Jérusalem : Macron plaide pour la paix
Le premier ministre israélien était de passage à Paris où le président français lui enjoint de poser des « gestes » pour les Palestiniens
Le président français, Emmanuel Macron, a appelé dimanche le premier ministre israélien, Benjamin Nétanyahou, à faire des «gestes» envers les Palestiniens pour raviver le processus de paix après la défiance suscitée par la déclaration unilatérale des États-Unis sur Jérusalem.
Les deux dirigeants ont toutefois largement campé sur leurs positions lors d’un déjeuner à l’Élysée — y compris un aparté à la «tonalité très franche», selon l’entourage de M. Macron —, prélude à une visite lundi de M. Nétanyahou à Bruxelles qui s’annonce tout aussi délicate.
«J’ai invité le premier ministre à mener des gestes courageux envers les Palestiniens pour sortir de l’impasse actuelle» et permettre «la reprise du dialogue israélo-palestinien», a déclaré le président français à l’issue de la rencontre.
«Il me semble que commencer par le gel de la colonisation et des mesures de confiance à l’égard de l’Autorité palestinienne, ce sont des gestes […] qui sont d’importance», a ajouté le chef d’État.
«Je lui dis: “Laisse une chance à la paix, fais un geste vers les Palestiniens”», a-t-il martelé.
Le gouvernement israélien a relancé en octobre des projets de construction de milliers de logements de colons en Cisjordanie occupée et à Jérusalem-Est annexée. Environ 400 000 colons israéliens mènent une coexistence souvent conflictuelle avec 2,6 millions de Palestiniens en Cisjordanie.
Les mesures de confiance pourraient porter sur la liberté de circulation des Palestiniens, la mise en place de projets palestiniens dans le domaine agricole et l’amélioration des conditions de vie des détenus, a-t-on précisé à l’Élysée.
Benjamin Nétanyahou a une nouvelle fois souligné qu’Israël ne saurait avoir d’autre capitale que Jérusalem
Guerres de mots
S’il a regretté une nouvelle fois la décision de Donald Trump de reconnaître Jérusalem comme la capitale d’Israël, Emmanuel Macron a aussi «condamné avec la plus grande clarté toutes les formes d’attaques des dernières heures et [derniers] jours contre Israël», provoquées par l’annonce américaine.
Pour le quatrième jour d’affilée dimanche, des milliers de personnes ont manifesté au Moyen-Orient et à l’étranger contre cette décision. Depuis jeudi, quatre Palestiniens ont été tués dans des heurts avec des soldats ou dans des raids aériens israéliens.
Benjamin Nétanyahou a, pour sa part, une nouvelle fois souligné qu’Israël ne saurait avoir d’autre capitale que Jérusalem et que les tentatives de nier cette «connexion millénaire»
étaient «absurdes».
Les Israéliens posent comme condition préalable à toute discussion la reconnaissance d’Israël comme État juif par les Palestiniens et rejettent toute négociation dans un cadre international.
Emmanuel Macron a déclaré que la France soutiendrait toute initiative permettant «l’établissement de deux États», israélien et palestinien, tout en soulignant que « la paix ne viendra que des parties prenantes».
« Il y a une volonté de médiation américaine qui demeure. Je ne veux pas la condamner ab initio », a-t-il ajouté, alors que le conseiller et gendre de Donald Trump, Jared Kushner, travaille depuis plusieurs mois en toute discrétion à une relance du processus.
La France, concentrée sur les négociations de paix en Syrie et la situation au Liban, ne prendra pas elle-même d’initiative, a toutefois laissé entendre Emmanuel Macron, enterrant ainsi de facto celle lancée par son prédécesseur, François Hollande.
Quelque 70 pays avaient solennellement réitéré leur engagement dans la coexistence de deux États israélien et palestinien, le 15 janvier à Paris, au grand dam d’Israël, farouchement opposé à l’initiative.
Discordance à l’ONU
Rejetant les critiques internationales, l’ambassadrice américaine auprès de l’ONU, Nikki Haley a affirmé dimanche que la décision du président Trump allait aider «le processus de paix» au Proche-Orient.
Mais plusieurs personnalités, dont M. Abbas, ont déjà refusé de recevoir le vice-président américain, Mike Pence, lors de sa tournée prévue midécembre en Israël, en Cisjordanie et en Égypte.
En ne rencontrant pas M. Pence, «l’Autorité palestinienne rate de nouveau une occasion de discuter du futur de la région », a déclaré le chef de cabinet adjoint du vice-président, Jarrod Agen.
Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a au contraire estimé que la décision américaine «risque de compromettre» les efforts de paix.
Depuis la création d’Israël en 1948, la communauté internationale considère que le «statut» de Jérusalem doit être négocié entre Israéliens et Palestiniens.