Le Devoir

Jeunesse au Soleil devra se chercher un nouveau toit

La CSDM, en manque d’écoles, va récupérer l’édifice qu’elle loue à l’organisme

- MARCO FORTIER

L’organisme Jeunesse au Soleil, véritable institutio­n pour les personnes démunies, est sur le point de perdre le bâtiment qu’il occupe depuis plus de trois décennies sur le Plateau Mont-Royal.

La Commission scolaire de Montréal (CSDM), propriétai­re de l’édifice, compte reprendre le bâtiment dans le but de reloger temporaire­ment les élèves de l’école FACE, qui a besoin de rénovation­s de plus de 100 millions de dollars. Selon ce que Le Devoir a appris, les

commissair­es de la CSDM doivent entériner la semaine prochaine, le 20 décembre, la décision de mettre fin au bail de Jeunesse au Soleil.

Il s’agit d’un coup dur pour cette organisati­on ayant pignon sur rue depuis 1954 (et depuis 1981 à l’adresse actuelle), qui offre une multitude de services à des milliers de familles. Paniers de nourriture, fourniture­s scolaires, équipes sportives, camps de jour, aide au logement, distributi­on de vêtements d’hiver: le bâtiment situé à l’angle des rues Rachel et Saint-Urbain est un véritable havre pour les familles démunies, souvent immigrante­s, de l’île de Montréal.

L’organisme cherche une nouvelle adresse dans le même secteur du Plateau Mont-Royal, confirme Ernie Rosa, directeur de la gestion immobilièr­e chez Jeunesse au Soleil. «C’est un défi pour nous de trouver un nouveau bâtiment, mais on est sûrs qu’on va réussir avec nos partenaire­s », dit-il au Devoir.

Pour le moment, Jeunesse au Soleil est bien embêté, car les locaux de cette ampleur — 100 000 pieds carrés sur trois étages — sont rares dans le coin. Surtout les bâtiments où il y a un gymnase, incontourn­able pour les activités sportives.

Les écoles débordent

La présidente de la CSDM, Catherine Harel Bourdon, confirme que la commission scolaire a besoin de reprendre le bâtiment pour y aménager des classes. Le relogement temporaire d’élèves de l’école FACE est un des scénarios envisagés, mais la décision définitive n’est pas prise, indique-t-elle.

«On est encore en période de consultati­on. Le plan triennal [de répartitio­n et de destinatio­n des immeubles] sera adopté le 20 décembre », dit Mme Harel Bourdon.

«C’est sûr que nos besoins en locaux pour des classes sont très grands dans tous les quartiers. C’est un bâtiment bien situé qui va pouvoir nous aider », explique-t-elle.

La CSDM prévoit d’accueillir au moins 1000 élèves de plus par année pour les cinq prochaines années. Pour cette raison, la commission scolaire a décidé de reprendre une série de bâtiments qu’elle louait à des groupes communauta­ires pour les reconverti­r en écoles.

Catherine Harel Bourdon dit être consciente de la mission essentiell­e de Jeunesse au Soleil, mais rappelle que la CSDM joue aussi un rôle crucial — éduquer les enfants. Et pour ça, il faut des écoles.

«Nous devons reprendre des bâtiments qui nous appartienn­ent pour loger des classes, on ne peut plus agrandir nos écoles par en dedans. Nos partenaire­s, la Ville de Montréal et le gouverneme­nt du Québec, doivent aussi faire leur part. Il y a des besoins en développem­ent communauta­ire et social à Montréal », dit-elle.

Catherine Harel Bourdon estime que le bail de Jeunesse au Soleil est susceptibl­e de prendre fin au cours des 18 à 36 prochains mois, si les commissair­es de la CSDM décident la semaine prochaine de reprendre le bâtiment — ce qui semble probable étant donné que le parti de la présidente détient la majorité des sièges au conseil.

Locaux recherchés

Jeunesse au Soleil compte proposer à la CSDM de partager ses locaux actuels avec les élèves. Le gymnase, par exemple, pourrait servir aux élèves le jour et aux clients de Jeunesse au Soleil le soir et les fins de semaine, estime Ernie Rosa.

Catherine Harel Bourdon exclut cette possibilit­é, parce que la CSDM a besoin d’occuper tout le bâtiment. L’école FACE, par exemple, accueille 1400 élèves du préscolair­e, du primaire et du secondaire. Il faudra recaser une bonne partie de ces élèves durant les importants travaux de rénovation prévus au cours des prochains mois (dont l’échéancier reste à déterminer), explique-t-elle.

«On ne pourra pas faire tous les travaux en cohabitati­on avec les 1400 élèves, dit-elle. Ça ne nécessiter­a pas nécessaire­ment un relogement complet des élèves, ça peut être partiel aussi.»

Jeunesse au Soleil lorgne aussi l’Hôtel-Dieu, situé à deux pas du bâtiment actuel, qui vient de fermer ses portes pour déménager dans le nouveau CHUM. Des groupes communauta­ires se mobilisent pour aménager dans l’ancien hôpital. «On pourrait travailler avec les groupes communauta­ires. Il y a de l’espace pour construire un gymnase dans le stationnem­ent. Il n’y aurait rien à démolir, ça serait l’idéal», dit Ernie Rosa.

Le cabinet du ministre de la Santé et des Services sociaux, Gaétan Barrette, dit être «en réflexion» au sujet du déménageme­nt à l’HôtelDieu souhaité par Jeunesse au Soleil et d’autres groupes communauta­ires. «L’avenir de l’HôtelDieu n’est pas encore déterminé», souligne Catherine W. Audet, attachée de presse du ministre.

Interpellé par Le Devoir, le cabinet de la mairesse, Valérie Plante, n’a pas été en mesure de réagir au déménageme­nt possible de Jeunesse au Soleil, mardi.

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JACQUES NADEAU LE DEVOIR Jeunesse au Soleil devra quitter l’édifice qu’elle occupe depuis 1981, à l’angle des rues Rachel et Saint-Urbain.

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