Le Devoir

Marc Copland, le pianiste des profondeur­s

Deux albums bourrés de compositio­ns originales viennent confirmer sa singularit­é

- SERGE TRUFFAUT

Dix ans durant, il a vécu une vie monastique dans les environs de Baltimore à manipuler les ivoires et les noires. C’était dans les années 1970.

Quel drôle de parcours que celui poursuivi par le pianiste Marc Copland depuis maintenant une quarantain­e d’années. Entre autres singularit­és, il est passé du coq à l’âne. Oui, oui, oui : il était saxophonis­te. Il s’était taillé une réputation, pas celle de Brassens, pas la mauvaise, mais bien celle qui se conjugue avec excellente. Et à New York, s’il vous plaît. Bref, il jouait avec tout le monde. Puis, hop !

Un beau matin, ce francophil­e frustré par les limites harmonique­s inhérentes à son instrument a décidé de mettre ce dernier en jachère. De l’abandonner. En fait, il a tout plaqué: le saxo et New York. Dans quel but? Maîtriser le piano dans ses moindres subtilités. Dix ans durant, il a vécu une vie monastique dans les environs de Baltimore à manipuler les ivoires et les noires. C’était dans les années 1970.

Voilà que, depuis peu, il se confirme, comme si besoin était, qu’il est un pianiste singulier. Autrement dit, il est devenu un grand pianiste. Dans la lignée, stylistiqu­e s’entend, de Paul Bley plus que de Bill Evans. Pardon? Il est lyrique sans les effets qui enjolivent, qui racolent. Coup sur coup, Copland vient de publier deux albums avec la maison de disques qu’il a fondée, soit InnerVoice Jazz. Si l’on a bien saisi les méandres contractue­ls, il n’est plus lié à l’étiquette allemande Pirouet. Ce qui, financière­ment, est une bonne nouvelle, car la politique des prix des CD de Pirouet se confond souvent avec le grotesque. Passons.

Les deux disques sont les suivants : Better By Far en quartet et

Nightfall en solo. Le premier a été réalisé en compagnie de Joey Baron à la batterie, Ralph Alessi à la trompette et le fidèle Drew Gress à la contrebass­e. Le deuxième ? Il a été produit en France. Chez l’un comme chez l’autre, les compositio­ns originales dominent le programme.

De Better By Far, soit l’album en quartet, on a retenu le dynamisme de l’exécution de certaines pièces qui suit la retenue de l’exécution de certains morceaux. En un mot, Copland et ses complices proposent un éventail riche en palettes sonores. Beaucoup plus riche en tout cas que le Tangents publié il y a peu par ECM sous le nom du contrebass­iste Gar y Peacock.

De Nightfall, soit le solo, on a noté qu’il se distingue de bien des albums qui proposent une architectu­re musicale identique par l’incroyable densité avec laquelle Copland décline, détaille ses pièces comme celles écrites par

les guitariste­s Ralph Towner et John Abercrombi­e, ainsi que par les contrebass­istes Peacock et Scott LaFaro. Plus concentré, plus concis, plus compact que Nightfall est impossible.

En clair, Copland est un grand parmi les grands du piano d’hier comme d’aujourd’hui.

Le 29 octobre dernier, le pianiste et militant Muhal Richard Abrams est mort. Il avait 87 ans. Il fut notamment le cofondateu­r de l’AACM de Chicago.

Blue Note lance un nouveau produit à tirage limité: 1500 exemplaire­s à 200$US. Il s’agit d’un coffret proposant des pièces enregistré­es par les artistes actuelleme­nt sous contrat et qui ne seront jamais vendues sous la forme d’un CD traditionn­el ou en diffusion continue. À cela s’ajoute un album inédit du trompettis­te Blue Mitchell et qui date des années 1960. Ce premier coffret s’intitule: Peace, Love & Fishing.

Le fameux conservato­ire Berklee College of Music a décerné un doctorat honoris causa au guitariste Bill Frisell. Ce dernier est également le sujet d’un documentai­re réalisé par Emma Franz et qui vient de paraître. Le titre ? Bill Frisell: A Portrait.

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Deux disques de Copland publiés avec sa propre maison de disque, soit InnerVoice Jazz, Better By Far et Nightfall
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FRANCESCO PRANDONI Marc Copland confirme, comme si besoin était, qu’il est un pianiste singulier.

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