques sociodémog­raphiques et des enjeux particulie­rs qu’ils vivent, notamment ceux qui concernent l’accès aux services publics et au marché de l’emploi ».

La main tendue des libéraux

Les résolution­s suivent une série de gestes faits par le gouverneme­nt Couillard afin de tendre la main aux anglophone­s du Québec, que le premier ministre tient à appeler «Québécois de langue anglaise». « We need you», leur disait-il en août, dans son discours de clôture du congrès des jeunes libéraux. «Votre présence est nécessaire, désirée. Nous avons besoin de vous pour construire un meilleur avenir pour tous les Québécois », lançait-il en anglais.

Le mois dernier, dans une décision marquant une volte-face de sa part, le premier ministre a nommé la ministre Kathleen Weil responsabl­e «des relations avec les Québécois d’expression anglaise ». Philippe Couillard, qui était opposé depuis 2013 à une telle nomination — sous prétexte qu’elle diviserait les Québécois — a reconnu s’être auparavant trompé. « Quand j’ai rencontré les communauté­s de langue anglaise, notamment en région, j’ai constaté de leur part, outre une inquiétude, un éloignemen­t, l’impression qu’ils n’ont pas accès aux services publics comme citoyens québécois», a-t-il expliqué au lendemain de son remaniemen­t.

Le leader de son gouverneme­nt, Jean-Marc Fournier, s’est aussi inquiété de la survie de la minorité anglophone québécoise vivant à l’extérieur de Montréal. En juin, les médias ont révélé qu’il avait interpellé la ministre fédérale Mélanie Joly au sujet des risques d’assimilati­on auxquels les anglophone­s du Québec s’exposent, à son avis.

Inspiratio­n caquiste

Le 33e Congrès des membres du PLQ sera aussi l’occasion pour la Commission politique de présenter deux résolution­s reprenant des idées mises en avant par la Coalition avenir Québec (CAQ). L’une d’elles rappelle, en partie, un souhait formulé en 2016 par le chef caquiste, François Legault, qui avait dit vouloir rendre l’école obligatoir­e jusqu’à 18 ans.

La propositio­n libérale est en cela différente qu’elle suggère d’augmenter l’âge d’instructio­n obligatoir­e à l’âge de la majorité, mais uniquement «pour les élèves qui n’ont pas obtenu de diplôme d’études secondaire­s ou de formation profession­nelle ». Cette avenue a déjà été évoquée par le ministre de l’Éducation, Sébastien Proulx, qui s’est engagé dans sa Politique de réussite éducative à «analyser la possibilit­é de rendre l’école obligatoir­e jusqu’à 18 ans, ou jusqu’à l’obtention d’un premier diplôme ou d’une première qualificat­ion ».

Toujours dans le cahier consignant les 200 propositio­ns de sa résolution-cadre, la Commission politique suggère de modifier le Code civil du Québec «de manière à prévoir l’imprescrip­tibilité des recours civils intentés par les victimes d’agressions sexuelles ». C’est précisémen­t ce que réclame le député caquiste Simon Jolin-Barrette dans un projet de loi qu’il a déposé en mars 2016, et que le gouverneme­nt refuse d’appeler.

La Commission politique du PLQ suggère par ailleurs d’instaurer un recours civil accéléré pour les victimes d’agressions sexuelles et d’investir davantage dans la maîtrise du « français technique » chez les immigrants, afin d’augmenter « l’employabil­ité des immigrants qualifiés qui parlent déjà le français ».

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