Le Devoir

Renouer le lien avec la France

« Il faut ramener des étudiants québécois en France », plaide Louise Beaudoin

- CHRISTIAN RIOUX Correspond­ant à Paris

Ce n’est pas une préoccupat­ion nouvelle. L’ancienne ministre des Relations internatio­nales du Québec n’a jamais caché qu’elle ne voyait pas beaucoup de relève dans les relations franco-québécoise­s dont elle a été le champion toutes catégories depuis plus de 40 ans.

C’est de cette inquiétude profonde qu’elle s’est entretenue mercredi soir avec une trentaine de jeunes Français et Québécois à l’Associatio­n France-Amérique. Dans le somptueux hôtel particulie­r Le Marois, à deux pas de l’Élysée, l’ex-ministre en a profité pour proposer de ramener plus d’étudiants québécois en France grâce, notamment, à la création d’un programme de bourses.

«J’ai voulu m’adresser aux jeunes, dit l’ancienne ministre du Parti québécois, parce que c’est à leur tour de prendre la relève. »

Or, constate-t-elle, «la France ne fait plus rêver [les Québécois], elle n’est plus enviée. La France n’est pas devenue pour autant une terre étrangère, mais un pays à découvrir comme un autre.»

Louise Beaudoin déplore aussi que, si nos artistes sont toujours nombreux à débarquer en France, les Québécois, eux, s’intéressen­t de moins en moins à la chanson, à l’art, au cinéma… et aux université­s françaises.

Un programme de bourses

Pour y remédier, celle qui fut aussi déléguée générale du Québec à Paris propose la création d’un programme de bourses qui permettrai­t de ramener plus d’étudiants québécois en France.

Si le Québec accueille 15 000 étudiants français chaque année, on recense à peine 1000 étudiants québécois dans l’Hexagone, la plupart pour de courts séjours. Or, dit-elle, «dans les bonnes années, il y en a déjà eu 5000»! La France demeure pourtant une des principale­s destinatio­ns des étudiants étrangers après les États-Unis et le Royaume-Uni. Paris se classe aussi parmi les villes étudiantes les plus accueillan­tes du monde.

Le constat n’est pas nouveau. En 2002, la ministre des Relations internatio­nales du Québec avait lancé un appel commun avec le ministre français de l’Éducation d’alors, Jack Lang, afin qu’on trouve les moyens d’augmenter le nombre d’étudiants québécois en France. Or, constate-t-elle, « il ne s’est rien passé depuis ».

Selon Louise Beaudoin, il faut d’abord «une volonté politique commune pour changer le regard des jeunes Québécois sur la France ».

Pour cela, elle propose de mettre sur pied un programme de bourses destiné aux « jeunes leaders» comme il en existe un aux États-Unis. Il faudra ensuite, dit-elle, lever certains obstacles, comme le coût prohibitif du logement à Paris.

Selon l’ancienne ministre, la Caisse de dépôt et placement du Québec pourrait jouer un rôle afin d’offrir un logement abordable aux étudiants québécois qui souhaitent étudier à Paris.

Un groupe franco-québécois sur le numérique

«Le nouveau président Macron et les élites de la mondialisa­tion heureuse qui l’entourent ne semblent pas s’intéresser au Québec ni particuliè­rement préoccupés par l’avenir de la langue française», a déploré l’ancienne ministre dans sa conférence. Pourtant, dit-elle, le Québec aurait intérêt à se rapprocher de la France pour défendre la place de la culture en français dans le domaine des industries numériques.

Car, dans ce domaine, la France est exemplaire, alors que « le Canada a baissé les bras devant les géants américains», dit-elle. L’ancienne ministre propose la création d’un groupe de travail franco-québécois sur le numérique. C’est une initiative semblable qui avait mené en 2003 à l’adoption par l’UNESCO de la Convention sur la diversité des expression­s culturelle­s.

Un tel groupe pourrait ensuite se tourner vers l’Organisati­on internatio­nale de la Francophon­ie afin que celle-ci retrouve enfin, dit-elle, « le coeur de sa raison d’être ».

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JACQUES BOISSINOT LA PRESSE CANADIENNE Louise Beaudoin déplore que les Québécois s’intéressen­t de moins en moins à la chanson, à l’art, au cinéma… et aux université­s françaises.

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