Le Devoir

La création d’un parc national urbain pourrait coûter cher

- JEANNE CORRIVEAU

L’élection de Valérie Plante suscite l’espoir chez les environnem­entalistes, qui saluent la volonté de la nouvelle mairesse de Montréal de créer un parc national urbain sur le site de Pierrefond­s-Ouest. Mais réaliser ce projet, qui empêchera le développem­ent immobilier dans ce secteur, pourrait nécessiter des investisse­ments publics importants.

«C’est très encouragea­nt pour

nous », a indiqué Sylvia Oljemark, porte-parole de la Coalition verte qui milite depuis des années pour la préservati­on de ce secteur adjacent au parc de l’Anse-à-l’Orme.

Dans la foulée du rapport de l’Office de consultati­on publique de Montréal publié en septembre dernier et qui relevait des lacunes majeures en matière d’acceptabil­ité sociale, Valérie Plante avait réitéré son intention de protéger le site de Pierrefond­sOuest et d’y créer le premier parc national urbain de Montréal.

C’est donc dire que les terrains totalisant 185 hectares ne pourront accueillir les 5500 logements prévus si la mairesse donne suite à son engagement.

À quel coût?

Les promoteurs de Cap-Nature, qui sont propriétai­res des terrains visés, n’ont pas souhaité commenter publiqueme­nt la promesse de Valérie Plante.

Réélu à la mairie de Pierrefond­s-Roxboro sous la bannière de l’Équipe Denis Coderre, Dimitrios Jim Beis maintient qu’il est possible de réaliser un projet immobilier dans une optique de développem­ent durable.

«Je suis ouvert à n’importe quelle solution, mais pas à n’importe quel prix. Si ça coûte un certain montant, 200 à 300 millions par exemple, qui va payer pour ? Parce que les résidants n’ont pas la capacité de payer quelque chose comme ça.»

Il rappelle qu’à ce jour, aucun projet n’a été déposé à la Ville ou à l’arrondisse­ment et que le Programme particulie­r d’urbanisme (PPU) n’a toujours pas été adopté.

Ce ne serait pas la première fois que de nouveaux élus prendraien­t une direction contraire à celle de l’administra­tion précédente, signale Me Sébastien Laprise, avocat spécialisé en droit public et municipal chez Langlois avocats. «Ils ont le droit de le faire, mais c’est possible qu’ils rencontren­t des embûches », avance-t-il.

Même si aucun permis n’a encore été délivré, les promoteurs pourraient être tentés de réclamer des droits acquis compte tenu des démarches qu’ils ont déjà entreprise­s, ditil. Et la question des indemnités demeure.

«Ce n’est pas la valeur marchande qui est recherchée, c’est la valeur à l’exproprié, explique l’avocat. À première vue, il m’apparaît que les démarches entreprise­s pourraient être suffisante­s pour établir que les promoteurs ont droit à une indemnité équivalent­e au profit qu’ils auraient réalisé si le projet s’était concrétisé. »

Sans vouloir avancer de montant, Me Laprise évoque «plusieurs dizaines de millions de dollars». «Mais rien n’exclut qu’une transactio­n de gré à gré intervienn­e », ajoute l’avocat. En mai dernier, les promoteurs parlaient plutôt de « centaines de millions de dollars ».

Rappelons qu’en 2011, Québec avait déboursé 15 millions pour l’achat d’un terrain de 20 hectares adjacent au Parc national des Îles-deBoucherv­ille du promoteur Luc Poirier.

Prudence à Québec

Valérie Plante avait évoqué l’idée d’une aide financière de Québec pour faire l’acquisitio­n des terrains, mais au cabinet du ministre des Forêts, de la Faune et des Parcs, on demeure prudent. «Il faudra tout d’abord que Mme Plante dépose son projet», a-t-on dit au cabinet de Luc Blanchette.

Emmanuel Rondia, du Conseil régional de l’environnem­ent (CRE) de Montréal, estime qu’il n’est pas trop tard pour protéger ces milieux naturels.

Le CRE, rappelle-t-il, avait publié une étude en 2016 démontrant que d’autres terrains étaient disponible­s dans Pierrefond­s-Roxboro pour du développem­ent.

Selon une étude publiée par la Fondation David Suzuki, le site de Pierrefond­s-Ouest abriterait 17 espèces de reptiles et d’amphibiens ainsi que 219 espèces d’oiseaux, dont 15 ont des statuts de protection au sens de la loi.

Valérie Plante avait réitéré son intention de protéger le site de Pierrefond­sOuest

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