Boissons gazeuses : Montréal fait des heureux
Des organismes pro-santé souhaitent que d’autres instances emboîtent le pas à l’administration Plante
Des groupes qui militent en faveur de saines habitudes de vie espèrent que la décision du conseil municipal de Montréal de bannir les boissons sucrées dans ses édifices inspirera d’autres municipalités et incitera le gouvernement du Québec à agir dans le même sens.
«Certaines municipalités disent que la santé n’est pas de responsabilité municipale. Montréal a prouvé le contraire hier», s’est réjoui Kevin Bilodeau, directeur des relations gouvernementales à la Fondation des maladies du coeur et de l’AVC.
M. Bilodeau applaudit au geste des élus montréalais qui, lors de l’assemblée du conseil municipal lundi, ont convenu d’éliminer progressivement les boissons sucrées dans les bâtiments municipaux et de demander au gouvernement fédéral de taxer ces produits.
«C’est la preuve que les élus disposent de moyens législatifs qui peuvent sauver des vies. Les boissons sucrées, ce n’est pas banal. Ça n’a aucun apport nutritif. Ce sont des bonbons liquides. Une cannette de Coke, c’est pratiquement 10 cuillères à café de sucre. C’est sournois», dit-il en évoquant les risques pour la santé.
Directrice de la Coalition québécoise sur la problématique du poids, Corinne Voyer abonde dans le même sens. Mais elle doute fort que la Ville en vienne à empêcher un citoyen d’apporter une boisson gazeuse pour la consommer dans un aréna, comme cela a été évoqué lundi.
«On va commencer à toucher aux droits de la personne. Le but, ce n’est pas d’éliminer complètement ce produit de l’offre alimentaire. Ce qu’on veut, c’est lui redonner une place plus raisonnable », explique-t-elle.
Deux arrondissements montréalais ont déjà banni les boissons sucrées dans les installations, soit Côte-des-Neiges– Notre-Dame-de-Grâce et SaintLaurent.
Dans les écoles de la Commission scolaire de Montréal, les boissons sucrées ont disparu depuis plusieurs années. Ce n’est pas le cas des universités, qui dans certains cas ont même des contrats d’exclusivité avec des entreprises telles que Coca-Cola ou Pepsi.
Politique de prévention en santé
L’exemple de la Ville de Montréal pourrait pousser d’autres instances à agir, d’autres villes, mais peut-être aussi le gouvernement du Québec, espère Corinne Voyer.
Les organisations qui militent pour une réduction de l’accès aux boissons sucrées fondent beaucoup d’espoir sur le dépôt imminent du plan d’action qui accompagnera la politique gouvernementale de prévention en santé dévoilée en octobre 2016.
Ce plan vise neuf cibles, dont la réduction de 10% de la proportion des fumeurs et l’augmentation de 20% de la proportion de jeunes de 12 à 17 ans actifs.
«On travaille pour déposer le plan d’action le plus rapidement possible», a assuré Bianca Boutin, attachée de presse de la ministre déléguée à la Santé publique et aux Saines habitudes de vie, Lucie Charlebois.
La politique prévoyait un chantier sur la pertinence d’une taxe sur les boissons sucrées au Québec, a-t-elle rappelé sans vouloir en dire davantage ou se prononcer sur la position prise par Montréal.
L’industrie déçue
La motion adoptée par le conseil municipal est accueillie avec déception par les représentants de l’industrie des boissons.
«On est très déçus, d’autant plus que les membres de notre association n’ont pas été consultés ni d’ailleurs d’autres intervenants qui pourraient avoir un mot à dire », note Martin-Pierre Pelletier, conseiller spécial de l’Association canadienne des boissons.
Des études ont démontré que la taxation n’était pas un outil efficace pour contrer l’obésité, affirme-t-il.
«Les consommateurs sont de plus en plus sensibles à leur apport calorique. Ils font des choix dans leurs boissons et celles-ci sont moins caloriques. On n’a pas besoin d’une taxe», dit-il avant de souligner que, malgré ces constats, le taux d’obésité continue d’augmenter.