Le Devoir

Le Vacarme creuse son sillon en ligne

Le disquaire de vinyles cible « la clientèle québécoise qui a des goûts un peu spécifique­s »

- PHILIPPE PAPINEAU

Ne cherchez pas l’adresse du nouveau magasin de vinyles Le Vacarme. Ou alors cherchez plutôt son adresse Web, car son créateur, JeanFranço­is Rioux, vétéran travailleu­r de la musique d’ici, a décidé de lancer une boutique de disques en ligne, destinée non seulement aux Montréalai­s, mais aux amateurs de 33 tours de toute la province.

La boutique de vinyles neufs, classiques et alternatif­s, a une double stratégie. Le coeur battant du Vacarme — allez, on vous le dit, c’est au www.levacarme.com — se trouve dans le quartier Villeray, à Montréal, et c’est de là que Jean-François Rioux peut lui-même livrer les commandes faites dans les alentours. Mais son site simple et convivial, tout en français, est aussi destiné à «la clientèle québécoise qui a des goûts un peu spécifique­s» et qui veut commander en ligne, résume celui qui a été disquaire 13 ans à L’Oblique.

«Si tu es au Saguenay, tu n’en as pas de boutiques de vinyles indépendan­tes, tu es obligé de passer par Amazon. On voulait éviter ça. Et on a des bons prix parce qu’on n’a pas vraiment de loyer, on paye un petit espace, on n’est pas 100 employés, donc on peut se permettre de se prendre de plus petits pourcentag­es de profit.»

Jean-François Rioux, qui a longtemps été de l’équipe du festival Diapason à Laval, a un préjugé favorable pour les pressages actuels, pour les vinyles neufs — et donc pas « les vieux Pink Floyd de 1967 qui puent le sous-sol». Il garde en stock beaucoup de ce qu’il aime et qu’il avait du mal à dénicher à Montréal.

« On a de très bons disquaires ici, on est choyés. Malgré tout, avant que j’ouvre boutique, je me promenais et je cherchais certains disques que je ne trouvais pas, des classiques ou des nouveautés.» Il a donc trouvé une façon de régler son problème.

Le Vacarme, lancé en septembre, aura à terme une grande sélection de musique locale, tous styles confondus, promet Rioux. Ce dernier veut aussi des incontourn­ables — comme

« Il y a un projet qui se trame pour ne pas juste être un magasin, mais un point de rencontre dans différents quartiers Jean-François Rioux

David Bowie, Leonard Cohen, Miles Davis, Nirvana, ou Sonic Youth — et des nouveautés indie, comme King Gizzard, Godspeed You! Black Emperor, Chad Vangaalen. «J’appelle ça le rock moderne, ce qui se fait aujourd’hui et qui va peut-être devenir des classiques dans 15 ans. J’espère les dégoter avant les autres, ou juste présenter des artistes qui sont malheureus­ement inconnus.»

Son talon d’Achille? Le hiphop, dont il n’est pas un fervent amateur, ou alors ce qui est très pop. «Mais j’en commande pour ceux qui en veulent et qui sont un peu plus patients. Récemment, j’ai fait venir un vinyle de Beyoncé pour quelqu’un qui voulait faire affaire avec un disquaire local. »

Autre difficulté: éviter les frais de livraison trop élevés qui alourdisse­nt souvent la facture. Le Vacarme permet en tout cas aux gens «de regrouper leurs achats», et Jean-François Rioux aimerait bien intégrer la livraison gratuite à l’avenir.

Des projets

Jean-François Rioux caressait le rêve d’avoir son magasin de disques depuis 1999. Déjà à l’époque il avait commencé à amasser des CD, à en acheter des caisses ici et là pour se faire un fonds de commerce.

«J’avais un pseudo-associé dans le temps et, à un moment il a été démotivé, il trouvait ça difficile d’avoir un local, on a laissé tomber le projet et ça tombait bien en fait, parce que le CD a commencé à piquer du nez» quelque temps après.

Avoir pignon sur rue reste tentant pour Rioux, mais les cas de boutiques qui voient leur loyer grimper rapidement et sont ainsi pris à la gorge financière­ment le découragen­t.

L’option qu’il préfère pour l’instant: celle des «pop-up shop». Une journée par mois, le disquaire compte s’installer dans un bar de son coin, l’EtOH, rue Jarry, avec des caisses de vinyles et, pourquoi pas, les commandes récentes des mélomanes qui pourraient venir chercher leurs précieux objets tout en découvrant un commerce local.

«Et il y a un projet qui se trame pour ne pas juste être un magasin, mais un point de rencontre dans différents quartiers. Et l’été, j’aimerais voir des gens à vélo pour livrer, pour être écologique et que ça se fasse le plus facilement possible.» Sans tambour ni trompette, Le Vacarme commence à faire du bruit.

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JACQUES NADEAU LE DEVOIR Jean-François Rioux caressait le rêve d’avoir son magasin de disque depuis 1999.

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