Le Devoir

Le marché du carbone canadien est à peaufiner, dit l’OCDE

Non seulement le prix de la tonne est trop faible, mais les différents systèmes des provinces devraient s’arrimer

- FRANÇOIS DESJARDINS

Le Canada a bien fait d’adopter une stratégie de tarificati­on du carbone à l’échelle du pays, mais les différence­s régionales font en sorte que sa mise en applicatio­n pratique sera un « défi colossal », estime l’OCDE.

Dans son «examen environnem­ental» des mesures de lutte contre les changement­s climatique­s, l’organisme parisien croit également que le prix du carbone visé par Ottawa — 50 $ la tonne d’ici 2022 — est trop faible et que le Canada «n’aura d’autre choix que de faire plus ».

Le gouverneme­nt canadien veut réduire les émissions de gaz à effet de serre de 30% d’ici 2030 par rapport au niveau de 2005. La tarificati­on du carbone, ce que plusieurs provinces font déjà, est au coeur des moyens qu’il veut prendre pour atteindre cet objectif. Ottawa a fixé un prix minimum (10$ la tonne) et le rythme auquel il doit augmenter, menaçant d’agir si des provinces refusent d’embarquer.

«Des efforts considérab­les devront être déployés pour comprendre comment appliquer le tarif de référence du carbone dans le système hybride de l’Alberta ou dans le système de plafonneme­nt et d’échange de droits du Québec et de l’Ontario, tout en assurant des règles du jeu équitables du point de vue de la concurrenc­e», a écrit l’OCDE.

«En effet, le champ d’applicatio­n et les tarifs, de même que l’efficacité des politiques, ne sont pas les mêmes selon les juridictio­ns et cela peut créer des frictions et mener à des pressions en faveur d’une convergenc­e des différents systèmes de tarificati­on dans le but de réduire les coûts, d’améliorer l’efficacité et de préser ver la compétitiv­ité des entreprise­s. »

Systèmes différents

Le Québec et l’Ontario ont choisi de tarifer le carbone à l’aide d’un système de plafonneme­nt et d’échange de droits d’émission (SPEDE). Celui-ci autorise les entreprise­s à émettre une certaine quantité de gaz à effet de serre (GES), mais le plafond de ces émissions diminue d’année en année. Les sociétés qui dépassent le plafond doivent se procurer des droits supplément­aires. La Colombie-Britanniqu­e et l’Alberta ont plutôt choisi une taxe carbone.

Selon l’OCDE, le Canada devrait instaurer « un dispositif de responsabi­lisation solide permettant de suivre et de comparer les progrès

d’une province à l’autre» et trouver une façon d’augmenter son tarif de référence «au cas où les émissions ne diminuerai­ent manifestem­ent pas comme prévu ».

L’OCDE s’interroge notamment sur le rôle que jouera le secteur des hydrocarbu­res sur les objectifs de réduction des GES, plus particuliè­rement les oléoducs devant relier l’Alberta au marché américain et à la côte pacifique. Il s’agit plus précisémen­t du projet Keystone XL et de l’expansion de l’oléoduc Trans Mountain.

«S’il veut respecter l’Accord de Paris, le gouverneme­nt fédéral devra écouter certaines recommanda­tions clés de l’OCDE et arrêter le développem­ent des pipelines et des sables bitumineux en plus d’abandonner les subvention­s aux combustibl­es fossiles», a affirmé le responsabl­e de la campagne ClimatÉner­gie à Greenpeace Canada, Patrick Bonin.

La sortie du rapport de l’OCDE mardi a coïncidé avec l’engagement renouvelé d’Ottawa de réduire de 40 % d’ici 2030 les émissions liées aux activités fédérales par rapport au niveau de 2005. Selon le gouverneme­nt, qui évoque des mesures concernant son parc de véhicules et l’«éco-approvisio­nnement», les émissions ont déjà diminué de 28 %. D’ici 2050, l’objectif est de réduire les émissions de 80 %.

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