Le Devoir

Les géants du numérique, dont Apple, bataillent contre deux failles majeures

- ERWAN LUCAS à Paris JULIE CHARPENTRA­T à San Francisco

Amazon, Google et maintenant Apple… Alors que la liste des géants du numérique touchés par deux failles de sécurité majeures, «Spectre» et «Meltdown», s’allonge sans cesse, la course est lancée pour limiter la casse.

«Tous les systèmes Mac et appareils [mobiles] iOS sont affectés, mais il n’y a aucune attaque connue à l’heure actuelle», a fait savoir la firme à la pomme, dont les appareils sont généraleme­nt réputés pour leur sécurité, jeudi soir sur son blogue officiel.

«Spectre» et «Meltdown» concernent la quasi-totalité des microproce­sseurs fabriqués ces dix dernières années par les entreprise­s Intel, AMD et ARM. Aucun ordinateur, téléphone intelligen­t ou tablette ne pourrait fonctionne­r sans ces composants miniaturis­és, sorte de centres nerveux qui exécutent les programmes informatiq­ues.

Cela distingue ces deux failles des alertes de sécurité plus classiques, qui concernent généraleme­nt du « software », des logiciels, et non du « hardware », soit les pièces composant les appareils.

Accès aux informatio­ns privées

«Spectre» et «Meltdown» peuvent en théorie permettre d’accéder au «noyau» d’un système d’exploitati­on informatiq­ue, «exposant ainsi les informatio­ns critiques qui y seraient stockées», par exemple des mots de passe, explique dans une note publiée jeudi Chris Morales, chef de l’analyse sécurité pour l’entreprise de cybersécur­ité américaine Vectra Networks.

Luke Wagner, ingénieur logiciel pour Mozilla, explique sur le blogue sécurité de cette fondation que la faille permettrai­t «à partir d’un contenu Internet de venir lire les informatio­ns privées ».

La quasi-totalité des appareils électroniq­ues et informatiq­ues fabriqués ces dernières années dans le monde est équipée de puces potentiell­ement vulnérable­s.

Les plus grands noms du secteur numérique, tels Amazon, Google, Microsoft ou encore la fondation Mozilla, se sont donc lancés dans une course contre la montre pour limiter la casse, en annonçant la mise en place de correctifs logiciels.

Le géant américain des microproce­sseurs Intel, de même que ses concurrent­s AMD ou ARM, a également commencé à diffuser des mises à jour de sécurité.

Dans un communiqué diffusé jeudi, Intel a affirmé qu’il aurait d’ici la fin de la semaine prochaine «diffusé des mises à jour pour plus de 90% de ses processeur­s sortis ces cinq dernières années ».

Pour éviter toute possibilit­é de piratage, Apple, de son côté, « conseille de ne télécharge­r des applicatio­ns que depuis des sites sûrs, comme l’App Store». Le groupe précise avoir lui aussi diffusé des correctifs pour limiter l’impact possible de la faille «Meltdown» et en annonce d’autres prochainem­ent.

Remplacer le microproce­sseur

Selon certains experts, seul le remplaceme­nt du microproce­sseur permettrai­t de se prémunir durablemen­t, une perspectiv­e lourde de conséquenc­es pour tout le secteur.

Cela étant, expliquent-ils également, un piratage de ces processeur­s exige un niveau technique très élevé, limitant selon eux les risques.

L’agence américaine responsabl­e de la cybersécur­ité (CERT) a indiqué «ne pas avoir eu connaissan­ce» jusqu’ici de tentatives de piratage utilisant «Spectre» et «Meltdown».

L’autorité allemande responsabl­e de la sécurité informatiq­ue (BSI) n’a, elle non plus, constaté aucune «exploitati­on active» de ce problème de sécurité à ce jour, mais elle a néanmoins recommandé aux acteurs du secteur, dans un communiqué, de se protéger «le plus rapidement possible».

L’alerte sécuritair­e se doublait vendredi d’interrogat­ions au sujet de ventes d’actions par le patron d’Intel.

Selon le magazine spécialisé Solutions numériques, Intel a donné l’alerte dès fin novembre au sujet de l’existence d’une faille sur ses microproce­sseurs. Or, au quatrième trimestre 2017, le p.-d.g. du groupe, Brian Krzanich, a vendu près de 900 000 actions Intel, abaissant de moitié sa participat­ion au capital du groupe, selon l’agence économique Bloomberg.

Cette vente « n’a pas de lien» avec l’affaire des failles de sécurité, a assuré à Bloomberg un porte-parole de la société, assurant que M. Krzanich avait exercé des options selon un calendrier établi à l’avance et automatisé.

L’action Intel a encore perdu près de 2% jeudi, finissant à 44,43$, après avoir déjà clôturé en repli de 3,40 % la veille.

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