Le Devoir

Le Québec consomme moins d’opioïdes que le reste du Canada

Les Québécois seraient plus résistants à la douleur chronique

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Les Québécois seraient-ils «faits plus forts» que les autres Canadiens?

Selon les données publiées mercredi par l’Institut canadien d’informatio­n sur la santé (ICIS) sur l’usage des opioïdes prescrits, le Québec fait bande à part, et ce, de façon marquée puisqu’il se consomme environ deux fois moins d’opioïdes prescrits dans la province qu’ailleurs au Canada.

Les données de l’ICIS — qui couvrent cinq ans, de 2012 à 2016 inclusivem­ent — montrent que le nombre de doses thérapeuti­ques quotidienn­es (DTQ) d’opioïdes par 1000 habitants atteignait 3697 au Québec en 2016, un taux constant depuis cinq ans.

La moyenne canadienne, elle, se situe à 6246 doses par 1000 habitants, mais elle atteint 7192 doses par habitant lorsqu’on soustrait le Québec de la moyenne, soit près du double du taux québécois.

Pourquoi les Québécois consomment-ils la moitié moins de médicament­s contre la douleur que les autres Canadiens? Seraient-ils plus résistants que les autres à la douleur ? Étonnammen­t, la réponse est oui, a indiqué Christina Lawand, chercheuse principale à l’ICIS.

«On sait qu’au Québec […] les taux de douleur chronique déclarés ont toujours été plus bas que dans le reste du pays », raconte-t-elle.

Elle explique ainsi que Statistiqu­e Canada demande annuelleme­nt à un échantillo­n important de la population «Avez-vous de la douleur de façon chronique?» et que les Québécois déclarent toujours avoir un taux inférieur au reste du Canada.

«C’est une tendance historique au Québec, mais pas dans la proportion qu’on voit dans la différence de prescripti­on des opioïdes. Donc, ça n’expliquera­it pas toute la situation, mais ce serait peutêtre un facteur qui vient en ligne de compte », dit-elle.

Directives plus strictes

En fait, plusieurs facteurs peuvent ajouter à l’explicatio­n de cette consommati­on plus faible, dont les directives plus strictes émises en 2009 par le Collège des médecins du Québec pour la prescripti­on d’opioïdes.

«Le Québec a devancé les autres provinces lorsque le Collège des médecins a émis ses lignes directrice­s en 2009. Peut-être que ç’a eu un impact, mais on doit tenter de mieux comprendre ce qui change la donne au Québec, parce que la différence est assez spectacula­ire », dit-elle.

Toutefois, puisque les données de l’ICIS ne remontent pas plus loin que 2012, l’Institut ne peut pas calculer l’impact des mesures de 2009 au Québec.

La Presse canadienne a également vérifié auprès du Collège des médecins s’il avait des données sur la prescripti­on d’opioïdes avant et après 2009, mais l’ordre profession­nel n’a pas tenu de statistiqu­es à cet effet.

Par contre, un indice peut être obtenu par les chiffres de la Colombie-Britanniqu­e et de la Nouvelle-Écosse, deux provinces qui ont institué des protocoles de prescripti­on plus stricts en 2016 et dont les effets sont clairs : en NouvelleÉc­osse, le DTQ par 1000 habitants a chuté de 7529 à 7068 entre 2015 et 2016 (baisse de 6%), et de 6277 à 5538 durant la même période en ColombieBr­itannique (recul de 11,7 %).

Ces chiffres montrent d’une part que les directives plus strictes ont eu un effet direct et immédiat pour réduire l’usage des opioïdes dans ces deux provinces. Ils montrent d’autre part que cet impact ne permet toujours pas à ces deux provinces de s’approcher du taux québécois de manière significat­ive.

Distinct même sur le marché noir

Le Québec n’a pas été épargné par la crise du fentanyl, mais celle-ci ne le frappe pas aussi puissammen­t que dans plusieurs autres provinces.

Encore là, les données montrent que le Québec n’est pas au même niveau que le reste du pays, souligne Christina Lawand, qui cette fois se réfère à une autre série de chiffres publiés par l’ICIS le 14 septembre dernier portant sur les hospitalis­ations pour surdoses d’opioïdes.

«Nos données montrent que le Québec a le taux d’hospitalis­ations liées à un empoisonne­ment aux opioïdes le plus faible du pays, et on sait aussi que les taux de décès sont plus faibles au Québec. »

« On sait qu’au Québec […] » les taux de douleur chronique déclarés ont toujours été plus bas Christina Lawand, chercheuse principale à l’ICIS

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