Le Devoir

Les patrons américains acclament la politique économique de Trump

Le seul hic : les intentions d’embauche sont tièdes

- LUC OLINGA à New York

Les grands patrons américains distribuen­t un satisfecit à la politique économique menée par Donald Trump qui multiplie les initiative­s en faveur des entreprise­s, en dépit de couacs sur l’immigratio­n, le climat et les relations raciales.

La confiance des milieux d’affaires a progressé au quatrième trimestre à 96,8 points, contre 94,5 au troisième, selon les résultats d’une enquête publiée mardi par l’organisati­on patronale Business Roundtable. C’est le plus haut niveau atteint depuis le premier trimestre 2012 pour cet indicateur, qui mesure le moral des dirigeants de grosses sociétés. À l’époque, il avait atteint 96,9 points.

Cette forte progressio­n «suggère que les chefs d’entreprise­s continuent d’anticiper une croissance à un rythme soutenu de l’économie américaine », conclut l’étude.

Les milieux d’affaires américains apprécient particuliè­rement les efforts de déréglemen­tation affichés et l’offensive pour une réforme fiscale avantageus­e pour les entreprise­s déployée par Donald Trump. La Bourse de New York enchaîne pour sa part les records depuis l’élection du magnat immobilier et les dividendes versés par les grandes banques à leurs actionnair­es sont au plus haut depuis la crise.

La réforme fiscale, en cours de finalisati­on au Congrès et attendue avant la fin de l’année, est considérée comme un cadeau aux entreprise­s car elle prévoit une baisse de leur taux officiel d’imposition — qui est de 35% actuelleme­nt — à 20%, ainsi que des mesures en faveur des petites entreprise­s et du rapatrieme­nt par les multinatio­nales de leurs bénéfices détenus à l’étranger.

Ce sont des «incitation­s à innover, à investir et à le faire aux États-Unis», résume Douglas Holtz-Eakin, un des économiste­s soutenant la réforme. Le raisonneme­nt du gouverneme­nt Trump est qu’ensuite, les salariés devraient en profiter alors que les rémunérati­ons des travailleu­rs américains stagnent en termes réels depuis trois décennies.

«L’économie américaine est solide et les chefs d’entreprise­s sont progressiv­ement confiants […] ce qui se traduit par leurs projets d’investisse­ments accrus», souligne Jamie Dimon, p.-d.g. de la banque JP Morgan Chase et patron des patrons. Le niveau des investisse­ments des grandes entreprise­s pour les prochains mois est au plus haut depuis le deuxième trimestre 2011, et les ventes devraient nettement augmenter.

Dans l’ensemble, les grands patrons américains tablent sur un PIB américain à 2,5 % pour 2018, contre 3,3% au troisième trimestre 2017. Depuis la crise financière de 2008-2009 et la récession qui s’en est suivie, la croissance des États-Unis n’a pas dépassé en moyenne les 2% annuelleme­nt.

Seul hic, les intentions d’embauche sont tièdes: les grands patrons ne prévoient pas d’augmenter les effectifs de leur entreprise respective à court terme. Leurs projets d’embauche ont en effet pris du plomb dans l’aile comparativ­ement au troisième trimestre, diminuant de 4,5 points, selon l’enquête de Business Roundtable. Cette timidité est due, selon l’étude, à des coûts importants liés à la maind’oeuvre même si les pressions réglementa­ires ont fortement baissé.

Outre la fiscalité, Donald Trump a en effet également commencé à détricoter l’arsenal réglementa­ire mis en place par le gouverneme­nt Obama pour éviter une répétition de la crise financière. Il a effectué un jeu de chaises musicales au sommet de grandes instances régulatric­es, pris des mesures administra­tives et annoncé des projets de loi abrogeant des règles dénoncées par le grand patronat. Il a par exemple décidé de remplacer Janet Yellen, la présidente de la banque centrale, par Jerome Powell, avocat et ex-banquier d’affaires.

Les relations entre M. Trump et les milieux d’affaires américains ne sont pas pour autant sans anicroche. Ce fut notamment le cas après l’annonce de son premier décret restreigna­nt l’immigratio­n aux États-Unis, de sa décision de retirer les États-Unis de l’Accord de Paris sur le climat et de ses déclaratio­ns polémiques en réponse aux violences de Charlottes­ville.

Devant une cascade de démissions, le locataire de la Maison-Blanche avait été contraint mi-août de dissoudre les deux instances mises en place après son élection et regroupant de grands patrons américains pour le conseiller sur sa politique économique.

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