Variations sur un même thème évangélique
Elles participent à la ferveur religieuse et à l’évangélisation chrétienne depuis le XIIIe siècle, et l’idée aurait pris forme grâce à un certain François d’Assise. Indissociables de l’esprit de Noël, les crèches constituent une attraction importante, et
Au 5e étage de l’oratoire Saint-Joseph, dans cette institution qui accueille chaque année environ 2 millions de visiteurs, c’est Noël tous les jours. Les grincheux des Fêtes passent leur tour, mais beaucoup d’autres s’y bousculent pour admirer une portion de l’imposante collection de crèches de Noël appartenant à l’institution fondée par André Bessette, mieux connu sous le nom de frère André. Ce qui n’était qu’une modeste chapelle en 1904 sur les pentes du mont Royal s’est transformé en imposante basilique où convergent autant les touristes religieux que les simples curieux… de toutes les confessions.
C’est ce public hétéroclite, venant aussi bien de Chine, des pays musulmans que d’un peu partout au Québec, qui converge au Musée de l’Oratoire pour prendre part à un singulier voyage intitulé Une
crèche, un monde. Quelquesunes des 1000 crèches du Musée témoignent à la fois de la diversité des approches artistiques et des traits culturels de chaque pays.
Cette aventure de Noël a débuté à la fin des années 1970 par un concours où l’on invitait les enfants à fabriquer leur propre crèche. À cette époque, le nouveau conservateur du musée, le père André Bergeron, a poussé l’idée, favorisant l’acquisition de crèches de tous les pays. Celle qui lui a succédé à ce poste il y a sept ans, Chantal Turbide, salue cette formidable initiative, devenue une marque distinctive du Musée, et une intéressante source de revenus toute l’année.
Pour cette spécialiste de l’art ancien, rien n’est moins étonnant que cette fascination pour cette représentation de la Nativité, moment d’une importance symbolique capitale pour tous les catholiques du monde entier. Or, selon Chantal Turbide, «ça rejoint tout le monde, et il suffit de lire le cahier des commentaires à la sortie de l’exposition pour constater à quel point elle véhicule des thèmes universels». La crèche, c’est bien sûr «une célébration de la famille, et le visiteur n’a pas besoin de longues explications pour le comprendre» et, lorsqu’il y a des évocations de la fuite de Marie, Joseph et l’Enfant Jésus vers l’Égypte, «la question de l’immigration, ou celle des réfugiés, s’impose rapidement».
Planète crèche
Emblème par excellence de Noël, la crèche peut aussi être une formidable ambassadrice des cultures du monde entier. C’est ce que souligne la dernière version de l’exposition au Musée, plus modeste que les précédentes (100 crèches au lieu de 200) dans le contexte du grand réaménagement de
l’Oratoire, au coût de 80 millions de dollars et dont les travaux s’étendront jusqu’en 2021.
«Nous avons regroupé les crèches par continent, souligne Chantal Turbide. Chacune des vitrines, qu’elle soit d’Asie, d’Europe ou d’Océanie, offre des représentations typiques de chaque pays, et des matériaux caractéristiques du lieu où elles sont fabriquées. Par exemple, les crèches africaines évoquent des villages où les personnages portent des boubous, ces vêtements très colorés. Il y en a même une où le boeuf et l’âne ont été remplacés par un zèbre et une girafe ! »
Répondre à la demande
Le phénomène peut paraître étrange à l’heure où les décorations de Noël envahissent les commerces avant l’Halloween: les crèches sont souvent introuvables dans les grands magasins, prétextant une trop faible demande des consommateurs. Cette rareté fait le bonheur de Chantal Turbide. «Nous, on en vend des crèches!» dit-elle avec fierté. À son arrivée au Musée, elle s’étonnait que la popularité de l’exposition ne se manifeste Crèche du Salvador pas sur les étagères de la boutique. «Au début, le directeur était sceptique, mais c’est devenu une de nos meilleures ventes. Un religieux âgé en fabrique plusieurs à la main, et elles se vendent comme des petits pains.»
Entre la traditionnelle messe de minuit, les concerts d’orgue et ceux des Petits Chanteurs du Mont-Royal, la magie de Noël passe donc aussi par les crèches à l’Oratoire. «De jeunes collègues diplômés en histoire de l’art trouvent souvent cette collection étrange, mais lorsqu’ils réalisent la variété, l’originalité et la recherche dans les matériaux, ils sont les premiers à courir pour voir les nouvelles acquisitions», souligne Chantal Turbide avec fierté.
«Nous avons regroupé les crèches par continent. Chacune des vitrines, qu’elle soit d’Asie, d’Europe ou d’Océanie, offre des représentations typiques de chaque » pays, et des matériaux caractéristiques du lieu où elles sont fabriquées. Chantal Turbide, conservatrice du Musée de l’oratoire Saint-Joseph