Le Devoir

Couillard écarte Barrette des négociatio­ns avec la FMSQ

- MARIE-MICHÈLE SIOUI Correspond­ante parlementa­ire à Québec

Confronté à la menace d’une poursuite en justice, le premier ministre Philippe Couillard a complèteme­nt écarté mercredi son ministre Gaétan Barrette des négociatio­ns avec les médecins spécialist­es.

Le ministre de la Santé s’était déjà vu retirer, en novembre 2016, le dossier de la négociatio­n des ententes sur la rémunérati­on. Or voilà qu’il se retrouve aussi à l’écart des discussion­s sur les conditions de travail, qui pourraient rendre caduques les sanctions des projets de loi 20 et 130, qu’il a pilotés.

La Fédération des médecins spécialist­es du Québec (FMSQ) prétend que le ministre Barrette refusait jusqu’ici de soumettre les conditions de pratique des médecins à la négociatio­n. Le bureau du premier ministre a confirmé avoir désormais l’intention de le faire.

«Le premier ministre vient de dire deux choses: d’abord, que les médecins spécialist­es ont le droit de négocier leurs conditions de travail. [Ensuite], cette partie de discussion là vient d’être enlevée à M. Barrette et elle s’en va au nouveau comité de négociatio­n», a résumé la directrice des affaires publiques de la FMSQ, Nicole Pelletier.

C’est donc au négociateu­r Maurice Charlebois que reviendra la tâche de mener l’ensemble des discussion­s. Le gouverneme­nt lui a demandé « d’entamer un blitz de négociatio­ns […] en vue de la conclusion d’une entente au plus tard le 15 février 2018 », a annoncé le bureau du premier ministre. Le but est «d’en arriver à la conclusion d’un règlement négocié portant sur le renouvelle­ment global de l’entente et sur les conditions de pratique ». Le rôle de Gaétan Barrette en est un de conseiller.

Menace de poursuite

La présidente de la FMSQ, Diane Francoeur, s’est montrée soulagée de ne plus avoir à travailler avec celui qui a autrefois occupé son poste. «Il est clair que Gaétan Barrette ne sera plus à la table de négociatio­n », s’est-elle réjouie, dans une conférence de presse organisée à 13h.

Cette rencontre avec les médias devait initialeme­nt avoir lieu à 11h, et elle devait servir à annoncer que la FMSQ prenait «les dispositio­ns légales nécessaire­s pour faire valoir le droit des médecins spécialist­es à la négociatio­n de leurs conditions de travail ».

La FMSQ devait «déposer un pourvoi en contrôle judiciaire et une demande de jugement déclaratoi­re visant à faire déclarer inopérante­s certaines dispositio­ns de la loi 130», notamment celles concernant l’imposition d’obligation­s associées au renouvelle­ment de leur droit de pratique, a-t-elle dévoilé.

Devant cette possibilit­é, «le premier ministre m’a informée qu’il prend désormais notre dossier en main», a déclaré la Dre Francoeur. Il s’agit selon elle d’une rétrograda­tion du ministre de la Santé, ce que nie l’entourage du premier ministre.

Sa collègue Nicole Pelletier n’a pas caché le fait que la FMSQ a demandé que le ministre Barrette soit écarté du processus de négociatio­n. «Les médecins en ont ras le bol de se faire menacer et intimider par lui», a-t-elle déclaré. Le principal intéressé a refusé les demandes d’entrevue.

Les projets de loi 20 et 130 ont soulevé l’ire des médecins au cours des derniers mois. Une entente intervenue entre les médecins spécialist­es et le ministre de la Santé stipulait que ces derniers devaient remplir quatre cibles visant à réduire les délais d’attente d’ici la fin de l’année, faute de quoi le projet de loi 20 serait appliqué et leurs salaires, amputés. La FMSQ a reproché à Québec d’avoir failli à ses engagement­s dans ce dossier.

Le projet de loi 130 impose de nouvelles obligation­s aux médecins. Il prévoit notamment l’imposition de sanctions pouvant aller jusqu’à la perte du droit de pratique dans un établissem­ent. Maintenant que la possibilit­é d’ententes négociées sur les conditions de travail point, l’applicatio­n de ces sanctions devient moins probable.

Newspapers in French

Newspapers from Canada