Le marché du carbone canadien est à peaufiner, dit l’OCDE
Non seulement le prix de la tonne est trop faible, mais les différents systèmes des provinces devraient s’arrimer
Le Canada a bien fait d’adopter une stratégie de tarification du carbone à l’échelle du pays, mais les différences régionales font en sorte que sa mise en application pratique sera un « défi colossal », estime l’OCDE.
Dans son «examen environnemental» des mesures de lutte contre les changements climatiques, l’organisme parisien croit également que le prix du carbone visé par Ottawa — 50 $ la tonne d’ici 2022 — est trop faible et que le Canada «n’aura d’autre choix que de faire plus ».
Le gouvernement canadien veut réduire les émissions de gaz à effet de serre de 30% d’ici 2030 par rapport au niveau de 2005. La tarification du carbone, ce que plusieurs provinces font déjà, est au coeur des moyens qu’il veut prendre pour atteindre cet objectif. Ottawa a fixé un prix minimum (10$ la tonne) et le rythme auquel il doit augmenter, menaçant d’agir si des provinces refusent d’embarquer.
«Des efforts considérables devront être déployés pour comprendre comment appliquer le tarif de référence du carbone dans le système hybride de l’Alberta ou dans le système de plafonnement et d’échange de droits du Québec et de l’Ontario, tout en assurant des règles du jeu équitables du point de vue de la concurrence», a écrit l’OCDE.
«En effet, le champ d’application et les tarifs, de même que l’efficacité des politiques, ne sont pas les mêmes selon les juridictions et cela peut créer des frictions et mener à des pressions en faveur d’une convergence des différents systèmes de tarification dans le but de réduire les coûts, d’améliorer l’efficacité et de préser ver la compétitivité des entreprises. »
Systèmes différents
Le Québec et l’Ontario ont choisi de tarifer le carbone à l’aide d’un système de plafonnement et d’échange de droits d’émission (SPEDE). Celui-ci autorise les entreprises à émettre une certaine quantité de gaz à effet de serre (GES), mais le plafond de ces émissions diminue d’année en année. Les sociétés qui dépassent le plafond doivent se procurer des droits supplémentaires. La Colombie-Britannique et l’Alberta ont plutôt choisi une taxe carbone.
Selon l’OCDE, le Canada devrait instaurer « un dispositif de responsabilisation solide permettant de suivre et de comparer les progrès
d’une province à l’autre» et trouver une façon d’augmenter son tarif de référence «au cas où les émissions ne diminueraient manifestement pas comme prévu ».
L’OCDE s’interroge notamment sur le rôle que jouera le secteur des hydrocarbures sur les objectifs de réduction des GES, plus particulièrement les oléoducs devant relier l’Alberta au marché américain et à la côte pacifique. Il s’agit plus précisément du projet Keystone XL et de l’expansion de l’oléoduc Trans Mountain.
«S’il veut respecter l’Accord de Paris, le gouvernement fédéral devra écouter certaines recommandations clés de l’OCDE et arrêter le développement des pipelines et des sables bitumineux en plus d’abandonner les subventions aux combustibles fossiles», a affirmé le responsable de la campagne ClimatÉnergie à Greenpeace Canada, Patrick Bonin.
La sortie du rapport de l’OCDE mardi a coïncidé avec l’engagement renouvelé d’Ottawa de réduire de 40 % d’ici 2030 les émissions liées aux activités fédérales par rapport au niveau de 2005. Selon le gouvernement, qui évoque des mesures concernant son parc de véhicules et l’«éco-approvisionnement», les émissions ont déjà diminué de 28 %. D’ici 2050, l’objectif est de réduire les émissions de 80 %.