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Le projet de loi visant à accroître l’indépendance de l’Unité permanente anticorruption (UPAC) ne réglera pas tous les problèmes au sein de cette organisation en crise.
Un désolant fiasco. L’éditorial de Brian Myles.
Àquelques jours de présenter son bilan annuel, l’UPAC traîne de lourds boulets. L’escouade traverse une crise importante, et ce n’est pas une attaque contre son intégrité que de l’affirmer haut et fort.
Selon des documents rendus publics par le bureau d’enquête de Québecor, le climat de travail est pourri au sein du corps de police. Les tensions entre les patrons et les employés, les problèmes de communication et la crainte de subir des représailles sont courants, principalement au sein de la quarantaine d’employés du service de vérification, qui étaient dirigés jusqu’à tout récemment par Michel Forget.
M. Forget, le numéro 2 de l’UPAC, a démissionné la semaine dernière sur un fond de scandale, après avoir essuyé publiquement un désaveu du ministre de la Sécurité publique, Martin Coiteux. Alors qu’il était officier à la Sûreté du Québec, dans les années 1990 et 2000, M. Forget a agi à titre d’intermédiaire pour vendre à ses collègues des actions d’une compagnie qui a fait un flop retentissant. Faut-il le rappeler, M. Forget était responsable de la vérification de l’intégrité des entreprises au sein de l’UPAC…
Voilà qui soulève de sérieuses questions sur le leadership du commissaire à la lutte contre la corruption, Robert Lafrenière, dont les libéraux ont renouvelé le mandat pour cinq ans en avril 2016. D’une part, M. Lafrenière a manqué de vigilance en ce qui concerne les comportements de son numéro 2. D’autre part, il n’a pas su faire preuve de la transparence la plus élémentaire en remettant aux élus de l’Assemblée nationale un rapport lourdement caviardé sur le climat de travail négatif au sein de l’UPAC. Il s’agit là d’un autre pied de nez aux députés, après l’affront provoqué par l’arrestation et la saisie du matériel du député libéral Guy Ouellette sans égard au respect de l’autonomie parlementaire.
M. Lafrenière, un policier d’expérience, teste les limites de sa crédibilité. Mardi, le ministre Coiteux lui a demandé des comptes en exigeant qu’il produise un nouveau rapport sur le climat de travail au sein de l’UPAC.
Ces tensions surviennent alors que l’Assemblée nationale étudie le projet de loi visant à accroître l’indépendance de l’UPAC. L’attitude du commissaire Lafrenière ne rassure en rien sur les prérogatives qu’il fera siennes une fois que l’UPAC aura obtenu son autonomie.
Heureusement, le gouvernement Couillard s’est finalement rallié à la suggestion des partis d’opposition et d’observateurs de la société civile qui réclamaient la création du Comité de surveillance des activités de l’UPAC. Ce comité, formé de trois membres, rendra ses avis publics. Les membres seront nommés par un comité de sélection formé du sous-ministre à la Sécurité publique, d’un avocat recommandé par le Bâtonnier et d’un professeur d’université évoluant dans un domaine pertinent. Ce dispositif permettra d’assurer l’indépendance du Comité de surveillance à l’égard de l’UPAC et du gouvernement.
Cette percée significative n’est pas dépourvue d’ironie. Les libéraux acceptent que les membres du Comité de surveillance soient nommés aux deux tiers des voix à l’Assemblée nationale… alors qu’ils refusent d’en faire autant pour la nomination du patron de l’UPAC. Cette disparité de traitement défie toute logique, car s’il y a un poste pour lequel les apparences de neutralité et d’indépendance à l’égard du gouvernement sont importantes, c’est bien celui du commissaire à la lutte contre la corruption. Il y a un malaise à ce qu’un chef de police nommé par un gouvernement libéral enquête sur le financement du PLQ.