Le Devoir

Le Canada à l’affût des ovnis

Plusieurs enquêtes ont été menées depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale

- KARL RETTINO-PARAZELLI

Les États-Unis ne sont pas les seuls à porter attention aux objets volants non identifiés. Entre la fin de la Seconde Guerre mondiale et le milieu des années 1990, le gouverneme­nt du Canada a déployé des efforts constants pour répertorie­r et enquêter sur les signalemen­ts effectués par les Canadiens.

Un article du New York Times révélant l’existence d’un programme du ministère de la Défense américain consacré aux ovnis, lequel aurait pris fin en 2012, a fait grand bruit au cours des derniers jours. Or, en plongeant dans les archives du gouverneme­nt canadien, on constate qu’au fil des ans, l’intérêt d’Ottawa pour les objets volants non identifiés n’a pas été moins grand.

Officielle­ment, les ministères de la Défense nationale et des Transports, la Gendarmeri­e royale du Canada (GRC) et le Conseil national de recherches du Canada

se sont tous occupés d’enquêtes ou de rapports liés à l’apparition d’ovnis à un moment ou à un autre entre 1947 et 1995.

Selon l’influent ufologue canadien Chris Rutkowski, le Canada coopère avec les États-Unis dans ce domaine depuis des décennies, et il est fort probable que cette collaborat­ion se poursuive encore aujourd’hui.

Des décennies d’analyses

Le gouverneme­nt du Canada a commencé à amasser des informatio­ns sur les objets volants non identifiés en 1947. À ce moment, de nombreux Canadiens qui ont le dernier conflit mondial en mémoire et une possible guerre froide en tête continuent de tourner leur regard vers le ciel, craignant une attaque. La GRC et le ministère de la Défense reçoivent alors plusieurs signalemen­ts de citoyens disant avoir aperçu un ovni.

En 1952, le gouverneme­nt canadien met sur pied le projet Second Story, qui a pour objectif d’analyser les témoignage­s liés à l’apparition de soucoupes volantes. Le procès-verbal de la première rencontre du comité mandaté pour ce projet indique que «la fréquence et la persistanc­e des observatio­ns [d’ovnis] tendent à mettre en doute la théorie des hallucinat­ions». On ajoute plus loin que des efforts plus intensifs doivent être déployés pour obtenir les données de manière organisée et procéder aux enquêtes et aux analyses nécessaire­s.

La même année, l’armée américaine lance le projet Blue Book, qui s’échelonner­a jusqu’en 1969. Au fil des ans, ses responsabl­es recevront plus de 12 600 signalemen­ts, dont 701 demeurent inexpliqué­s.

À la fin des années 1960, le Conseil national de recherches du Canada (CNRC), qui est le principal organe de recherche du gouverneme­nt canadien, devient le point de chute des rapports d’observatio­n d’ovnis provenant du ministère de la Défense, du ministère des Transports et de la GRC. Le CNRC a cessé de recueillir les comptes rendus en 1995.

Plus de 1000 signalemen­ts

Depuis le milieu des années 1990, le gouverneme­nt semble avoir laissé au secteur civil le soin de répertorie­r et d’analyser les signalemen­ts d’ovnis. L’ufologue Chris Rutkowski reçoit chaque année une poignée de rapports provenant des différente­s instances gouverneme­ntales. «Je soupçonne qu’il y a d’autres rapports concernant des ovnis qui sont gardés secrets, mais je n’y ai pas accès pour l’instant», affirme l’astronome de formation, qui habite à Winnipeg.

Grâce à ces signalemen­ts transmis par le gouverneme­nt et aux données compilées par des passionnés d’ufologie des quatre coins du Canada, M. Rutkowski produit depuis 1989 un rapport annuel comptabili­sant tous les événements rapportés au pays.

En 2016, 1131 événements ont été signalés, dont 38,5% en provenance du Québec. Après avoir été analysés par un réseau de chercheurs, d’astronomes et de spécialist­es de l’aviation, seulement 4% de ces signalemen­ts demeurent inexpliqué­s, ce qui représente le plus faible pourcentag­e enregistré en 28 ans.

«Même si la vaste majorité des signalemen­ts d’ovnis sont explicable­s, il y a toujours un faible pourcentag­e d’événements qui demeurent inexpliqué­s. Ces signalemen­ts ne signifient pas que le Canada a été visité par des extraterre­stres, mais ils indiquent que des obser vations ne peuvent pas être expliquées et qu’elles nécessiten­t davantage d’études scientifiq­ues», dit M. Rutkowski.

Ce que les gens pensent être un ovni peut par exemple être la lumière d’un avion, un drone ou un satellite qui pénètre l’atmosphère terrestre. «Les signalemen­ts d’ovnis ne sont pas tous aussi mystérieux qu’on pourrait le croire», insiste le chercheur. Contrairem­ent à certains ufologues, cet auteur de nombreux livres consacrés aux ovnis demeure donc prudent, sans fermer de portes.

«Certains croyants disent que je suis sceptique et, à l’opposé, certains disent que je suis trop croyant. Je pense qu’il est important de garder un esprit ouvert, dit-il. Ma formation en astronomie m’a appris qu’il peut y avoir de la vie ailleurs dans l’univers et qu’elle pourrait venir nous visiter. Mais nous n’en avons pas encore la preuve.»

 ?? LA PRESSE CANADIENNE ?? Dessin d’un ovni qui aurait survolé le lac Falcon, au Manitoba, en 1967.
LA PRESSE CANADIENNE Dessin d’un ovni qui aurait survolé le lac Falcon, au Manitoba, en 1967.

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